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Don Giovanni à Berne, voyou sans panache

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Berne. Stadttheater. 6-III-2011. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Don Giovanni, dramma giocoso en deux actes sur un livret de Lorenzo Da Ponte. Mise en scène : Elisabeth Linton. Décors et costumes : Julia Hansen. Lumières : Jean Kalman. Avec : Robin Adams, Don Giovanni ; Simone Schneider, Donna Anna ; Andreas Hermann, Don Ottavio ; Luciano Batinic, Il Commendatore ; Fabienne Jost, Donna Elvira ; Carlos Esquivel, Leporello ; Milcho Borovinov, Masetto ; Anne-Florence Marbot, Zerlina. Chœur du Stadttheater (chef de chœur : Tarmo Vaask). Berner Symphonieorchester, direction : Dorian Keilhack

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Imaginons un jeune qui, par envie de découverte, et parce qu'on lui a seriné les oreilles que l'opéra est loin d'être aussi ennuyeux qu'on le laisse parfois paraître, et qu'on entend à l'envi que les théâtres lyriques veulent promouvoir son art auprès du jeune public, imaginons donc ce jeune s'offrant le spectacle d'un opéra. Et pourquoi pas Don Giovanni qui, aux dires de tout le monde, est l'un des plus beaux jamais écrits.

Comment comprendra-t-il alors ce qu'il voit sur la scène du Stadttheater de Berne ? Qui sont ces deux copains, un peu voyous en santiags et pantalons de cuir noirs qui se prennent les pieds dans un grand drap de lit blanc recouvrant toute la scène ? Des deux, qui est Leporello le serviteur, qui est Don Giovanni le maître ? Et quelle noce pour une Zerline en robe à fleurs, alors que Donna Elvira est revêtue d'une robe de mariée ?

Certes la majorité du public connaît l'intrigue. Par habitude, il arrive à coller les scènes d'Elisabeth Linton au livret de Lorenzo Da Ponte. Mais, sans ligne directrice et avec des personnages manquant totalement de caractérisation, les enjeux du drame restent aux abonnés absents et le mythe de Don Juan perd de son mystère, de sa force.

D'habiller la scène d'un seul grand drap blanc pour symboliser l'ambiance de coucheries qui entoure l'intrigue de Don Giovanni peut être une idée intéressante. Encore faut-il l'utiliser. Alors, avec toutes les allusions sexistes qui parsèment le livret de Don Giovanni, pourquoi ne pas aller au bout des choses et les suggérer avec force plutôt que de se contenter de quelques gestes non-aboutis de pelotage ? Certes les membres du chœur du Stadttheater n'ont pas le physique des membres d'un Boys Band, mais quel besoin de les ridiculiser en leur faisant danser un twist en «marcel» ?

Ainsi, Don Giovanni apparait comme un loubard excité sans commune mesure avec le maître de cérémonie menant son monde et ses gens selon son bon vouloir. Dans sa démarche, il s'abaisse au niveau de son serviteur. L'allure jeune, la voix est puissante, juste, le baryton possède tous les atouts pour être un Don Giovanni de qualité. Malheureusement, le baryton anglais ne soigne guère les couleurs de sa voix bâclant ainsi un personnage qu'il aurait pu porter vers une véritable création. Au lieu de cela, un voyou sans panache.

(Leporello) surprend agréablement en se débattant comme un beau diable. Mais là encore, la précipitation, le manque d'une certaine expérience lui fait manquer l'air du catalogue qu'il a pourtant les moyens d'exprimer avec verve.

Appréciable de trouver un chanteur avec une voix dans le rôle de Masetto (Milcho Borovinov), un rôle, parce que relativement modeste, souvent dévolu aux pires barytons.

Comme on souffre lorsque la justesse n'est systématiquement pas au rendez-vous de la prestation d'un chanteur. C'est le cas du ténor Andreas Hermann (Don Ottavio) dont les interventions sont un supplice pour les oreilles mêmes les moins sensibles.

Du côté féminin, si la soprano (Zerline) chante correctement mais sans génie, (Donna Elvira), d'habitude si à l'aise dans beaucoup de répertoires, montre ici les limites de ses possibilités. Navigant sou vent sur le fil du rasoir, si le chant démontre toujours une belle assurance, il peine à offrir une ligne et des couleurs qui habillerait le personnage de tout son esprit.

La révélation du plateau reste la soprano allemande (Donna Anna). Capables des plus belles nuances vocales et d'agilités confondantes, elle emporte les suffrages et offre les seuls moments de plaisir vocal de cette soirée. Pas besoin de mise en scène quand on possède dans la voix les accents justes du personnage.

Dans la fosse, dirige un peu a son affaire en même temps que pas très soucieux d'imprimer un caractère à la musique de Mozart.

Peut-être est-il dans les prérogatives d'un metteur en scène actuel que son spectacle ne soit pas vu par tous les spectateurs. Malheur donc aux abonnés de la galerie qui, à cause d'un praticable s'avançant sur la fosse d'orchestre et sur le premier rang du parterre, sont contraints durant un bon quart de l'opéra à la seule écoute de chanteurs invisibles parce que chantant sous le balcon ou sur les côtés de la scène.

Crédit photographique : (Zerlina), (Don Giovanni) ; Andreas Hermann (Don Ottavio), (Donna Anna), (Zerlina), (Don Giovanni), (Donna Elvira) © Philipp Zinniker

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Berne. Stadttheater. 6-III-2011. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Don Giovanni, dramma giocoso en deux actes sur un livret de Lorenzo Da Ponte. Mise en scène : Elisabeth Linton. Décors et costumes : Julia Hansen. Lumières : Jean Kalman. Avec : Robin Adams, Don Giovanni ; Simone Schneider, Donna Anna ; Andreas Hermann, Don Ottavio ; Luciano Batinic, Il Commendatore ; Fabienne Jost, Donna Elvira ; Carlos Esquivel, Leporello ; Milcho Borovinov, Masetto ; Anne-Florence Marbot, Zerlina. Chœur du Stadttheater (chef de chœur : Tarmo Vaask). Berner Symphonieorchester, direction : Dorian Keilhack

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