Paavo Järvi et la Tonhalle de Zurich dans une enthousiasmante Symphonie n° 8 de Bruckner
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Anton Bruckner (1824-1896) : Symphonie n° 8 en ut mineur. Version Nowak 1890. Tonhalle-Orchester Zürich, direction : Paavo Järvi. 1 CD Alpha classics. Enregistré en septembre 2022 à Zürich. Notice de présentation en anglais, allemand et français. Durée : 81:36
AlphaA la monumentalité pleine de dévotion, bien qu'un peu statique et pesante, d'un Bernard Haitink avec la Radio bavaroise, Paavo Järvi à Zurich oppose une vision enthousiasmante, plus hédoniste que fervente, contrastée et pleine de vie, qui ne manquera pas de surprendre.
En cette année anniversaire fêtant le bicentenaire de la naissance d'Anton Bruckner, les différents enregistrements consacrés au corpus symphonique du maitre de Saint-Florian sont pléthore, tout particulièrement ceux consacrés à la Symphonie n° 8, grandiose, véritable cathédrale sonore tutoyant en permanence le divin. Certains sans doute plus convaincants que d'autres (tel Simon Rattle…)… Après une belle Septième, le chef estonien, Paavo Järvi, apporte avec l'Orchestre de la Tonhalle de Zurich une contribution surprenante à cette commémoration.
Paavo Järvi choisit la version Nowak de 1890 (un peu plus courte que la version Haas), version dans laquelle la symphonie fut créée en 1892, à Vienne, dédiée à l'empereur François-Joseph 1er, sous la direction de Hans Richter.
D'un tempo assez modéré, l'Allegro moderato débute par une entame splendide de profondeur, empreinte d'un intense sentiment d'attente et de mystère ; le phrasé s'y déroule ensuite, souple, chargé de nuances, avec un sens de la construction peut être moins marqué que chez certains (Haitink notamment) dans une vision où la ferveur et la verticalité restent discrètes au profit d'une lecture presque chambriste, allégée, plus immanente que transcendante, exaltée par une lumineuse clarté et une transparence de texture vivifiantes qui dégagent tous les timbres et donnent jour à de nombreux contrechants habituellement laissés dans l'ombre (harpe). L'attention aux détails de la partition est constante et la progression constamment tendue se fait dans une alternance d'épisodes lyriques (cordes) et de crescendos puissants (cuivres et timbales tonitruantes) comme autant de moments très humains, d'espérance et de défaite, de dévotion et de doute, d'exaltation et de méditation se juxtaposant dans des contrastes abrupts sans lissage.
Sur un tempo allègre, le Scherzo se déploie haletant, dans une progression inexorable, imprégnée d'un intense sentiment d'urgence scandé par de timbales et de cuivres effrayants encadrant un trio très lyrique confié aux cordes et à la petite harmonie.
Nimbé d'une belle clarté crépusculaire, plus mélancolique que véritablement éploré, l'Adagio, commencé dans un murmure comme venu d'un autre monde, peine ensuite à maintenir la tension et à développer la verticalité indispensable, Paavo Järvi y privilégiant une douce tristesse plutôt que la douloureuse déploration épurée, acétique et oppressante d'un Haitink. Très lyrique et horizontal, le discours émeut plus qu'il ne transporte malgré les magnifiques et émouvantes prestations des tubas wagnériens, des cordes somptueuses et une coda grandiose.
Tendu, fortement contrasté, resplendissant, récapitulatif, animé tantôt d'un lyrisme à faire pleurer les pierres, tantôt d'une violence suffocante, le Finale achève cette nouvelle référence brucknérienne dans la puissance et la plénitude, portée par toutes les forces de la splendide phalange zurichoise. Indispensable !
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