Duos mères filles d’Eszter Salamon à La Ménagerie de Verre

Prolongeant son projet autour du duo M/OTHERS, créé avec sa mère en 2019, Eszter Salamon met en scène trois relations mère-fille dans MOTHERS & DAUGHTERS à La Ménagerie de Verre, dans le cadre du Festival d'Automne.

Trois espaces de La Ménagerie de Verre aménagés de la même manière : trois carrés de chaises et de coussins sur le sol, trois plateaux recouverts de moquette claire autour desquels peuvent prendre place les spectateurs, partagés en trois groupes de quarante, qui se déplacent d'un espace à l'autre pour assister successivement aux trois duos proposés par la chorégraphe.

Le principe de chaque duo est identique. Assises ou étendues sur la moquette, une mère et une fille, imbriquées, emboîtées, dont les corps se soutiennent l'un l'autre. Le contact se fait par les pieds nus, le torse, les bras, le dos ou le corps tout entier. Dans le silence, mère et fille s'abandonnent à une symbiose physique totale, en fonction des capacités corporelles de chacune. Lenteur, toucher et filiation sont au cœur des enjeux de ces duos intenses, qui parlent aussi d'intergénérationnel et de vieillissement des corps.

La chorégraphe hongroise Eszter Salamon poursuit sa série des Monuments avec une extension de sa pièce M/OTHERS créée en 2019, explorant son lien avec sa mère et la construction intime des corps. Avec MOTHERS & DAUGHTERS, elle prolonge un travail commencé avec sa mère pour le partager avec deux autres mères et filles norvégiennes, pays où elle a effectué sa thèse artistique et où elle développe des projets depuis 2014.

Le plus émouvant de ces duos est sans aucun doute celui entre Eszter et sa mère, aujourd'hui très âgée, tant l'intensité de leur regard et la matérialité de leur présence l'une à l'autre sont évidentes. Dans l'accolade, forme de pietà inversée, la mère, plus fragile, devient l'enfant, tandis que l'enfant est la mère. Jusqu'au bout des doigts, une grande délicatesse mène leurs gestes et soutient leurs regards. Dans le troisième duo entre deux femmes noires, dont l'une est voilée, le rapport devient presque égalitaire et l'engagement physique équivalent. Il n'y a pas ce contact direct entre les pieds nus, comme dans les deux autres duos, mais un poids dense et partagé des corps. Dans ce duo, l'âge ne compte pas. Mère et fille partagent les mêmes mains, le même souffle, la même couleur de peau.

Crédits photographiques : © Alain Roux