Le grand discours d’Aurélie Filippetti, ministre de la Culture et de la Communication, prononcé le 1er mars 2013 à l’occasion de la conférence de presse « L’égalité des femmes et des hommes dans la culture et la communication » peine encore à faire ses effets auprès de l’élite musicale du pays, du moins en ce qui concerne la direction d’orchestre.
Le moins que l’on puisse dire est que les propos de Bruno Mantovani, Directeur du Conservatoire National Supérieur de Musique le 3 octobre dernier sur France Musique ne sont pas convergents avec les ambitions de la ministre.
Extraits choisis :
Aurélie Filipetti : « Contrairement à beaucoup d’idées reçues, la réalité de la situation des femmes dans l’univers de la culture et des médias est bien peu satisfaisante. » (…) Je viens d’installer le comité pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans la culture et la communication.
Bruno Mantovani : « Moi, je suis un tout petit dérangé par tous les discours sur la parité ou sur la discrimination positive… »
Aurélie Filipetti : « les femmes ont souvent un statut secondaire, un rôle social minoré ; elles sont plus souvent anonymes, plus souvent présentées et valorisées à travers leur rôle familial »
Bruno Mantovani : « Il y des ambitions qui peuvent être très différentes chez un homme et chez une femme. (…) « Il y a aussi le problème de maternité qui se pose… Vous allez me dire que les papas sont dans le même cas… Mais malgré tout, le rapport d’un enfant à sa mère n’est pas celui d’un enfant à son père. »
Aurélie Filipetti : « On sait bien que les différents modes d’expression artistique et culturelle, qu’il s’agisse du spectacle vivant, du cinéma, de la littérature…, et bien sûr les médias, véhiculent des représentations sexistes et des stéréotypes d’autant plus puissants qu’ils sont souvent peu visibles, en raison de l’autorité intellectuelle de la création »
Bruno Mantovani : « Il y a peu de femmes cheffes d’orchestre, c’est vrai… il y a peu de… d’africains chefs d’orchestre… »
Aurélie Filipetti : « il faut aussi montrer et démontrer tout ce que les femmes font déjà, et qu’elles peuvent faire avec le même talent et les mêmes compétences que les hommes, dans tous les domaines.’
Bruno Mantovani : « Vous savez, le métier de chef d’orchestre est compliqué » (…) « Nous, on incite tout le monde à se présenter à la classe de chef d’orchestre, mais les femmes ne sont pas forcément intéressées. Moi, je peux pas non plus mettre une baïonnette derrière chaque étudiante qui aurait des capacités »
Aurélie Filipetti : « Je pense à toutes ces femmes qui sont de grandes artistes, à des journalistes qui vont sur des terrains de guerre, à celles qui dirigent avec talent des institutions culturelles. »
Bruno Mantovani : « Il y a aussi des fois un frein physiologique… Le métier de chef est un métier qui est particulièrement éprouvant physiquement »
Aurélie Filipetti : « J’ai demandé que chacun s’engage dans cette saison [de l’égalité] ; je fais appel à tous, aux institutions nationales, qui doivent jouer pleinement leur rôle de service public et être exemplaires, comme à toutes les autres. J’ai déjà écrit à 270 dirigeants d’institutions, pour les engager à prendre des initiatives à ce sujet, et à contribuer ainsi à l’enrichissement de notre vie artistique et culturelle. D’ores et déjà, le mouvement s’amorce… »
Bruno Mantovani : « Pour moi, la seule discrimination, quelle que soit la discipline, c’est le concours ».