Henry Purcell et ses multiples contextes

Depuis le petit livre cosigné en 1995 par William Christie et par Marielle Khoury, Purcell au cœur du baroque, aucune publication consacrée à l’Orpheus Britannicus n’avait vu le jour en France.

Le précédent ouvrage, très richement illustré conformément aux choix éditoriaux de la collection «Découvertes Gallimard», proposait du compositeur anglais un parcours essentiellement chronologique, axé principalement sur les grandes étapes de sa vie et de sa carrière musicale.

Les choix de Claude Hermann, pour la monographie parue chez Actes Sud, sont davantage guidés par des critères d’ordre contextuel qui mettent en exergue les diverses problématiques liées à l’époque traversée par Purcell. L’auteur nous fait ainsi découvrir un univers extrêmement riche et complexe, marqué par d’innombrables tensions sur les plans politique, sociologique, philosophique et artistique. C’est ainsi en angliciste avertie que Claude Hermann nous révèle un monde particulièrement duel, dans lequel s’affrontent incessamment royalistes et républicains, jacobites et orangistes, catholiques et protestants, partisans de styles musicaux importés de France ou Italie et tenants d’une esthétique davantage «anglaise», héritée de la culture et des traditions élisabéthaines malmenées pendant la période du Commonwealth. C’est donc à l’aune de ce regard sur les différents contextes de la période que l’auteur de ce petit volume explique et analyse la production d’un compositeur relativement peu partisan, éminemment ouvert à toutes ces influences multiples.

Le lecteur non initié découvrira avec fascination un univers relativement peu connu, permettant de mettre en lumière la superbe production du grand compositeur anglais. Le lecteur plus averti appréciera les immenses qualités de synthèse qui auront permis à présenter avec une extrême clarté un climat politique et artistique particulièrement agité, et de remettre en question certaines de ses idées préconçues sur l’œuvre purcélienne.

Peut-être aurait-on souhaité davantage de détails sur l’analyse purement musicologique de certaines œuvres. Peut-être pourra-t-on aussi regretter, ici ou là, une légère erreur factuelle : le masque Alfred de Thomas Arne, par exemple, n’a rien d’un oratorio. Il va sans dire que ces menus défauts n’enlèveront rien au plaisir de la lecture de ce passionnant petit ouvrage qui donnera à plus d’un lecteur envie d’en savoir plus sur la figure du grand Purcell. Mais pour cela, comme l’indique la petite bibliographie signalée en annexe, le passage par la langue anglaise sera inévitable.