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Beau programme recherchant style désespérément

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Paris. Théâtre des Champs-Élysées. 17-IV-2007. Arvo Pärt (né en 1935) : Fratres. Dédié, selon le vœu du compositeur, à la mémoire de la journaliste russe Anna Politovskaïa, assassinée le 7 octobre 2006 à Moscou. Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Concerto pour piano et trompette n°1 en ut mineur op. 35. Franz Schubert (1797-1828) : La Jeune Fille et la Mort, transcription pour orchestre par Gustav Mahler du Quatuor n°14 en ré mineur D810. Lise de la Salle, piano. Gabor Boldoczki, trompette. Ensemble Orchestral de Paris, direction : Dmitry Sitkovetsky.

Trois œuvres aux effectifs variables. Trois moments d'un intérêt changeant. L' recevait le violoniste et chef d'orchestre Dimitri Sitkovetsky dans un programme passionnant sur le papier, mais stylistiquement très inégal à l'arrivée. Pour commencer, Fratres d' dans une version pour violon solo, cordes et percussions. Dmitri Sitkovetsky dirigeait l'ensemble en jouant la partie de violon solo : son dépouillement tenait, fin et sobre, une tension tragique que risquait d'alourdir un esprit de recueillement, après qu'il ait rappelé que Fratres était donné en hommage à Anna Politovskaïa (journaliste assassinée le 7 octobre 2006 à Moscou). Mais justement, Dmitri Sitkovetsky et l'orchestre ont observé une belle abstention devant toute tentation pathétique, jouant de retenue jusque dans le phrasé soliste, si doucement plus résolu que le continuo.

S'il n'est pas directement une transcription, le Concerto pour piano et trompette n°1 de Chostakovitch pourrait passer pour une suite concertante à son opus 34, les 24 Préludes pour piano. Mais là où le public pouvait attendre une fantaisie débordante, s'est livrée à la partition de Chostakovitch comme à un exercice : hiérarchisant ses plans, préférant l'éclat de ses capacités à la polysémie des caractères enchevêtrés et donnant à sa délicatesse une préciosité inappropriée dans l'Andante. A la trompette, Gabor Boldoczki est resté (au moins sur les deux premiers mouvements) au premier degré. Ses timbrages scolaires et ses quelques attaques mal contrôlées l'empêchent d'accéder au ludisme et à l'ironie dévastatrice de l'œuvre. Aussi, le Nocturne de Chopin donné par en bis, reposait sur une vélocité plus abrupte que le texte, même si on pouvait se réjouir, comme par éclairs, de quelques précisions de nuances ponctuellement stupéfiantes.

En deuxième partie, Schubert était abordé avec un volontarisme parfois bedonnant, au point de normaliser chaque moment dans une égalité d'intention suspecte : un déballage sans axe, que seule la surexposition mahlerienne des contrebasses parvient à temporiser un moment. Dmitri Sitkovetsky sollicitant ouvertement des rondeurs, la précision des phrasés ne tenait pas assez la cohésion des pupitres. Aussi, dans l'Andante, le tutti des violoncelles était stylistiquement monotone, la direction soulignant l'épaisseur des traits là où on aurait pu attendre, au mieux, une plasticité plus juteuse. Même aux premiers rangs, il fallait aux auditeurs être vraiment très en forme pour chercher de l'intérêt dans une partition enfilée de la sorte. Ainsi, Dimitri Sitkovetsky n'a pas hésité à emmener l' dans des ambiances ouvertement viennoises, au sens le plus « Nouvel An » qui soit, au bord de la faute de goût. Historique, un crescendo dramatique, mais plus série B qu'il n'est permis, quoique paradoxalement convaincant. A force de les appuyer, il doit y avoir quelques intentions capables d'une certaine distance spontanée. A exalter la générosité de l'Ensemble,  ne semblait en rien se soucier de la profondeur de ses caractères, à confondre quiconque aurait relu La Jeune fille et la Mort, le poème de Mathias Claudius qui avait donné à Schubert la trame du lied initial.

Crédit photographie : © Stéphane Gallois

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Paris. Théâtre des Champs-Élysées. 17-IV-2007. Arvo Pärt (né en 1935) : Fratres. Dédié, selon le vœu du compositeur, à la mémoire de la journaliste russe Anna Politovskaïa, assassinée le 7 octobre 2006 à Moscou. Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Concerto pour piano et trompette n°1 en ut mineur op. 35. Franz Schubert (1797-1828) : La Jeune Fille et la Mort, transcription pour orchestre par Gustav Mahler du Quatuor n°14 en ré mineur D810. Lise de la Salle, piano. Gabor Boldoczki, trompette. Ensemble Orchestral de Paris, direction : Dmitry Sitkovetsky.

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