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Paris. Opéra-Bastille. 31-V-2010. Richard Wagner (1813-1886) : Die Walküre, première journée en trois actes sur un livret du compositeur. Mise en scène : Günter Krämer ; Décors : Jürgen Bäckmann ; Costumes : Falk Bauer ; Lumières : Diego Leetz ; Mouvements chorégraphiques : Otto Pichler. Avec : Thomas Johannes Mayer, Wotan ; Katarina Dalayman, Brünnhilde ; Robert Dean Smith, Siegmund ; Ricarda Merbeth, Sieglinde ; Yvonne Naef, Fricka ; Günther Groissböck, Hunding ; Marjorie Owens, Gerhilde ; Gertrud Wittinger, Ortlinde ; Silvia Hablowetz, Waltraute ; Wiebke Lehmkuhl, Schwertleite ; Barbara Morihien, Helmwige ; Hélène Ranada, Siegrune ; Nicole Piccolomini ; Grimgerde, Atala Schöck, Rossweisse. Orchestre de l’Opéra National de Paris, direction : Philippe Jordan
Décidément les productions de l'Opéra de Paris – telle cette Die Walküre – nous invitent à fermer les yeux : partie musicale exceptionnelle, mais réalisation scénique indigente.
Avec Rheingold, Günter Krämer signait une mise en scène peu inventive, qui empruntait beaucoup d'idées aux autres, le tout mené avec intelligence. L'action presque cinématographique du prologue lui convenait mieux que le plus conventionnel découpage en trois actes de cette Walkyrie. Encore un peu de Regietheater avec les compagnons de Hunding déguisés en guérilleros massacrant allègrement une population civile (avec viol obligé) pendant le prélude. Puis de longs moments de statisme, un couple Wotan / Fricka qui a abandonné ses plastrons de bodybuildés pour une tenue de petits bourgeois (merci Patrice Chéreau) dans un intérieur agrandi par un miroir géant (merci Yannis Kokkos), des walkyries en pyjama et talons hauts (sauf Brünnehilde, en pataugas du meilleur effet) qui jouent comme des jeunes filles de pensionnat des années 50 ou se mettent à danser en fond de scène une Macarena en version ralentie. Quelques images saisissantes, telle la fuite de Sieglinde et Siegmund ou l'immolation finale. Mais un sommet de kitsch et de mauvais goût est atteint avec la célébrissime Chevauchée des Walkyries. Le pyjama est troqué pour la blouse d'infirmière (mais toujours en talons hauts), les héros morts au combat sont trimballés nus sur des couvertures de l'armée, déposés sur des tables d'hôpital et nettoyés – d'ailleurs être frotté par une Walkyrie/infirmière en a émoustillé un… Nous sommes d'accord, habiter scéniquement cette scène, une des plus connues du répertoire, est une gageure. Etre à ce point à coté de la plaque soulève l'admiration, et l'indignation du public qui a copieusement sifflé l'équipe scénique.
Il fallait fermer les yeux, et ne se souvenir que de la musique. Philippe Jordan, après un très bon Rheingold, transcende « son » orchestre dans cette Walkyrie. Accompagnateur attentif, il sait faire sonner l'orchestre sans couvrir les chanteurs. Le choix de ce chef d'orchestre pour reprendre un poste resté trop longtemps vacant nous semblait alors judicieux. Il est maintenant évident !
La distribution n'est pas en reste. Ricarda Merbeth et Robert Dean Smith étaient un couple idéal dans Die Tote Stadt, le doublé gagnant continue. La ligne de chant est soutenue, les voix, sans être surpuissantes, sont projetées avec soin. Falk Struckmann s'étant fait porter pâle, c'est pour notre plus grand bonheur qu'il est remplacé par Thomas Johannes Mayer. L'émission est un peu fruste, mais il connaît son rôle et le tient avec brio de bout en bout. Le vibrato marqué de Katarina Dalayman n'est pas gênant en Brünnhilde, personnage qu'elle a étrenné sur les plus grandes scènes. Yvonne Naef est une Fricka de luxe, et Günther Groissbock confirme la bonne impression laissée dans le rôle de Fafner de l'Or du Rhin. Enfin les huit walkyries forment un ensemble homogène, sans qu'une voix ne dépare par rapport aux autres.
Le niveau musical ne cesse de monter de spectacle en spectacle, par des distributions qui nous épargnent enfin des « sopranos à tout faire » et des « chefs à tout diriger ». Mais serions nous condamnés, au train ou vont les choses, à aller à l'opéra en fermant les yeux ?
Crédit photographique : Katarina Dalayman (Brünnhilde) ; Robert Dean Smith (Siegmund) & Günther Groissböck (Hunding) © Elisa Haberer / Opéra National de Paris
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Paris. Opéra-Bastille. 31-V-2010. Richard Wagner (1813-1886) : Die Walküre, première journée en trois actes sur un livret du compositeur. Mise en scène : Günter Krämer ; Décors : Jürgen Bäckmann ; Costumes : Falk Bauer ; Lumières : Diego Leetz ; Mouvements chorégraphiques : Otto Pichler. Avec : Thomas Johannes Mayer, Wotan ; Katarina Dalayman, Brünnhilde ; Robert Dean Smith, Siegmund ; Ricarda Merbeth, Sieglinde ; Yvonne Naef, Fricka ; Günther Groissböck, Hunding ; Marjorie Owens, Gerhilde ; Gertrud Wittinger, Ortlinde ; Silvia Hablowetz, Waltraute ; Wiebke Lehmkuhl, Schwertleite ; Barbara Morihien, Helmwige ; Hélène Ranada, Siegrune ; Nicole Piccolomini ; Grimgerde, Atala Schöck, Rossweisse. Orchestre de l’Opéra National de Paris, direction : Philippe Jordan