Don Giovanni, la révolution Jacobs

Après les concerts à Paris et à Bruxelles, Harmonia Mundi édite dans un luxueux coffret le Don Giovanni de René Jacobs. C'est peu dire que ce coffret était des plus attendus après une Clemenza di Tito intrigante mais parfois très irritante.

Dès les premières notes de ce Don Giovanni, l'oreille est accrochée par le flot musical. Bien évidement c'est le travail de René Jacobs qui attire l'esprit. Dans un passionnant livret de présentation, le chef gantois nous explique ses options interprétatives et ses recherches sur les tempi. Dès lors le résultat est absolument enthousiasmant par la vie insufflée à cette musique et par une recherche sur les récitatifs absolument magistrale. Fidèle des explorations de Jacobs, le Freiburger Barockorchester est au diapason de la vision du chef et offre une très large palette de couleurs ainsi qu'une virtuosité hors pair.

Côté vocal, le musicien a réuni une distribution très intéressante. Johannes Weisser apporte à Don Giovanni la jeunesse de son timbre et la fraîcheur de sa musicalité, cependant, il lui manque encore l'étoffe des grands titulaires actuels du rôle. Grand baryton mozartien actuel, Lorenzo Regazzo est un Leporello absolument idéal par le brio éclatant de son timbre et le vécu de son personnage. Le délicat Kenneth Tarver est, comme souvent, parfait en Don Ottavio, alors que Nikolay Borchev est un Masetto bourru mais bien chantant. Côté conquêtes, Don Giovanni est un peu à la peine. Alexandrina Pendatchanska possède certes l'étoffe du rôle mais le manque de contrôle des moyens vocaux nuit quelque peu à la qualité du chant. Olga Pasichnyk est, comme trop souvent, assez atone et en manque d'engagement. Seule, la délicieuse Sunhae Im apporte fraîcheur et candeur à Zerlina. Rien à redire, comme toujours de la prestation du RIAS Kammerchor.

Donc, en dépit de quelques réserves sur la distribution, il faut fêter ce coffret unique et génial pour une direction absolument magistrale. On doit noter que ce box propose en appendice à la fin du troisième disque les différents airs proposés par la version dite de Prague.