Par le menu, tous les charmes du haute-contre chez Charpentier
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Toulouse. Chapelle Sainte Anne le 23-X-2007. Marc Antoine Charpentier (1643-1704) Ouverture pour l’Eglise H. 524 ; Veni creator H. 54 ; O Bone Jesu H. 237 ; Sonate H. 548 ; In circumcisione Domini H. 406 ; Prélude H. 23a ; Salve Regina H. 23 ; Beata est Maria H. 25 ; Sonate H. 548 ; Litanies de la Vierge H. 84 ; Magnificat H. 73. Vincent Lièvre-Picard (haute-contre) ; Sebastien Obrecht (taille) ; Jean-Manuel Candenot (basse) ; Flavio Losco, Nirina Bougés, violons ; Stéphanie Cettolo (flûte à bec) ; Etienne Mangot, (basse de violon) ; Ronaldo Correia de Lima Lopes, (théorbe) ; Yasuko Bouvard, orgue ; Jean-Marc Andrieu : flûte à bec et direction.
Les Passions de Montauban
Un programme entièrement consacré à Charpentier avec trois voix d'hommes et contenant nombre d'œuvres rares est un plaisir délicat et subtil. Ces œuvres intimistes et peu brillantes ont prouvé si besoin était la diversité du génie de Charpentier. L'art musical du grand siècle est fait de couleurs particulières, d'ambiances feutrées, de piétisme retenu, d'un grand art des tonalités et de choix de tessitures vocales bien particulières. Avec trois voix d'homme, deux ténors et un baryton, une certaine monotonie était à craindre car la diversité vient entièrement de l'interprétation. Ce concert est une réussite totale car instrumentistes et chanteurs ont mis toute leur musicalité et tout leur talent à défendre ce projet artistique ambitieux. La musicologie a été mise en lumière avec une sérieuse mise au point sur des termes galvaudés et inexactement utilisés même dans les medias spécialisés. En effet haute-contre, contre-ténor, taille et ténor ne sont pas des termes équivalents et pourtant….
Vincent Lièvre-Picard est ténor, ce soir présenté comme haute-contre, Sébastien Obrecht est lui aussi ténor et présenté ce soir comme taille, tandis que Jean-Manuel Candenot est une basse. Nous avons donc une démonstration éloquente que la tessiture est une chose et la manière d'utiliser sa voix une autre chose. Enfin qu'en France à cette époque, la dénomination était très précise.
Le charme de la voix de ténor léger dénommé haute-contre est troublant. Cette voix souple et agile, de volume modeste se place dans les résonateurs de poitrine jusqu'au haut de la tessiture. La voix de Vincent Lièvre-Picard est très belle, homogène sur toute la tessiture. Aucune dureté aucun besoin de force, elle semble planer toujours sans efforts. Les nuances sont exquises et la musicalité du chanteur est sidérante. Par contre sa technique est si précise que dans certaines pièces comme le magnifique Salve Regina ou les Litanies de la Vierge il utilise sa voix de tête et chante comme un contre-ténor, en voix d'alto. C'est donc un choix technique. Un ténor comme lui, un haute-contre, peut chanter également comme un alto. A côté, la voix de ténor de Sébastien Obrecht, baptisé taille, semble particulièrement timbrée et forte. Le métal noble du timbre est particulièrement riche. La virtuosité est confondante, les nuances et la musicalité sont une merveille. Jean-Manuel Candenot a lui une belle voix de baryton basse qui offre des résonances très intéressantes complémentaires de celles des deux ténors. Un travail musical très finement mené avec de belles nuances a permis de mettre en valeur la subtilité harmonique des compositions de Charpentier, beaucoup d'émotion naissant des frottements harmoniques entre les voix. La pièce la plus sensuelle a été le Salve Régina tandis que l'ampleur des Litanies a fait beaucoup d'impression mais la palme de l'originalité revient au Magnificat sur une magnifique basse obstinée avec des effets de tremblements digne de l'air du froid de Purcell.
L'orchestre, avec deux, violons et deux flûtes a apporté une grande variété dans les couleurs. Le soutien sans faille de la riche basse continue a été très précieux.
Notons que changeant d'instrument et utilisant une basse de violon, Etienne Mangot a été très sage et beaucoup moins extraverti que dans d'autre répertoire. Certainement sa façon de respecter la mesure du bon goût français du grand siècle.
Le bis, Odie salus, a permis la résurrection d'une très belle œuvre jamais jouée.
En somme un très beau programme, particulièrement ambitieux avec une deuxième partie en forme d'apothéose. Une fois de plus le plaisir de faire de la musique ensemble a triomphé grâce à la magnifique équipe des Passions de Montauban réunie par Jean-Marc Andrieu. Charpentier a charmé les Toulousains venus très nombreux pour ce concert d'ouverture de la saison, avec un nombre d'abonnés record.
Crédit photographique : DR
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Toulouse. Chapelle Sainte Anne le 23-X-2007. Marc Antoine Charpentier (1643-1704) Ouverture pour l’Eglise H. 524 ; Veni creator H. 54 ; O Bone Jesu H. 237 ; Sonate H. 548 ; In circumcisione Domini H. 406 ; Prélude H. 23a ; Salve Regina H. 23 ; Beata est Maria H. 25 ; Sonate H. 548 ; Litanies de la Vierge H. 84 ; Magnificat H. 73. Vincent Lièvre-Picard (haute-contre) ; Sebastien Obrecht (taille) ; Jean-Manuel Candenot (basse) ; Flavio Losco, Nirina Bougés, violons ; Stéphanie Cettolo (flûte à bec) ; Etienne Mangot, (basse de violon) ; Ronaldo Correia de Lima Lopes, (théorbe) ; Yasuko Bouvard, orgue ; Jean-Marc Andrieu : flûte à bec et direction.