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Toulouse. Théâtre du Capitole. 14-IV-02. Richard Wagner : Die Meistersinger von Nürnberg. Hans Tschammer, Jorma Silvasti, Guido Jentjens, Gert Henning-Jensen, Ralf Lukas, Miranda van Kralingen, Cornelia Wulkopf, etc. Orchestre National du Capitole de Toulouse. Chœurs du Capitole. Direction musicale : Pinchas Steinberg. Mise en scène : Nicolas Joel. Décors : Jean-Marc Stehlé et Antoine Fontaine. Costumes : Gérard Audier. Lumières : Vinicio Cheli.
C'est sur une vision d'une terrifiante tradition que s'ouvre le rideau au terme de l'ouverture des Maîtres Chanteurs de Nuremberg proposés par le Théâtre du Capitole de Toulouse.
Car, s'il se trouve au monde une partition lyrique chargée de tragique, c'est bien Les Maîtres Chanteurs de Nuremberg. En effet, si l'unique opéra comique de Richard Wagner, conversation en musique de plus de 4h30 traitant de questions purement esthétiques, se situe entre comédie et débat philosophico-musicalo-littéraire, il se situe sur un registre de triste mémoire, la primauté du « saint art allemand ».
Au milieu de sa production de l'Anneau du Nibelung commencé en 1999 sur La Walkyrie, puis, en 2001 sur L'Or du Rhin, et avant Siegfried et Le Crépuscule des dieux la saison prochaine, Nicolas Joël poursuit au Capitole de Toulouse l'édification de ce qui semble devoir s'annoncer comme une intégrale Wagner, à l'exemple de ce que vient de faire Daniel Barenboïm à l'Opéra d'Etat de Berlin. Venu à Wagner comme assistant de Patrice Chéreau pour le Ring du Centenaire à Bayreuth en 1976, Nicolas Joël aborde ce même cycle comme l'antithèse de son aîné, se montrant fidèle de la tradition. Néanmoins, il ne faut surtout pas mettre en question l'intégrité du travail du directeur du Théâtre du Capitole, qui connaît parfaitement les effroyables conséquences que les nazis ont tirées des controverses des maîtres chanteurs, ce qu'atteste par ailleurs l'intéressant programme de salle qui revient sur la question par le biais de textes signés Thomas Mann et Georges Bernanos.
Les Maîtres Chanteurs est donc l'un des opéras du répertoire les plus complexes à monter, puisqu'il s'agit de chanter l'Allemagne ancestrale dont le national-socialisme a fait son miel pour édifier le monstrueux concept de « race supérieure ». C'est pourquoi la scénographie utilisée dans la nouvelle production toulousaine, héritée des images popularisées par les artistes bucoliques des années noires est écrasante, replaçant l'ouvrage dans un contexte rappelant le Bayreuth d'avant quarante-cinq. Dessinés par Jean-Marc Stehlé, apparemment omnipotent tant il est partout, au Capitole une semaine après Le Barbier de Séville à Bastille et Idomeneo à Garnier, et par Antoine Fontaine, les décors sont d'un réalisme outré, avec cathédrale gothique, rue et atelier aux portes anciennes, vue panoramique sur Nuremberg et ses maisons à colombages, et les costumes de Gérard Aubier tout aussi chargés d'allusions tragiques, avec vêtements tyroliens pour la gente masculine et larges robes fleuries pour les jeunes femmes. Nicolas Joël anime en directeur d'acteur des personnages hauts en couleurs, et la distribution est fort homogène. Si, en Miranda van Kralingen, l'on tient une Elsa en demi-teinte, Cornelia Wulkopf campe en revanche une chaleureuse Magdalena. Côté hommes, l'équilibre est presque parfait. Jorma Silvasti est un Walther von Stolzing éclatant et mâle, Gert Henning-Jensen un David enthousiaste et juvénile. Au sein de la confrérie des Maîtres chanteurs, tous fort bien caractérisés, relevons le Sixtus Beckmesser de Ralf Lukas, qui donne à ce personnage abject une humanité surprenante, et, bien s'il faille déplorer la voix fatiguée de Guido Jentjens en Veit Pogner, l'on tient en Hans Tschammer un Hans Sachs exceptionnel de vérité. La voix est solide, ferme et égale sur toute la largeur du spectre, le timbre radieux, sa présence bouleversante d'humanisme. Considérant la stature impressionnante du baryton basse allemand, l'on se demande ce qu'aurait donné Jean-Philippe Laffont s'il n'avait renoncé à sa prise de rôle originellement annoncée dans cette production. Reste l'Orchestre National du Capitole de Toulouse, qui s'est montré constant et aurait assurément pu réaliser un sans faute si le chef, Pinchas Steinberg, avait été au-delà d'une direction éprouvée.
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Toulouse. Théâtre du Capitole. 14-IV-02. Richard Wagner : Die Meistersinger von Nürnberg. Hans Tschammer, Jorma Silvasti, Guido Jentjens, Gert Henning-Jensen, Ralf Lukas, Miranda van Kralingen, Cornelia Wulkopf, etc. Orchestre National du Capitole de Toulouse. Chœurs du Capitole. Direction musicale : Pinchas Steinberg. Mise en scène : Nicolas Joel. Décors : Jean-Marc Stehlé et Antoine Fontaine. Costumes : Gérard Audier. Lumières : Vinicio Cheli.