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Dijon. Auditorium. 11-X-2011. Georg Friedrich Haendel (1695-1759) Agrippina, drame musical en trois actes sur un livret de Vincenzo Grimani (vers 1650-1710) créé à Venise. Mise en scène : Jean-Yves Ruf. Scénographie : Laure Pichat. Assistante à la mise en scène : Anaïs de Courson. Avec : Alexandra Coku, Agrippina ; Renata Pokupic, Nerone ; Sonya Yoncheva, Poppea ; Tim Mead, Ottone ; Alastair Miles, Claudio ; Riccardo Novaro, Pallante ; Pascal Bertin, Narciso. Orchestre Le Concert d’Astrée, direction musicale : Emmanuelle Haïm.
Comment ne pas être saisi d'emblée par la modernité et par la multiplicité des thèmes abordés dans l'opéra Agrippina ?
Le livret de Vincenzo Grimani brasse allègrement les problèmes liés au domaine politique tels que la corruption, le populisme, le mensonge lié à l'ambition, avec le sentiment maternel possessif, avec la concupiscence et aussi avec l'expression de l'amour « traditionnel ». Ce mixage s'opère dans le cynisme le plus réjouissant et les quatre heures que dure celui-ci se déroulent sans qu'on n'y prenne garde : on y sent bouillonner la vie dans toute sa complexité.
C'est probablement à Emmanuelle Haïm que l'on doit de ressentir cet élan vital si foisonnant. Sa direction, tour à tour nerveuse ou au contraire alanguie, met très bien en relief les caractères contrastés des protagonistes : elle suit au plus près les inflexions vocales, allant même jusqu'à dessiner les volutes de la ligne mélodique quand c'est nécessaire, car elle vit et s'implique totalement dans son travail ! Celui-ci est absolument remarquable dans le domaine de l'instrumentation : en effet, jamais l'orchestre ne pèse, mais toujours on se dit que le timbre choisi est le bon pour rendre le sens des paroles et même le renforcer.
On sait depuis longtemps que la mode est aux mises en scène « épurées » ; mais, tout en reconnaissant que dans les périodes de crise on se doit d'être sobre, on ne peut que regretter que celle-là ne soit pas plus baroque… Que les costumes se contentent d'une modernité banale, soit. Mais que le décor ultra classique en rajoute sur cette impression de platitude, c'est un peu dommage. Pourtant, le metteur en scène sait apporter des notes d'humour : bravo au chien de garde d'Agrippine, bravo pour la séquence des fleurs dont la couleur réchauffe la scène, bravo pour le porteur de valise dont la présence évoque des souvenirs chez le spectateur actuel !La distribution est réussie et les timbres si différents des protagonistes choisis avec justesse s'accordent avec bonheur. Par exemple, Narciso et Pallante, pourtant radicalement différents dans leur caractère, forment un duo comique homogène comme les deux Dupondt ! L'empereur Claudio est parfaitement ridicule dans son rôle de barbon amoureux et la scène 21 de l'acte 1 est un pur régal. Renata Pokupic est une des révélations de cette distribution : sa voix claire et puissante devrait faire merveille dans d'autres distributions. On peut faire la même remarque pour celle de Sonya Yoncheva : son rôle, plus important, est soutenu sans faiblesse, et on se réjouit de la retrouver à la fin de la saison dans l'opéra de Monteverdi. Celui d'Agrippina est écrasant ; les multiples facettes de la personnalité de cette mégère sont redoutablement difficiles à interpréter d'une façon crédible, mais Alexandra Coku, remplit la scène par sa prestance et par sa conviction ; malgré quelques aigus un peu métalliques et « claqués », sa performance remporte l'adhésion. Tim Mead, peu convaincant dans le premier acte, se révèle d'une façon inattendue par la suite : son aria « Voi che udite il mio lamento » est une pure merveille ; il est vrai aussi que l'écriture qui dans ce cas est traditionnellement toute en dissonances est mise en valeur par l'orchestre qui y ajoute une bonne dose d'émotion…
Crédit photographique : © Gilles Abegg
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Dijon. Auditorium. 11-X-2011. Georg Friedrich Haendel (1695-1759) Agrippina, drame musical en trois actes sur un livret de Vincenzo Grimani (vers 1650-1710) créé à Venise. Mise en scène : Jean-Yves Ruf. Scénographie : Laure Pichat. Assistante à la mise en scène : Anaïs de Courson. Avec : Alexandra Coku, Agrippina ; Renata Pokupic, Nerone ; Sonya Yoncheva, Poppea ; Tim Mead, Ottone ; Alastair Miles, Claudio ; Riccardo Novaro, Pallante ; Pascal Bertin, Narciso. Orchestre Le Concert d’Astrée, direction musicale : Emmanuelle Haïm.