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L’école Cranko de Stuttgart, l’avenir éclatant du ballet

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Stuttgart. Opernhaus. 21-VII-2024. Matinée de l’école John Cranko.
Vivaldi Suite (Stefania Sansavini, Valentina Falcini).
Zwischen Wind und Asphalt (Entre vent et asphalte). Chorégraphie, musique, texte : Carlos Strasser ; avec Yana Peneva, Carter Smalling et Carlos Strasser.
Albinoni (Germinal Casado). Avec Annabelle McCarthy et Serhii Zharikov.
Shimmer Simmer (Kinsun Chan). Musique : Antonio Vivaldi/Max Richter.
Le Corsaire, pas d’esclaves. Avec Alice Pelizza et Ryoma Hudzeleu.
Suite pour deux pianos (Uwe Scholz). Avec Ryan Handa, Reito Nashiki; Katharina Buck, Adrien Hohenberg, Carter Smalling.
Le Lac des Cygnes, pas de deux. Avec Yana Peneva, Andrew Shields.
Études, extraits (Tadeusz Matacz, Barbara Matacz, Galina Solovieva).
Élèves de la John Cranko Schule, musique enregistrée.

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Pour sa matinée annuelle, les jeunes danseurs sont mis en avant dans un programme aussi ambitieux par ses choix chorégraphiques que par ses demandes techniques.


Qui l'eût dit ? Dans la riche programmation de cette fin de saison au Ballet de Stuttgart, c'est peut-être cette matinée de l'école John Cranko qui lui est associée qui nous livre les frissons les plus intenses, et comme la veille pour le Lac Des Cygnes avec un public supplémentaire au pied du grand écran qui retransmet en direct la matinée. Les spectacles d'école sont pourtant un genre bien cadré, avec ses passages obligés et sa bonne humeur un peu forcée – au moins échappe-t-on ce matin entièrement aux discours. Comme il se doit, la matinée commence par une pièce destinée à donner une première expérience de la scène aux plus petits, avec quelques minutes de Vivaldi pour un moment léger qui n'est pas sans charme. La pièce suivante, elle, a une toute autre ambition : chorégraphe, danseur, compositeur, pianiste et poète en une seule personne, Carlos Strasser est aussi élève de l'école de danse ; il ne danse pas dans cette pièce, mais il récite son propre texte et joue quelques notes de piano : c'est prometteur, mais pas encore abouti et pas très adapté à l'exercice du gala d'école ; la danse (Carter Smalling rejoint plus tard par Yana Peneva) est du moins agréable à regarder à défaut d'un style très personnel.

Après un joli duo de Germinal Casado dansé par Annabelle McCarthy et Serhii Zharikov, cette première partie se conclut sur une pièce d'ensemble, mettant particulièrement en avant le corps de ballet masculin, hélas sur l'éprouvant remix des Quatre saisons par Max Richter ; la pièce chorégraphiée par Kinsun Chan, le nouveau directeur du ballet de la Semperoper à Dresde, confirme le talent tout particulier de Stuttgart pour la cohésion des troupes, à l'école comme ensuite sur la scène du ballet.

La deuxième partie comporte notamment deux pas de deux du répertoire classique, le pas d'esclaves du Corsaire et le pas de deux du Cygne noir du Lac des Cygnes, pour lesquels les jeunes danseurs ont bénéficié du coaching de Maria Eichwald, professeure à l'école et surtout grande étoile à Stuttgart pendant dix ans. Les quatre danseurs ainsi présentés n'en sont visiblement pas au même niveau de maturité artistique, mais tous les quatre livrent une danse de haut niveau technique. Dans l'extrait du Corsaire, les choses tournent à l'avantage du soliste masculin, Ryoma Hudzeleu, même si tous deux ont encore un peu de chemin sur la route de la maturité artistique. Sa partenaire Alice Pelizza est techniquement sans reproche, avec une vraie musicalité et une précision enviable, mais il lui manque encore un peu de sens de la scène, un peu d'ampleur dans la danse, qui lui permettra certainement à l'avenir de mieux faire valoir ses qualités. Hudzeleu, lui, est proche de l'idéal dans son rôle vif-argent, où la vitesse et l'aisance sont primordiales.

Dans l'autre couple au contraire, le danseur masculin, Andrew Shields, est un peu plus en retrait, avec une danse soignée et énergique à laquelle manque simplement un peu de présence en scène. Sa partenaire, Yana Peneva, elle, est prête pour les grandes scènes. Ses fouettés sont impeccables, énergiques et maîtrisés, s'arrêtant pile sur la musique, mais ce n'est pas tout. Elle propose une danse grand format, qui avale la scène avec une facilité déconcertante, et qui plus est, dans ce format de gala qui ne le favorise pas, elle réussit à dessiner son maléfique personnage, sourire narquois en coin, gestes vifs et tranchants, regard mordant : voilà une danseuse qui a tout ce qu'il faut pour une belle carrière.

Entre les deux pas de deux, la direction de l'école a choisi une pièce d', parfaite pour un tel gala : créée en 1987 pour le Ballet de Zurich, la pièce est ici réduite à un duo masculin, suivi d'un trio sur deux des quatre mouvements de la seconde suite pour deux pianos de Rachmaninoff. La pièce exige beaucoup techniquement des danseurs, mais elle leur demande par surcroît de jouer la comédie et d'interagir avec leurs partenaires : le duo comique de deux danseurs découvrant la cohabitation sur une scène (Ryan Handa, Reito Nashiki) est irrésistible d'allant comme de malice, le trio qui suit, deux danseurs (Adrien Hohenberg, Carter Smalling) et une danseuse (Katharina Buck), est d'une impressionnante maîtrise : les difficultés techniques s'effacent au profit d'un naturel en scène, avec le sourire jusque dans les portés les plus difficiles.

Et comme il se doit, la matinée se clôt sur une pièce qui permet de réunir sur scène (presque) tous les participants : le directeur de l'école Tadeusz Matacz, entouré de son épouse et d'une autre professeure de l'école, a remis en scène Études, en gardant de la pièce d'Harald Lander la musique mais pas la chorégraphie ; le public applaudit tellement qu'on ne sait vite plus si c'est encore la pièce ou déjà les saluts, mais c'est sans importance. Depuis les premiers balbutiements des plus jeunes jusqu'aux grands jetés des plus âgés, ce finale qui ne présente que des extraits collectifs de la pièce est pétillant d'énergie, exigeant pour les danseurs et immédiatement gratifiant pour le public. Le petit programme fournit la liste des compagnies qui ont engagé les diplômés de l'année 2023/2024 : pour douze danseuses et onze danseurs, neuf places à Stuttgart, 12 autres dans des compagnies allemandes ou internationales, qui dit mieux ?

Crédits photographiques : © Roman Novitzky/Stuttgarter Ballett

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Shimmer Simmer (Kinsun Chan). Musique : Antonio Vivaldi/Max Richter.
Le Corsaire, pas d’esclaves. Avec Alice Pelizza et Ryoma Hudzeleu.
Suite pour deux pianos (Uwe Scholz). Avec Ryan Handa, Reito Nashiki; Katharina Buck, Adrien Hohenberg, Carter Smalling.
Le Lac des Cygnes, pas de deux. Avec Yana Peneva, Andrew Shields.
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