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Povero Idomeneo à Garnier

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Paris. Opéra de Paris Garnier. 8-IV-02. Wolfgang Amadeus Mozart : Idomeneo. Marius Brenciu, Susan Graham, Mary Mills, Christine Goerke, Michael Myers, etc. Orchestre et Chœurs de l’Opéra National de Paris. Direction et mise en scène : Ivan Fischer. Décors et costumes : Jean-Marc Sthelé. Lumières : Yves Bernard. Chorégraphie : Yvette Bozsik

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Premier authentique chef-d'œuvre scénique de Mozart, longtemps négligé, Idomeneo n'a guère de chance avec l'Opéra de Paris.

Pour sa troisième production en quinze ans présentée dans autant de salles (Salle Favart en 1987, Opéra Bastille en 1991, Palais Garnier cette année), l'ouvrage n'aura jamais connu pire lecture que celle-ci. L'on a le sentiment, face à cette scénographie et cette mise en scène plates et laissant les chanteurs désemparés, de se retrouver à la pire époque du siècle dernier, dans les années 1950, avec ces productions ringardes qui faillirent mener le théâtre lyrique à sa mort. Pourquoi donc avoir voulu confier la direction musicale et la mise en scène à une seule et même personne, ici Ivan Fischer, qui semble n'avoir jamais assisté à un spectacle d'opéra autre que ceux qui sont diffusés dans l'ex-bloc soviétique. Fischer est pourtant l'un des artistes les plus dynamiques et cultivés à se produire aujourd'hui, et l'on a du mal à identifier devant un si triste résultat que l'on a affaire au créateur de l'Orchestre du Festival de Budapest, qu'il a rapidement mené aux sommets de la hiérarchie des formations symphoniques, et à l'actuel directeur de l'Opéra National de Lyon. L'on sait pourtant combien de chefs ont pu se fourvoyer en cumulant les deux emplois, à commencer par Herbert von Karajan. Mais Fischer n'en a pas tenu compte. Dans l'opéra, clamait-il avant la première, paroles et musique, action et partition sont étroitement imbriquées, tant et si bien qu'elles ne doivent surtout pas se contredire. Et d'ajouter que les metteurs en scène, qui ne connaissent pas assez la musique, évacuent cette idée simple mais essentielle…

Pareille déclaration laisse pour le moins dubitatif… et le résultat sans voix… Si le chef assume bien son rôle, même si l'orchestre se fait plus imprécis que de coutume et le souffle expressif moins intense que ce que les intentions de Mozart laissent entrevoir, le metteur en scène n'a pas su passer de la théorie à la pratique, aucune idée directrice ne s'imposant vraiment. Et la scénographie n'arrange rien, bien au contraire. Son aspect grotesque, qui a consterné une partie du public de la première et amusé l'autre, a fait d'une tragédie grecque, fulgurante et exaltée, une sorte de conte oriental, avec décor de carton-pâte et animaux chimérique qui auraient pu convenir à La Flûte enchantée. Outre ce visuel particulièrement laid, ce qui ne cesse d'étonner de la part de ce scénographe qui a réussi la Flûte enchantée proposée la saison dernière à Garnier et le Barbier de Séville présenté à Bastille une semaine avant cet Idomeneo, les costumes s'avèrent particulièrement grotesques et les ballets, fort opportunément amputés, particulièrement ridicules. Sur le plateau, si les rôles secondaires sont parfaitement distribués, il faut regretter la ligne de chant inégale et le port gauche de en Idomeneo. Mais la part belle revient aux femmes, avec Christine Goerke, qui, malgré des duretés dans l'aigu et un rien de trivialité dans l'expression, campe une Elettra justement hallucinée, , blonde et délicieuse Illia aimante aux aigus limpides, et, last but not least, , qui survole la distribution entière en prêtant sa voix au timbre de velours et son chant d'une pureté absolue au plus émouvant et stylé des Idamante.

Crédit photographique : © Eric Mahoudeau

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