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Strasbourg. Opéra du Rhin. 6-XII-2024. Ballet de l’Opéra national du Rhin : Casse-Noisette. Chorégraphie : Rubén Julliard. Musique : Piotr Ilitch Tchaïkovski. Dramaturgie : Rubén Julliard et Éline Malègue. Scénographie : Marjolaine Mansot. Costumes : Thibaut Welchlin. Lumières : Marco Hollinger. Mise en répétition : Claude Agrafeil, Adrien Boissonnet. Assistant aux répétitions : Vincent Chaillet. Maîtrise de l’Opéra national du Rhin (chef de la maîtrise : Luciano Bibiloni). Orchestre philharmonique de Strasbourg, direction musicale : Sora Elisabeth Lee.
Avec (distribution du 6-XII-2024) : Clara : Di He ; M. Drosselmeyer : Pierre-Émile Lemieux-Venne ; Mme Drosselmeyer : Susie Buisson ; Casse-Noisette : Cauê Frias ; Princesse Pirlipat : Julia Weiss ; Roi des rats : Marc Comellas
Rubén Julliard, danseur du Ballet de l'Opéra national du Rhin depuis 2019, livre une nouvelle version de Casse-Noisette pour les fêtes à Strasbourg et Mulhouse. Dans un décor modernisé, la chorégraphie enlevée ne ménage pas ses effets, en mélangeant contemporain et classique.
Contrairement à la version de Noureev (qui fait encore autorité à l'Opéra de Paris), ce ne sont pas les enfants qui mènent la danse dans ce nouveau Casse-Noisette, mais les adultes, à commencer par M. et Mme Drosselmeyer et leurs invités au réveillon de Noël. Le couple d'artisans, fabricants de jouets, reçoit dans son atelier-salon déglingué, pour un dîner de fête sur une table en pin. Pour incarner ce couple un peu fantasque, Pierre-Émile Lemieux-Venne et Susie Buisson, deux danseurs virtuoses à la manière de Mats Ek, long corps plié en avant, mus par des mouvements de hanche. Ils sont les véritables piliers de la pièce créée et mise en scène par Rubén Julliard pour le Ballet de l'Opéra national du Rhin. Autour d'eux, les invités, que l'on voit se presser côté rue avec des gestes saccadés, livrent une partition fluide et festive une fois à l'intérieur de la maison.
Clara, la petite fille, dansée par la menue Di He en ce soir de première, s'est introduite à la fête malgré l'interdiction de ses parents, et farfouille un peu partout parmi les jouets disposés en vrac dans l'atelier, d'où déborde un méli-mélo d'outils et d'accessoires. On découvre bientôt que, jetés dans l'armoire magique de Mme Drosselmeyer, ces jouets s'animent et deviennent un duo d'Arlequin et Colombine, une poupée alsacienne, une Princesse Pirlipat et un petit soldat, et surtout le Casse-Noisette, sous les traits de Cauê Frias. Chacun dispose de sa mini-variation, sur pointes pour certaines danseuses.
Si la chorégraphie est enlevée et suit sans temps mort les péripéties de la partition de Tchaïkovski, interprétée par l'Orchestre philharmonique de Strasbourg sous la direction de Sora Elisabeth Lee, le décor et les lumières un peu trop modestes du premier acte, propositions d'une toute jeune équipe artistique, ne transmettent pas autant qu'on pourrait l'espérer la magie de Noël. Alors que le fauteuil de Clara trône dans les versions traditionnelles du ballet à l'avant-scène, le canapé qui accueille la petite fille endormie est ici placé bien loin, tout au fond de la scène, à côté d'un sapin un peu dégarni. On regrette aussi parfois qu'il soit difficile d'apprécier la danse, faute de lumière suffisante pour l'éclairer. Quelques défauts qui peuvent rapidement et facilement se réparer, puisque l'on est ici dans un atelier…
Paradoxalement, ce n'est que lorsque le décor se dégage et s'aère un peu, déployant des pendrillons blanc cassé, que l'on voit davantage la danse, à la lampe de poche dégainée par Mme Drosselmeyer qui a entendu des rats. La bataille s'engage dans la pénombre entre le roi des rats et sa troupe et un Casse-Noisette, miraculeusement jeté par Clara dans l'armoire magique, soutenu vaillamment par une petite armée de poupées. Parfaitement réglée, cette bataille s'articule autour d'une chorégraphie efficace et inventive. Les rats sont défaits, mais les dégâts sont importants et M. et Mme Drosselmeyer emmènent Clara, après un très joli trio, de l'autre côté de l'armoire magique, vers le Pays de la neige. On y danse au milieu des flocons, en tutus longs et cheveux simplement retenus d'un ruban, avec les voix angéliques de la Maîtrise de l'Opéra national du Rhin.
Après l'entracte, on retrouve de la verticalité et une opulence très bienvenue dans le riche décor doré du deuxième acte. Mr et Mme Drosselmeyer, ainsi que Clara, en tenue de fête, peuvent ainsi accueillir les personnages qui franchissent tout à tour la porte magique du Royaume des jouets : une Espagnole déchaînée, que l'on dirait juchée sur des échasses, mais dont la longue robe à pois cache en réalité un danseur ; un slinky géant, ce ressort spectaculaire qui fait rire les enfants ; un couple de clowns rêveurs aux jolis ballons ; deux poupées mécaniques qui se poussent du coude ou une sarabande de serpents aux accents orientaux. Cette galerie de personnages remplace les danses espagnoles, chinoise ou arabe de la version traditionnelle, en offrant de la fantaisie visuelle et de l'humour, tout en s'insérant harmonieusement dans la dramaturgie. Une très astucieuse façon de dépoussiérer un ballet qui est un classique des fêtes de fin d'année !
Sur l'espace dégagé et bien éclairé du deuxième acte, on savoure l'alternance malicieuse du contemporain et du classique voulue par le chorégraphe Rubén Julliard, le rythme enlevé et l'engagement des danseurs, tous formidables. La réussite de ce deuxième acte prouve à quel point il suffira de quelques légers réglages pour rendre le premier acte tout aussi magique.
Crédits photographiques : © Agathe Poupeney / Opéra national du Rhin
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Strasbourg. Opéra du Rhin. 6-XII-2024. Ballet de l’Opéra national du Rhin : Casse-Noisette. Chorégraphie : Rubén Julliard. Musique : Piotr Ilitch Tchaïkovski. Dramaturgie : Rubén Julliard et Éline Malègue. Scénographie : Marjolaine Mansot. Costumes : Thibaut Welchlin. Lumières : Marco Hollinger. Mise en répétition : Claude Agrafeil, Adrien Boissonnet. Assistant aux répétitions : Vincent Chaillet. Maîtrise de l’Opéra national du Rhin (chef de la maîtrise : Luciano Bibiloni). Orchestre philharmonique de Strasbourg, direction musicale : Sora Elisabeth Lee.
Avec (distribution du 6-XII-2024) : Clara : Di He ; M. Drosselmeyer : Pierre-Émile Lemieux-Venne ; Mme Drosselmeyer : Susie Buisson ; Casse-Noisette : Cauê Frias ; Princesse Pirlipat : Julia Weiss ; Roi des rats : Marc Comellas