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Didon et Énée à Versailles : une Didon sous les eaux

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Versailles. Opéra Royal. 20-X-2024. Henry Purcell (1659-1695) : Didon et Énée, opéra en trois actes sur un livret de Nahum Tate. Mise en scène, costumes, scénographie, chorégraphie et lumières : Cécile Roussat, Julien Lubek. Avec : Sonya Yoncheva, Didon ; Halidou Nombre, Énée ; Sarah Charles, Belinda ; Attila Varag Tóth, la sorcière et un marin ; Pauline Gaillard, Yara Kasti, Sorcières ; Arnaud Gluck, un esprit ; Lili Aymonino, deuxième femme. Chœur de l’Opéra Royal, Orchestre de l’Opéra Royal, direction musicale : Stefan Plewniak

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La saison d'opéras mis en scène de l'Opéra Royal de Versailles débute avec une série de cinq représentations de Didon et Énée de Purcell en trois jours avec une altière.

L'ensemble du spectacle est conçu par et , tous deux issus du monde circassien et ayant déjà l'expérience de l'opéra, notamment baroque avec le Poème Harmonique et l'univers mozartien. L'action se situe dans le milieu marin, avec des rochers immergés, un plateau assombri et des lumières accompagnant des draps tendus de part et d'autre de la scène figurant le mouvement des vagues. Didon est vêtue d'un collant surmonté d'une robe volumineuse qui dans le tableau final se dénouera de façon impressionnante pour former la vague dans laquelle elle sera engloutie. Le Sorcière est une pieuvre qui n'est pas sans rappeler la plante vorace de La Petite boutique des horreurs, avec des tentacules rosées léchant le sol et affublée d'une tête hydrocéphale (voire même presque issue de la série de films Alien !). Ces moments magiques et inspirant un certain effroi contrastent avec de nombreux instants de poésie comme l'intervention des artistes funambules, trapézistes et acrobates. Voltigeant dans les airs, s'assouplissant autour des cordes suspendues ou bien évoluant sur le linoléum, les prouesses techniques s'accompagnent d'un intérêt visuel qui permet d'illustrer les nombreuses pages orchestrales sans laisser l'action se flétrir.

Le cadre idyllique de l'Opéra Royal convient parfaitement à la facture baroque de l'œuvre, mais avec des teintes à dominante sombre, le rendu visuel n'est pas toujours des plus heureux. Ainsi, plongée dans une demi-pénombre, l'histoire de la rencontre entre Didon et Enée propose une vision pessimiste, là où une certaine lumière aurait permis une respiration pour équilibrer l'ensemble.

La star attendue du spectacle est . On connaît l'affinité de la cantatrice pour le répertoire baroque qu'elle a longtemps fréquenté avant de s'attaquer à des répertoires plus lourds vocalement. Cela se ressent sur le timbre qui possède de belles moirures dans certaines zones de son étendue, mais se matifie dans certaines nuances de piani qui ne sonnent pas toujours de façon harmonieuse]. Peut être que le fait d'avoir cinq représentations en à peine quarante huit heures laisse l'instrument vocal fatigué, mais l'on ne peut en tout cas retirer la présence scénique impressionnante de l'artiste, royale dans son maintien et parfois même trop altière pour laisser la place à son ravissement dans l'amour. On voit la femme qui a créé une cité, qui dirige et ordonne, mais assez mal celle dont les failles la feront succomber par passion jusqu'au suicide. Son Énée est , à la voix puissante et entraînante. L'engagement scénique du baryton est convaincant, mais quelques erreurs d'intonation notamment dans le registre aigu entrave une cohérence attendue avec Didon. La Belinda de est sublime dans la hauteur d'émission et la luminosité de l'élocution. On entend là ce que le répertoire baroque appelle en terme de pureté et de franchise vocales. et sont des sorcières belliqueuses à souhait et fort bien assorties.

La direction de est efficace, mais sans approfondissements particuliers. L'orchestre subit plus qu'il n'est à l'origine de l'avancée dramatique, de façon très neutre manquant de la folie et de l'emportement que la partition de Purcell exige. En revanche, il faut féliciter le travail du chœur de l'Opéra Royal qui remporte tous les suffrages : la limpidité du texte (qui n'est pourtant guère évidente) et la cohésion du groupe font de l'ensemble vocal un personnage à part entière de cet opéra.

Crédits photographiques : © Franck Putigny, Edouard Brane

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Versailles. Opéra Royal. 20-X-2024. Henry Purcell (1659-1695) : Didon et Énée, opéra en trois actes sur un livret de Nahum Tate. Mise en scène, costumes, scénographie, chorégraphie et lumières : Cécile Roussat, Julien Lubek. Avec : Sonya Yoncheva, Didon ; Halidou Nombre, Énée ; Sarah Charles, Belinda ; Attila Varag Tóth, la sorcière et un marin ; Pauline Gaillard, Yara Kasti, Sorcières ; Arnaud Gluck, un esprit ; Lili Aymonino, deuxième femme. Chœur de l’Opéra Royal, Orchestre de l’Opéra Royal, direction musicale : Stefan Plewniak

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