Sergio Bernal met le feu à la dernière soirée du festival Cadences d’Arcachon

Pour son week-end final, le très éclectique festival Cadences d'Arcachon n'a pas dérogé à la règle, en proposant chorégraphes émergents et valeurs sûres, de Bianca Li à Sergio Bernal, en passant par Tânia Carvalho.

Créé en 2002, le festival de danse d'Arcachon s'est étendu depuis quelques années à quelques communes voisines, jusqu'à toucher quatorze villes entre Arcachon et Bordeaux pour cette 22^e édition. Ainsi, c'est au Bouscat d'abord, puis le lendemain à l'espace culturel Lucien Mounaix de Biganos, que Blanca Li a montré Le Sacre, une version réduite à six danseurs, de sa création 2024 : Le Sacre du printemps. Mêlant les genres comme à son habitude, Bianca Li fait démarrer ses danseurs sur des chaises alignées sur la scène, en partie dissimulés par des sweat à capuches. L'ensemble est parfait puis petit à petit, les individualités se dessinent, la frénésie s'empare du groupe, à l'instar de la musique mythique d'Igor Stravinsky. Le souffle des danseurs se fait plus présent, plus fort, les mouvements plus acrobatiques. La chorégraphie, nerveuse, s'emballe puis ralentit dans des changements de rythmes fréquents, les corps se transforment en caisse de résonance. Blanca Li, qui vient de prendre la présidence de La Villette à Paris, est sur tous les fronts. Elle y présentera en octobre sa version de Didon et Énée, l'opéra baroque de Purcell, dont elle a également offert la primeur au public d'Arcachon.

Samedi soir, devant la salle comble du Théâtre de l'Olympia, la chorégraphe portugaise Tânia Carvalho présentait, pour la première fois en France Mysterious Heart, interprété par l'excellent ensemble de danse contemporaine du Staatstheater de Mayence, tanzmainz, avant son passage au Théâtre de la Ville à Paris. Sur une bande son souvent dissonante signée Diogo Alvim, et dans un air saturé de fumigènes, les dix danseurs se prêtent à la vision fantasmagorique et souvent difficile à suivre de la chorégraphe portugaise. Malgré la grande technicité des danseurs, la pièce a du mal à convaincre : ligne narrative confuse et répétitive, chorégraphie peu originale, les grimaces des danseurs se répètent, la bande son se fait de plus en plus sombre et l'ensemble finit par lasser le public arcachonnais, pourtant aguerri à la danse contemporaine.

La dernière soirée du festival était consacrée au danseur et chorégraphe espagnol renommé, Sergio Bernal et à son spectacle Ser, montré pour la première fois en France. Seul danseur en scène, vêtu d'une chemise noire à paillettes, Sergio Bernal démarre par un morceau de flamenco stupéfiant, accompagné de quatre percussionnistes. La salle exulte, le ton est donné mais à chaque fois Sergio Bernal surprend. Rejoint par un pianiste-chanteur, des cuivres, d'autres danseurs, il mélange les genres avec une grande fluidité. La danse flamenca évolue ou se transforme en ballet classique ou en danse contemporaine lorsque l'artiste troque les chaussures pour les chaussons, fait évoluer une arabesque ou une pirouette, casse brusquement les poignets portés en couronne pour frapper des mains… L'ex-danseur étoile du Ballet national d'Espagne, qui a créé sa compagnie en 2019, n'en est qu'à sa deuxième production mais il impressionne. Omniprésent dans Ser, il sait tout faire. À l'aise dans tous les registres, il est acclamé par une standing ovation de 10 minutes par le public d'Arcachon, conquis, debout pour un rappel mémorable sur Alors on danse, de Stromae.

Au-delà des grands noms, le festival Cadences s'attache aussi à faire découvrir de nouveaux talents et des artistes locaux. Parmi ceux que nous avons pu voir, mention spéciale à la compagnie Crysael, lauréate du concours Sobanova en 2024 pour Juste un moment, chorégraphié et interprété par Christophe West et Gaël Grzeskowiak qui miment et dansent à merveille toutes les interactions possibles entre deux êtres : de l'abandon total à l'affrontement. Le duo exploite le comique de situation, mime et danse chaque situation de manière inattendue et virtuose.

Crédits photographiques : Sergio Bernal : © Olivier Saint Laurans ; Tanzmainz : © Andreas Eitter