Concerts, La Scène, Musique d'ensemble

Les quatre-vingts millésimés : un vrai régal !

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Dijon, Auditorium. 01-X-2008. Jean-Sébastien Bach (1685-1750) : Cantate BWV 78 ; Jean-Philippe Rameau (1683-1764) : Grand Motet in Convertendo ; Georg Philipp Telemann (1681-1767) : Psaume Deus Judicium Tuum ; Georg Friedrich Haendel (1685-1759) : Psaume Dixit Dominus. Yere Suh, soprano  ; Ingrid Perruche, soprano  ; Britta Schwarz, alto ; Markus Schäfer, ténor, Alain Buet, basse, Stephan MacLeod, basse. L’Harmonie universelle (direction artistique : Florian Deuter), Arsys Bourgogne : direction Pierre Cao

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est un habitué de l'auditorium dijonnais et du répertoire baroque qu'il interprète de main de maître à la tête de son ensemble vocal . Souvenons-nous de sa magnifique prestation de la Passion selon Saint Jean en mars dernier avec . Aujourd'hui, il retrouve non seulement Bach, mais également Rameau, Telemann et Haendel – tous nés dans les années 1680 – dans un répertoire religieux : cantate, motet et psaumes constituent en effet le programme de la soirée. Et quelle soirée ! Sous le signe du cosmopolitisme européen…

Bach ouvre donc la marche avec une cantate en allemand : Jesu, der du meine Seele BWV 78. Ecriture harmonique et contrapuntique se côtoient, s'entremêlent à l'instar du majestueux choral terminal «Herr, Ich glaube, hilf mir schwachen» interprété par le chœur Arsys Bourgogne magnifiquement habité, dans tout le concert d'ailleurs. Ainsi, il fait sonner avec élégance les appoggiatures expressives dans le passage lent du «Tunc repletum» du motet In Convertendo de Rameau, tout comme les entrées en imitation tout aussi expressives du «Euntes ibant» de la même pièce. A noter les dialogues entre les cordes et les vents puis à l'intérieur des vents eux-mêmes avant le retour du chœur. L'écriture plus polyphonique ici nécessite une justesse et une précision qui émanent à la fois du chœur et de l'orchestre. Magnifique ! De même, l'élégance du phrasé, d'articulation de la flûte soliste qui dialogue avec le ténor , délicatement sensible est à mentionner, dans «Das Blut so meiner Schuld, durchstreit» par exemple, où l'ensemble est accompagné seulement par une basse continue (orgue, violoncelle et contrebasse). Ajoutons que le ténor est également précis et expressif dans les phrases virtuoses rapides ornementées. Il en est de même des basses, surtout dont le timbre régulier se mêle parfaitement à ceux de ses acolytes. Le vibrato un peu trop prononcé d' peut parfois gêner. Mais sa technique n'est pas à remettre en cause ainsi que son sens de l'expression.

De même, les chanteuses solistes sont à saluer, avec une mention spéciale pour les deux soprani, et . Sublime dans sa robe blanche étincelante, chante aussi facilement qu'elle respire. Du moins c'est l'impression qu'elle donne, que ce soit dans les mélismes du dansant «Wir eilen mit schwachen» (Bach) en duo avec la remarquable alto Britta Schwarz (qui brille dans les longues vocalises haendeliennes) ou dans l'expressif «suspiciant montes» du Deus, judicium tuum de Telemann dans lequel la voix s'élève avec grâce, l'interprète faisant montre d'une sensibilité et d'une subtilité avérées dans les nuances. , radieuse comme un modèle de peintre préraphaélite, offre également des interventions somptueuses qui s'intègrent parfaitement à celles de dans leur duo. L'exemple le plus éloquent qui reste d'ailleurs le clou de la soirée, est sans aucun doute le «De torrente in via bibet» du Dixit Dominus HWV 232 de Haendel : l'introduction, lente, pianissimo et dissonante de l'orchestre interpelle tout de suite l'auditeur. Rétrospectivement et anachroniquement, on pense au début du Quatuor des dissonances de Mozart. Entrent subtilement la première soprano puis la seconde. Les hommes du chœur interviennent ponctuellement avec de courtes phrases parfois recto-tono. Avec le rythme de croches – qui soutient des valeurs longues – on pense à «l'air du froid» de Purcell ou au deuxième mouvement de «l'Hiver» des Quatre Saisons de Vivaldi. Toujours est-il que, jusqu'à la fin, l'auditeur est accroché à la musique, le souffle coupé, la gorge nouée par l'émotion. Un moment de pure magie.

Au final, saluons l'équilibre entre les voix et les instruments, l'homogénéité de son, le sens du phrasé, de l'articulation, la richesse du timbre avec un vibrato peu prononcé… le tout au service du texte, lui-même au service de la spiritualité. Un grand moment de communion pour les fidèles présents dans une salle bien remplie et enthousiaste, avec un resplendissant qu'il nous faut remercier pour son travail et pour le plaisir qu'il sait procurer avec des artistes non moins inspirés.

Crédit photographique : © DR

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