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Bruxelles. Théâtre Royal de La Monnaie. 13-IX-2010. Giuseppe Verdi (1830-1901) : Macbeth, Mélodrame en quatre actes. Livret de Francesco Maria Piave. Mise en scène : Krzysztof Warlikowski ; Décors et costumes : Malgorzata Szczesniak ; Lumières : Felice Ross ; Vidéo : Denis Guéguin ; Chorégraphie : Saar Magal. Avec : Scott Hendricks, Macbeth ; Carlo Colombara, Banco ; Iano Tamar, Lady Macbeth ; Janny Zomer, Dama di lady Macbeth ; Andrew Richards, Macduff ; Benjamin Bernheim, Malcolm ; Justin Hopkins, Medico/Servo/Araldo ; Gerard Lavalle, Sicario. Chœur du théâtre royal de La Monnaie, direction : Martino Faggiani ; Orchestre du théâtre royal de La Monnaie de Bruxelles, direction : Paul Daniel
Pour clôturer une saison placée sous le signe de la tragédie, La Monnaie de Bruxelles offrait Macbeth de Verdi réglée par le bouillant Krzysztof Warlikowski.
Chef d'œuvre de jeunesse, Macbeth ouvre d'innombrables potentialités dramaturgiques et stimule les metteurs en scène. On attendait donc du scénographe polonais une lecture décapante et violente. Les spectateurs n'ont pas été déçus et ont copieusement hué le metteur en scène : comportement rarissime à La Monnaie où «compromis belge» oblige, on reste toujours très mesuré et très bien élevé ! Warlikowski en est même resté quelques instants pantois !
Même si le travail de Warlikowski mérite réflexion, il souffre de proposer une énième actualisation de type «guerre contemporaine» et «syndrome post-traumatique» qui, cette saison à La Monnaie, fait plus que recuit ! Après les Iphigénie de Gluck et Idomeneo de Mozart, les fournisseurs de treillis et d'armes factices ont fait leur miel lors de cette saison bruxelloise. Le public (et nous aussi !) a parfois l'impression devoir supporter le même concept de mise en scène en changeant juste la bande son ! Les années 1990 ont connu le concept «réfugiés ex-Yougoslavie», les années 2000 sont à l'uniforme commando et aux mitrailleuses en bandoulière…
Mais, l'idée du scénographe est originale et mérite, sur le papier, d'être défendue. Le couple criminel n'est pas un binôme de parvenus rongés par l'ambition ou une relation malsaine dominant-dominé, mais deux personnages blessés par les évènements : Macbeth d'avoir trop combattu et tué d'innocents et son épouse meurtrie par la perte d'un enfant commun, il y a de nombreuses années (piste suggérée par le texte de Shakespeare mais abandonnée par Verdi). Séparés par cette mort et par les années de guerre, les Macbeth cognent méchamment dans les gamelles…
Le spectacle commence, sous les meilleurs auspices (ou plutôt «hospices» tant les lits d'hôpitaux font partie du vocabulaire du scénographe…) avec des actes n°I et n°II absolument incroyables par leur tension dramatique viscérale qui culmine dans le banquet en l'honneur de Macduff, resserré et passablement glauque. D'autres scènes, comme le meurtre de Duncan, par le côté hyperréaliste du pétage de plomb de Macbeth et du meurtre froid, réalisé devant d'autres protagonistes et figurants, glace le public. Visiblement encombré des nombreuses scènes de chœur, Warlikowski le place aux derniers étages du théâtre. Chœur de la tragédie grecque ou métaphore du public spectateur passif d'une tragédie du pouvoir, la question reste ouverte. Ce procédé renforce encore l'isolement des deux héros, souvent laissés seuls, dans leurs délires et dialogues, sur le plateau de La Monnaie qui semble ici très vaste.
Mais le problème avec Warlikowski, c'est qu'il ne peut s'empêcher d'en faire de trop ! Les deux derniers actes viennent gâcher et même torpiller les idées fulgurantes de ce travail. Dans ses cauchemars de l'acte n°III, Macbeth est la proie de fantômes d'enfants qui reviennent le hanter et le torturer, le tout renforcé par force de vidéos tirées de films anciens ou diffusées en temps réel à partir de gros plans sur les personnages. La longueur des scènes et la gratuité des effets commence à lasser comme ce supplice néo-vaudou avec un figurant qui enfonce des aiguilles dans un bébé en celluloïd censé représenter Macbeth qui se tord de douleurs à chaque nouvelle pique ! On continue plus loin dans la nausée lors d'un acte n°IV obscur et incompréhensible : Macduff qui semble tout autant névrosé et proche du suicide semble tuer un Macbeth paraplégique lors d'un meurtre rituel à la machette alors que les figurants meurent peu à peu (on avoue ne pas comprendre les deux larbins de l'usurpateur déchu qui se déshabillent avant de danser en slip ; cette «valse» étant le prélude à un suicide par asphyxie dans des sortes de préservatifs géants…).
L'atout de Warlikowski est de compter sur une équipe de chanteurs enragés qui s'investissent, jusqu'à l'épuisement total, dans ce spectacle. Scott Hendriks n'est certainement pas le Macbeth le mieux chantant des années 2000, mais sa prestation scénique reste unique par son engagement. Quant à Iano Tamar, Carlo Colombara et Andrew Richards, ils allient aisance vocale et prestation théâtrale.
Plutôt en perte de vitesse ces derniers temps, le chœur de La Monnaie fait preuve de vaillance et de témérité alors que l'orchestre de La Monnaie est galvanisé par le chef Paul Daniel. Sa direction plutôt clinique et chirurgicale conjugue muscle et nerf au profit d'une tension dramatique et musicale. Bien peu latine mais terriblement convaincante, cette battue convient à l'approche au laser du metteur en scène.
Crédit photographique : © Bernd Uhlig
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Bruxelles. Théâtre Royal de La Monnaie. 13-IX-2010. Giuseppe Verdi (1830-1901) : Macbeth, Mélodrame en quatre actes. Livret de Francesco Maria Piave. Mise en scène : Krzysztof Warlikowski ; Décors et costumes : Malgorzata Szczesniak ; Lumières : Felice Ross ; Vidéo : Denis Guéguin ; Chorégraphie : Saar Magal. Avec : Scott Hendricks, Macbeth ; Carlo Colombara, Banco ; Iano Tamar, Lady Macbeth ; Janny Zomer, Dama di lady Macbeth ; Andrew Richards, Macduff ; Benjamin Bernheim, Malcolm ; Justin Hopkins, Medico/Servo/Araldo ; Gerard Lavalle, Sicario. Chœur du théâtre royal de La Monnaie, direction : Martino Faggiani ; Orchestre du théâtre royal de La Monnaie de Bruxelles, direction : Paul Daniel