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Les exigeants paysages orchestraux d’Éric Montalbetti

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Eric Montalbetti (né en 1968) : Orchestral Pictures. Concerto pour flûte et orchestre « Memento vivere ». Ouverture philharmonique pour grand orchestre. Eclair physioniomique, fantaisie symphonique après Paul Klee. Emmanuel Pahud, flûte, Orchestre de la suisse romande, direction : Jonathan Nott (Concerto). Orchestre du Gürzenich de Cologne, direction : Duncan Ward (Ouverture). Orchestre philharmonique de Monte-Carlo, direction : Kazuki Yamada (Eclair physionomique). 1 CD Alpha classics. Enregistré en mai 2019 à Genève ; juin 2024 à Cologne ; mars 2018 à Monte-Carlo. Notice de présentation en français, anglais et allemand. Durée : 69:21

 

Orchestral Pictures propose un intéressant florilège d', maître contemporain de l'orchestration.

De 1996 à 2014, a été le directeur artistique de l'Orchestre Philharmonique de Radio France. Une proximité de l'orchestre qui ne pouvait que nourrir sa passion de compositeur. Après deux albums consacrés à sa musique de chambre, Alpha propose un florilège d'œuvres orchestrales dans un disque intitulé Orchestral Pictures.

Ces « images » ou « photographies » orchestrales correspondent bien à l'art d', brillant orchestrateur qui se réclame à la fois héritier de Debussy, Messiaen, Boulez et Tristan Murail. Bref, une étonnante synthèse entre les sortilèges harmoniques du premier, les modes du deuxième, le sérialisme de Boulez et la musique spectrale de Murail. Une recherche que résume Éric Montalbetti : « J'entends l'orchestre dans l'espace. Mon désir est d'immerger l'auditeur au cœur du son et d'ouvrir la perspective d'écoute. » Et cela en ne recourant pas à l'électronique, mais bien en utilisant toutes les ressources du grand orchestre traditionnel.

Les trois œuvres sélectionnées dans ce disque en sont un excellent exemple.

Le Concerto pour flûte Memento vivere, qui ouvre le programme, est une parfaite introduction à l'œuvre d'Éric Montalbetti. L'enregistrement est celui même de la création de l'œuvre, en mai 2019, par les dédicataires, le flûtiste et l' sous la direction de . « Memento vivere » – « souviens-toi que tu es vivant » : c'est bien sûr le contrepied du traditionnel « Memento mori » – « souviens-toi que tu vas mourir. » La flûte est l'instrument du souffle, donc de la vie, de l'élan toujours recommencé. Ce concerto, qui enchaîne six sections « comme une prière » est un hymne au souffle, du premier de la naissance, au dernier de la mort, mais aussi de sa potentielle résurrection. Et n'est pas sans rappeler certaines pages d'André Jolivet, autre compositeur fasciné par la flûte. L'œuvre est dense, kaléidoscopique, mais néanmoins fluide. La partie de flûte est d'une virtuosité redoutable, toutes les techniques de souffle y étant utilisées, piqué, vibré, glissé. Le soliste, , y est superlatif, d'une tenue parfaite, jusqu'à la montée enivrante du dernier souffle dans un suraigu lumineux.

Composée en 2021, l'Ouverture philharmonique pour grand orchestre, n'est pas tout à fait du même intérêt. Sorte de grand concerto pour orchestre, cette page est un peu l'hommage de l'ancien directeur du « Philhar » à son orchestre. Tous les pupitres de l'orchestre sont sollicités à un moment ou un autre de cette page qui est comme un grand éventail sonore qui se déploie peu à peu jusqu'à une fusion éruptive. L', sous la direction de , brille de mille feux dans cette page spectaculaire qui s'égare cependant un peu en bavardages dans la seconde partie, avant de se refermer sur elle-même.

La longueur (plus de trente minutes) est également la limite d'Éclair physionomique, fantaisie symphonique après Paul Klee, qui conclut le disque. Comme dans l'œuvre du peintre suisse, les figures du trait et du cercle cohabitent dans la composition. Le trait, c'est la fulgurance, le jaillissement. Le cercle, c'est la perfection, l'enroulement. Ces deux gestes sonores sont ici sculptés dans une œuvre fleuve où alternent les contrastes entre « flexion » et « déflagration« . Les percussions, en très grand nombre, sont omniprésentes et apportent de multiples couleurs à ce vaste paysage sonore abstrait qui n'est pas sans évoquer certaines fulgurances d'Edgard Varèse. L', sous la direction de , est assez subjuguant de virtuosité et d'endurance dans cette œuvre de longue haleine et exigeante, jusqu'à l'éclair, ou plutôt l'orage final s'achevant dans le grondement lointain de la grosse caisse.

 

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Eric Montalbetti (né en 1968) : Orchestral Pictures. Concerto pour flûte et orchestre « Memento vivere ». Ouverture philharmonique pour grand orchestre. Eclair physioniomique, fantaisie symphonique après Paul Klee. Emmanuel Pahud, flûte, Orchestre de la suisse romande, direction : Jonathan Nott (Concerto). Orchestre du Gürzenich de Cologne, direction : Duncan Ward (Ouverture). Orchestre philharmonique de Monte-Carlo, direction : Kazuki Yamada (Eclair physionomique). 1 CD Alpha classics. Enregistré en mai 2019 à Genève ; juin 2024 à Cologne ; mars 2018 à Monte-Carlo. Notice de présentation en français, anglais et allemand. Durée : 69:21

 
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