Quatre organistes de renom jouent en concert l’orgue de Notre-Dame de Paris

Au moment même de la réouverture de la cathédrale Notre-Dame de Paris, parait un CD dans la riche collection Solstice consacré à des extraits de concerts d'orgue par quatre artistes français au cours des années 1970. C'est ici l'occasion de réentendre l'état flamboyant de l'orgue de Notre-Dame durant cette décennie où Robert Boisseau venait de réaliser une restauration suivant les vœux de Pierre Cochereau.

François Carbou, qui dirige avec son épouse Yvette le label Fy et Solstice depuis le début des années 70, nous confie dans le livret du présent CD qu'il a capté à Notre-Dame pendant 15 ans près de 750 récitals donnés par divers organistes du monde entier. De nombreux extraits de ces concerts d'exception sont disponibles au catalogue Solstice et le présent album vient enrichir encore la mémoire auditive de cette prestigieuse tribune.

Quatre artistes français sont ici réunis. Le premier est Michel Chapuis qui fut un grand habitué de Notre-Dame puisque il y fut organiste de chœur de 1954 à 1963, ainsi que du grand-orgue où il se produisit souvent en concert dont ici en 1977. Lors de ce récital, il jouait entre autres deux grands maitres : Nicolas de Grigny et Johann Sebastian Bach. Sous ses doigts l'orgue de Notre-Dame trouve des sonorités inattendues autant dans la musique française qu'allemande. La Passacaille sonne presque comme sur un orgue néo-classique allemand et Grigny n'est pas si loin d'un orgue français de l'Ancien régime. Avec André Isoir, le répertoire proposé rend hommage à Louis Vierne qui fut titulaire à cette tribune durant 37 ans. L'Allegro de sa Symphonie n° 2 est proposé de manière très tonique avec un toucher tout en relief, marque significative de l'art de cet interprète. Charles Tournemire, contemporain de Vierne sonne en gloire ici avec sa Paraphrase-Carillon de l'office de l'Assomption.

La deuxième partie du programme nous invite à écouter Odile Pierre dans la Suite op.5 de Maurice Duruflé. Cette grande organiste prend cette œuvre à bras le corps dès les premières notes du Prélude. Une lente et profonde vague remplit l'espace et s'en retourne au loin. Après la Sicilienne, la redoutable Toccata éclate de mille feux toutes chamades dehors. Le dernier organiste, Xavier Darasse, connu comme compositeur se plait à jouer Olivier Messiaen dont il fut l'élève. Transports de Joie claquent dans une acoustique mate sans doute liée au public nombreux venu écouter l'audition du dimanche. Volumina de György Ligeti explore lui des mondes lointains à la recherche de climats de timbres et autres fantasmagories. L'orgue de Notre-Dame semble le vecteur idéal pour cette immense fresque sonore hallucinante.

L'époque des années 70 marque une période où l'orgue selon Pierre Cochereau son titulaire d'alors était à son apogée. Le grand talent de Robert Boisseau facteur d'orgue avait fait de cet orgue un instrument nouveau bien ancré dans un cœur sonore édifié avant lui par Aristide Cavaillé-Coll. Ces archives précieuses sont la mémoire vivante de cet orgue et sont ainsi sauvegardées pour les générations futures. Chaque restauration apporte sa pierre et la toute dernière que découvriront ces jours-ci les auditeurs devrait encore offrir un orgue nouveau dans une acoustique élargie, grâce aux travaux de nettoyage de l'intérieur de la cathédrale. Une nouvelle vie commence aujourd'hui en 2024 pour l'orgue de Notre-Dame, l'un des plus célèbres du monde.

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