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Tristan mémorable par Olivier Py et Pierre-André Weitz

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Angers. Le Quai. 10-V-2009. Richard Wagner (1813-1883) : Tristan und Isolde, opéra en 3 actes, sur un livret du compositeur. Mise en scène et lumières : Olivier Py. Décors et costumes : Pierre-André Weitz. Avec : Leonid Zakhozhaev, Tristan ; Sabine Hogrefe, Isolde ; Martina Dike, Brangäne ; Alfred Walker, Kurwenal ; Jyrky Korhonen, Marke ; Eric Huchet, Melot ; Christophe Berry, le Marin / le Berger ; Eric Vrain, le Pilote. Chœur d’Angers Nantes Opéra (chef de chœur : Xavier Ribes) & Chœur de l’ONPL (chef de chœur : Valérie Fayet), Orchestre National des Pays de la Loire, direction musicale : John Axelrod.

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En collaboration avec l' et l'Opéra de Dijon, Angers Nantes Opéra nous propose la première hexagonale de la production de Tristan et Isolde conçue par pour le Grand Théâtre de Genève en 2005.

Salué comme une réussite majeure, ce spectacle a connu une captation vidéo qui en restitue partiellement la richesse. Cette production rejette au second plan toutes les propositions récemment faites au public français. Ce spectacle est un véritable miracle d'intelligence et de clarté. Le public de cette première ne s'y est pas trompé : de l'excitation palpable qui précédait le lever du rideau, nous sommes passés aux applaudissements scandés saluant la fin du premier acte puis à ces profondes secondes de silence recueilli suivant la dernière note d'orchestre pour aboutir à de longs et très enthousiastes saluts conclus par une standing-ovation.

Pourtant, c'est d'abord l'oreille qui est déçue par un prélude où le chef étire le tempo et privilégie la transparence, privant la musique de sa sensualité et d'une part de son expressivité. , nommé directeur musical de l' à compter de la saison 2010-2011, nous offre une lecture très professionnelle de la partition, bien en place mais dont l'élan ne se traduit que dans des tutti tonitruants. Il y manque une véritable vision architecturale et une mise en profondeur plus approfondie du commentaire orchestral. Pourtant l'orchestre, irréprochable comme à son habitude, était prêt à suivre le chef dans une aventure moins ordinaire.

Le rideau se lève pour révéler un dispositif inoubliable : la charpente métallique de ce bateau qui progresse sous nos yeux, tout au long de l'acte. Le décor évolue ainsi à vue pour permettre une parfaite compréhension de l'action. Aucun détail n'est gratuit dans cette lecture qui s'appuie sur une direction d'acteurs particulièrement efficace et livre instantanément les clés du chef-d'œuvre wagnérien au spectateur le plus novice. Le deuxième acte révèle autant de virtuosité scénographique avec une succession de pièces éclairant à la perfection le climat psychologique et les sentiments des personnages. et y font preuve d'autant d'intelligence textuelle que de goût, avec un remarquable sens de l'image. Dès lors, le duo d'amour s'enflamme, et la partie orchestrale sort de son quant-à-soi, prenant sa pleine part du drame. Le dernier acte se déroule dans un cadre épuré, et désormais statique. Dans un premier temps, on note une chute de tension liée au charisme limité de l'interprète de Tristan et à une symbolique un peu obscure. La fin de l'acte, en revanche, est magique. Le chant d'adieu d'Isolde possède en effet ici le caractère extatique voulu par le compositeur, par la grâce d'éclairages inspirés, mais aussi par le talent d'une formidable interprète.

En effet, le jour a son héros, , mais aussi son héroïne : Sabine Hogrefe, une soprano allemande en troupe à Brême, et pourtant… L'héroïsme d'Isolde est porté avec une flamme vocale et théâtrale rare, au moyen d'un instrument stable et homogène, d'un grave bravement assumé à un aigu qui se darde sans appréhension dans les points d'orgue, nonobstant une légère fatigue en fin de représentation. L'interprète émeut dans la fougue comme dans l'abandon. Nous succombons définitivement à l'émotion dans une Liebestod détaillée avec autant de finesse que d'énergie : le personnage, illuminé par les projecteurs, s'élève sur une plate-forme avec le corps sans vie de Tristan, vers une sublimation qui la soustrait à notre plan terrestre. Il n'est pas surprenant que les interventions les plus inspirées de la fosse soient simultanées au chant de cette Isolde de tout premier plan.

souffre d'un tel voisinage. Le ténor ne manque pourtant pas de noblesse dans le timbre comme dans la ligne, ni d'intelligence du texte, mais, dans les passages les plus exposés, nous le trouvons à la limite de ses moyens et il est contraint forcer d'une manière aussi désagréable pour nos oreilles que périlleuse pour sa santé vocale. Nous pouvons douter de sa réelle identité de Heldentenor et craindre que ses lourds engagements wagnériens ne lui destinent une carrière à la . apporte à Brangäne une voix ample, au timbre prenant, et l'on oublie quelques défauts de justesse dans l'acte initial, à l'écoute de ses appels magnifiquement lancés. débute dans Kurwenal : une voix sombre avec de fréquents signes d'engorgement et une approche timide d'un personnage que nous souhaiterions plus complexe que compatissant. Enfin, le prometteur , lui-aussi en prise de rôle, use des miroitements d'une basse profonde et superbement timbrée, pour imposer un Marke subtil, entre blessure et humanité, colère et pardon. Tous concourent au succès d'une des plus belles représentations wagnériennes à laquelle nous ayons assisté depuis longtemps.

Crédit photographique : (Sabine Hogrefe : Isolde) – (Sabine Hogrefe : Isolde –  : Tristan –  : Brangäne) © Jeff Rabillon

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