Le Philharmonique de Radio France et Mikko Franck, interprètes sereins de César Franck
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César Franck (1822-1890) : Symphonie en ré mineur ; Ce qu’on entend sur la montagne, poème symphonique op. 13. Orchestre philharmonique de Radio France ; direction : Mikko Franck. 1 CD Alpha Classics. Enregistré à l’Auditorium de Radio France, en mars 2018 et juin 2019. Notice en français, anglais et allemand. Durée : 67:21
AlphaLes orchestres français programment régulièrement la Symphonie en ré mineur de César Franck. C'est au tour de Mikko Franck de livrer sa version avec le Philharmonique de Radio France.
Au disque, le premier enregistrement fut réalisé en 1928 avec l'Orchestre de la Société des Concerts du Conservatoire placé sous la direction de Philippe Gaubert. En bel ordre de bataille, l'Orchestre philharmonique de Radio France et Mikko Franck nous proposent dès les premières pages de la Symphonie en ré mineur, un décor à la fois élégant et attrayant. Nul drame, mais une conception assez « objective » de l'œuvre, travaillée en finesse, concentrée sur la clarté de la polyphonie. Aucun pathos, mais une distanciation que l'on dirait « dans l'air du temps…». Ce lyrisme nullement exalté nous entraîne vers Brahms dont Franck admirait tant le Quintette pour piano et jouait avec délice, les Danses hongroises ! Mikko Franck bâtit l'interprétation sans emphase, se reposant sur d'excellents pupitres de cordes. Les deux thèmes antagonistes – le premier, inquiet et angoissé répond au second, qui est l'expression de la passion – n'entrent pas en conflit.
Le second mouvement est porté par des solistes remarquables dont le cor anglais. Sa partie concertante est essentielle et il est dommage que le livret ne précise pas s'il est joué par Anne-Marie Gay ou bien Stéphane Suchanek. La fluidité de la direction, l'élégance des phrasés aux cordes, la réponse du cor, par exemple, mais aussi les contrechants parfaitement ciselés, creusent efficacement la lecture.
Le finale qui récapitule les thèmes déjà présentés, s'enrichit d'une marche. Elle donne un élan supplémentaire à l'ensemble. Redoutant le pathos plus que tout, Mikko Franck maintient ses troupes dans un cadre strict. C'est dommage car le va-et-vient incessant entre l'expression de la douceur et de la douleur, profondeur et énergie, clarté et puissance manque singulièrement d'engagement. Uns fois encore, l'œuvre penche du côté des quatre opus symphoniques de Brahms.
Ce qu'on entend sur la montagne, poème symphonique d'après Victor Hugo apparaît d'une extraordinaire originalité. Composée en 1846 – avant même le premier poème symphonique (1849) de Liszt, du même titre et connu aussi sous le nom de Bergsinfonie – la partition de Franck pressent les grandes fresques sonores de la fin du siècle, celles de Richard Strauss, notamment. L'expression de la solitude de l'Homme confronté à la nature se traduit par une écriture qui anticipe également l'Or du Rhin de Wagner. La pâte sonore de l'orchestre se glisse dans l'ample respiration de la partition au caractère panthéiste. Un panthéisme contenu sous la baguette de Mikko Franck. La lecture est, en effet, peu narrative. Ainsi, les épisodes de tensions rythmiques et d'ostinatos ne créent pas de ruptures saisissantes avec les effets de notes tenues aux cordes (elles-mêmes divisées), les cantilènes (excellente clarinette), les éclats des cuivres et des percussions. La dimension si berliozienne de l'orchestration qui fait appel à trois trombones, un ophicléide et une percussion puissante, s'en tient, ici, à une réalisation un peu trop tranquille. De fait, le caractère répétitif et finalement abstrait de la pulsation perd en expression romantique, ce qu'il gagne en perfection de la mise en place.
On pourra préférer la version techniquement moins aboutie, mais plus « charnelle » de l'Orchestre philharmonique de Liège dirigé par Christian Arming (Fuga Libera) ou
des gravures mémorables avec Leonard Bernstein et Charles Munch (Orchestre National de France), André Cluytens et Jean Martinon (Orchestre National de la Radio Française, puis de l'ORTF).
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César Franck (1822-1890) : Symphonie en ré mineur ; Ce qu’on entend sur la montagne, poème symphonique op. 13. Orchestre philharmonique de Radio France ; direction : Mikko Franck. 1 CD Alpha Classics. Enregistré à l’Auditorium de Radio France, en mars 2018 et juin 2019. Notice en français, anglais et allemand. Durée : 67:21
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