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À Genève, avec Outsider, Rachid Ouramdane perd le fil

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Genève. Grand Théâtre. 3-V-2024. Rachid Ouramdane : Outsider (Création mondiale). Chorégraphie : Rachid Ouramdane. Scénographie : Sylvain Giraudeau. Lumières : Stéphane Graillot. Costumes : Gladys Duthil. Musique : Gay Guerilla & Evil Nigger de Julius Eastman (1940-1990). Intervenants : Hamza Benlabied, Airelle Caen, Clotaire Fouchereau. Ballet du Grand Théâtre de Genève (Yumi Aizawa, Céline Allain, Jared Brown, Adelson Carlos, Anna Cenzuales, Zoé Charpentier, Quintin Cianci, Oscar Comesaña Salgueiro, Diana Dias Duarte, Armando Gonzales Besa, Zoe Hollinshead, Julio León Torres, Mason Kelly, Riccardo Macedo, Emilie Meeus, Léo Merrien, Stefanie Noll, Juan Perez Cardona, Luca Scaduto, Sarah Shigenari, Geoffrey Van Dyck, Manuel Vega, Madeline Wong). Highliners : Daniel Laruelle, Louise Lenoble, Tania Monier, Nathan Paulin. Pianos : Adrián Fernández Garcia, Pilar Huerta Gómez, Lucie Madurel, Luca Moschini, direction : Stéphane Ginsburgh.

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Théâtre archi-comble d'un public acquis à la cause de la danse pour assister à cette première mondiale du ballet Outsider de en coproduction avec Chaillot-Théâtre National de la Danse.

Depuis quelques semaines, la presse locale se penchait à force de communiqués, d'interviews et autres formes de promotion sur cette création mondiale du chorégraphe que le Grand Théâtre de Genève accueillait pour la première fois sur ses planches. On nous promettait un spectacle inhabituel. Un spectacle dont le chorégraphe français s'est déjà fait le chantre du funambulisme dans quelques-unes de ses récentes chorégraphies, comme dans son Corps extrêmes en juin 2022 à Paris.

Devant un mur nu, éclairé de couleurs pastel, reprend ses «recherches» sur la verticalité. Il convie le Ballet du Grand Théâtre de Genève dans un affrontement cordial avec quatre funambules fil-de-féristes qui évolueront de la mi-hauteur jusqu'aux cintres sur leurs rubans tendu sur toute l'ouverture de scène.
Mais avant d'assister à ce qui tient plus du numéro de cirque ou de la performance athlétique que de l'esprit de la danse, le spectacle s'ouvre sur une course effrénée des danseurs passant de cour à jardin et de jardin à cour à une vitesse vertigineuse. Impressionnants de précision, ses entre-croisements donnent le vertige. Soudain, un coureur est attrapé au bras par un autre, et s'improvise alors une pirouette dont l'attrapé se dégage bientôt pour s'élancer dans les bras d'un autre danseur que le hasard aurait posté là. Ce premier tableau est d'une énergie brutale superbement contrôlée. Petit à petit, s'installe une anarchie de corps s'élançant, se jetant, sautant, s'élevant pour bientôt culbuter, rouler à terre. Puis comme par enchantement, les danseurs se retrouvent en formation, exécutant une chorégraphie d'une rigueur d'ensemble absolue avant que ne reprenne les folles courses d'alors.


L'œil est tellement pris par la débauche des mouvements qu'on en oublie la musique. La pièce choisie, Gay Guérilla, pour illustrer ce défoulement de corps est du compositeur afro américain (1940-1990). Articulée autour d'accords plaqués répétés à l'envi, l'impression s'apparente à certaines musiques de Steve Reich ou de Philip Glass encore que chez Eastman, les rythmes paraissent plus inspirés des musiques afro-cubaines ou du jazz. Et pourtant, elle impose peu à peu ses rythmes et son volume sonore. En effet, le piano n'a jamais autant mérité son appellation orchestrale d'instrument de percussion. Ça tape, ça tambourine, ça éclate, ça sonne, ça cymbale. Et, lorsque quatre piano (probablement sonorisés) envoient cette musique, elle finit par vous transpercer les oreilles. Pourtant, ce qui se passe dans la chorégraphie déjantée, mais rappelons-le d'une précision démentielle, ne laisse à aucun moment l'impression qu'on nous raconte ce qu'exprime la musique.

Après une trentaine de minutes de ce déferlement sonore, la musique s'apaise pour laisser en scène une seule danseuse immobilisée dans une pose improbable mais d'une grande beauté. Dès lors, un grand silence plane bientôt sur le théâtre pour laisser la place à quatre funambules qui, à diverses hauteurs, traversent la scène en équilibre sur leurs fils. On admire la performance sans saisir le sens de cette intrusion athlétique dans ce spectacle de danse.

Mais le chorégraphe semble prendre goût à cette performance puisque son second ballet enchaîne avec ces mêmes démonstrations de fil-de-féristes. Et la danse est le reflet de la musique. Non pas dans son esprit mais dans sa forme répétitive. Si on assiste à de très beaux portés, certains danseurs étant lentement élevés au plus haut. après quatre à cinq de ces élévations, peut-être voudrait-on passer à autre chose.

En résumé, ces séquences laissent l'impression que Rachid Ouramdane perd le fil de ce qu'il cherche à nous raconter. Peut-être est-ce dû à la difficulté de porter visuellement les intentions profondes et revendicatrices du compositeur lorsqu'il titre ses œuvres Gay Guérilla (Guérilla homosexuelle) ou Evil Nigger (Méchant nègre) ? Et puis, peut-être que cette trop longue pièce aurait pu faire l'œuvre de deux ballets séparés. On aurait gagné en repos face à l'agressivité de la musique et en visualisation, avec deux sujets bien distincts l'un de l'autre.

Crédit photographique : GTG © Grégory Batardon

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Genève. Grand Théâtre. 3-V-2024. Rachid Ouramdane : Outsider (Création mondiale). Chorégraphie : Rachid Ouramdane. Scénographie : Sylvain Giraudeau. Lumières : Stéphane Graillot. Costumes : Gladys Duthil. Musique : Gay Guerilla & Evil Nigger de Julius Eastman (1940-1990). Intervenants : Hamza Benlabied, Airelle Caen, Clotaire Fouchereau. Ballet du Grand Théâtre de Genève (Yumi Aizawa, Céline Allain, Jared Brown, Adelson Carlos, Anna Cenzuales, Zoé Charpentier, Quintin Cianci, Oscar Comesaña Salgueiro, Diana Dias Duarte, Armando Gonzales Besa, Zoe Hollinshead, Julio León Torres, Mason Kelly, Riccardo Macedo, Emilie Meeus, Léo Merrien, Stefanie Noll, Juan Perez Cardona, Luca Scaduto, Sarah Shigenari, Geoffrey Van Dyck, Manuel Vega, Madeline Wong). Highliners : Daniel Laruelle, Louise Lenoble, Tania Monier, Nathan Paulin. Pianos : Adrián Fernández Garcia, Pilar Huerta Gómez, Lucie Madurel, Luca Moschini, direction : Stéphane Ginsburgh.

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