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Paris. Salle Pleyel. 16,17-XI-2013. Hector Berlioz (1803-1869) : Waverley, grande ouverture op.1 ; Cléopâtre, scène lyrique pour soprano et orchestre ; Symphonie fantastique Op.14. Roméo et Juliette, symphonie dramatique op.17. Karen Cargill, mezzo-soprano ; Olga Borodina, mezzo-soprano ; Kenneth Tarver, ténor ; Evgeny Nikitin, basse. London Symphony Chorus, Guildhall Singers, chef de chœur: Simon Hasley. London Symphony Orchestra, direction : Valery Gergiev.
Le « Berlioz tour » de Valery Gergiev et du LSO passait par Paris pour deux concerts symphoniques et vocaux, avec en point d'orgue la Symphonie fantastique et Roméo et Juliette et en apéritif l'opus 1 Waverley et l'œuvre que le compositeur présenta sans succès pour le prix de Rome 1829, Cléopâtre.
C'était l'occasion de retrouver le London Symphony Orchestra dans un répertoire qu'il a fait sien presque plus que nos orchestres hexagonaux, personne n'ayant oublié tout le travail, concerts et enregistrements, fait avec Colin Davis pour la diffusion de l'œuvre d'Hector Berlioz.
A l'issue de ces deux concerts on serait tenté de dire que l'orchestre n'avait pas perdu sa main berliozienne car il s'y est montré parfaitement à l'aise dès le départ. Ainsi la sensation de manque de mise au point qui traverse certains concerts de ce chef surbooké ne fut jamais présente, permettant au chef d'insuffler un ton personnel à son interprétation, ce qui fut particulièrement sensible lors de l'exécution de la Fantastique.
Avant d'en arriver là l'occasion nous était offerte d'entendre l'assez rarement jouée ouverture Waverley, première œuvre symphonique que Berlioz composa en 1827. Certes on y trouve diverses influences, mais le style Berlioz y est déjà fort bien perceptible. L'interprétation qui nous en a été donnée en ouverture de ce premier concert fut enlevée, vivante, consistante, et même si nous manquons ici de comparaisons, nous parut immédiatement convaincante. Tout autant d'ailleurs que la Cléopâtre qui suivit aussitôt, chantée avec une saine sobriété par la mezzo-soprano Karen Cargill, en parfait accord avec l'accompagnement orchestral offert par le LSO.
Mais c'est bien sûr l'Opus 14 que nous retiendrons de ce premier soir car, à l'instar de ce que nous offrait Paavo Järvi ici même à peine plus d'un an avant, Valery Gergiev nous proposait une lecture tout sauf prévisible et convenue du chef-d'œuvre de Berlioz. N'hésitant pas à varier le tempo, parfois même de façon fulgurante, laissant chanter à leur tour chacun des excellents solistes de l'orchestre, le chef conduisit de main de maître la progression de la symphonie des Rêveries initiales tout en touché, jusqu'à l'apothéose de la Scène d'une nuit de sabbat et ses cloches en coulisse. Donnant volontiers un climat sombre au suspens menaçant, le chef teinta la symphonie d'un pessimisme quasi constant, même dans Le bal dont la valse était plus symbolique et ironique que dansante. Les trois derniers mouvements furent l'occasion pour l'orchestre de faire étalage de toutes ses qualités, et d'arracher l'enthousiasme de la salle.
Le lendemain nous attendait la symphonie dramatique Romeo et Juliette, œuvre mi vocale mi symphonique, faisant appel à deux chœurs et trois solistes en plus du grand orchestre. Aucune baisse de tension ni d'intensité ne fut perceptible entre les deux concerts et c'est avec rage et intensité que le chef lança les Combats et Tumultes introductifs. Il nous sembla néanmoins que les deux parties chorales et vocales étaient plus immédiatement emballantes que la symphonie centrale, peut-être un peu longue. Si le chef et l'orchestre y sont à saluer, une grande part du crédit en revient aux trois solistes vocaux dont on saluera bien bas leur remarquable diction du français, même légèrement teintée de leur accent maternel. La grande voix d'Olga Borodina, puissante, nuancée et magnifiquement timbrée, fut réellement impressionnante dans toute la première partie qu'elle sut idéalement dramatiser sans en rajouter. N'hésitant à fouetter le tempo le chef mit l'agilité vocale du ténor Kenneth Tarver à l'épreuve dont il se tira brillamment dans sa courte évocation de La Reine Mab ou la Fée des Songes. Concluant les parties solistes Evgeny Nikitin incarna un Frère Laurent sobre et plein de compassion, autant que directif lorsqu'il impose réconciliation aux familles ennemies. Sa voix noire à souhait allait à merveille à cette interprétation d'autant que son excellente diction permettait de suivre le texte presque sans l'aide du sur titrage. Même s'ils laissaient paraitre ici où là quelques coquetteries de prononciation du français, les deux chœurs prirent une pleine part dans la réussite de ce Romeo et Juliette dont on s'est dit, lorsque l'interprétation est de haute volée comme ici, sitôt la dernière note éteinte qu'il s'agit vraiment d'une œuvre à écouter en salle tant son ampleur dépasse les capacités d'une écoute domestique.
Crédit photographique : Valery Gergiev et le LSO © Julien Mignot -Salle Pleyel
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Paris. Salle Pleyel. 16,17-XI-2013. Hector Berlioz (1803-1869) : Waverley, grande ouverture op.1 ; Cléopâtre, scène lyrique pour soprano et orchestre ; Symphonie fantastique Op.14. Roméo et Juliette, symphonie dramatique op.17. Karen Cargill, mezzo-soprano ; Olga Borodina, mezzo-soprano ; Kenneth Tarver, ténor ; Evgeny Nikitin, basse. London Symphony Chorus, Guildhall Singers, chef de chœur: Simon Hasley. London Symphony Orchestra, direction : Valery Gergiev.