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Les quatuors Arod et Hermès au Festival de Pâques de Deauville

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Deauville. Salle Élie de Brignac-Arqana. 13 & 14-IV-2024. Le 13 : Joseph Haydn (1732-1809) : Quatuor à cordes en ré majeur op. 76 n° 5 Hob.III :79. Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Quatuor à cordes n° 14 en do dièse mineur op. 131. Gabriel Fauré (1845-1924) : Quintette pour piano et cordes n° 1 en ré mineur op. 89. Kojiro Okada, piano ; Quatuor Arod. Le 14 : Anton Webern (1883-1945) : Langsamer Satz pour quatuor à cordes (1905). Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concerto pour piano et quatuor à cordes n° 13 K. 415. Johannes Brahms (1833-1897) : Quatuor à cordes n° 2 en la mineur op. 51 n° 2. Ismaël Margain, piano ; Quatuor Hermès.

Pour sa 28ème édition, le Festival de Pâques de Deauville invitait le second week-end deux des meilleurs quatuors français actuels, tous deux avec une pièce du programme en quintette.


Éclectique, la programmation du festival met en avant cette année encore beaucoup de pianistes, mais offre le deuxième week-end une belle visibilité à deux quatuors, le concert du vendredi ayant fait la part belle à la musique de Telemann et Bach – avec entre autres Justin Taylor au clavecin.

Le samedi, le entre d'abord seul sur la scène de la Salle Élie de Brignac-Arqana (lieu utilisé le reste de l'année pour les ventes aux enchères de chevaux de course), bien qu'un Steinway soit déjà apparent à leur côté, en prévision du Quintette de Fauré donné en deuxième partie de soirée. D'abord dans le Quatuor à cordes en ré majeur op. 76 n° 5 Hob.III de Haydn, les Arod affichent une style enjoué et une précision technique indiscutable. Pour cette partition de la période classique, les musiciens portés par le magnifique Goffriller du premier violon Jordan Victoria trouvent un phrasé souple et vivant, particulièrement bien développé aussi à l'alto de Tanguy Parisot. Le Ruggieri du violoncelliste Jérémy Garbarg apporte un grain particulier aux graves, jamais démarqué du groupe, dont il faut citer Alexandre Vu, sur violon Guadagnini.

Avec le Quatuor à cordes n° 14 en do dièse mineur op. 131 de Beethoven, la sonorité se veut d'abord un peu plus chaude à l'Adagio ma non troppo e molto espressivo, pour un jeu toujours impeccable, mais souvent trop didactique, comme si les artistes craignaient de se libérer avec le génie allemand. Un manque d'expressivité romantique ressort alors des premiers mouvements, et il faut attendre le Presto pour que le geste se délie, sans que l'on ne ressente jamais véritablement une approche inspirée de la partition. Fort heureusement, le retour d'entracte et l'arrivée de au piano inverse la tendance : sa sonorité cristalline et presque aquatique (on ne peut s'empêcher de penser parfois à Debussy) s'accorde à merveille à Fauré, dont le Quintette pour piano et cordes n° 1 en ré mineur op. 89 échauffe aussi les superbes cordes XVIIIe siècle du . Plus libres de leurs mouvements, ils se montrent vraiment touchants dans la délicatesse de l'Adagio, surtout le premier violon de Jordan Victoria, d'une belle justesse dans le vibrato.


Le lendemain, c'est au tour du d'entrer en scène, pour un concert initié par un Langsamer Satz de Webern d'une grande finesse, qui démontre par la sonorité chaude des instrumentistes comme ils s'accordent idéalement à la musique post-romantique. Une fois l'œuvre achevée, les musiciens reviennent avec pour une intéressante rareté, puisqu'il s'agît de la version pour quatuor à cordes et piano du Concerto n° 13 K.415 de Mozart, écrite de sa propre main en complément de la version plus célèbre pour petit ensemble à cordes et vents. Ici, les Hermès s'adaptent peut-être un peu moins au phrasé classique que les Arod la veille, mais le fait qu'on ne soit pas dans un pur quintette, mais bien dans un concerto avec quatuor, permet de profiter de leur volume pour compenser ce que l'oreille cherche à retrouver de la version avec orchestre de chambre. Plus évident par sa souplesse et son cantabile, le pianiste livre sa partie avec énergie, jamais en décalage avec le groupe, bien que son Steinway soit placé derrière plutôt que devant les autres musiciens.


En dernière partie, nous retrouvons le seul dans le romantisme d'un Brahms dont ils ont déjà enregistré une splendide – sans doute la meilleure version de ce début de siècle – intégrale des quatuors avec piano, pour le label La Dolce volta. À présent dans le Quatuor à cordes n° 2 en la mineur op. 51 n° 2, les violons de Omer Bouchez et Élise Liu (sur Tononi 1730), l'alto de Lou Yung-Hsin Chang et le violoncelle de Yan Levionnois se lancent dans la partition avec cette rondeur et cette flamme entendue seulement ces dernières années de la part de formation comme le Quatuor Jerusalem. D'un son plein au lyrisme ardent, le valorise chaque intonation et chaque contraste sans jamais trop en rajouter, pour faire chanter cette partition, particulièrement valorisée ce dimanche par la chaleur rauque du violoncelliste. Il reste à espérer que le label B.Record, partenaire du festival, puisse publier l'enregistrement prochainement.

Crédits photographiques : © Claude Doaré

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Deauville. Salle Élie de Brignac-Arqana. 13 & 14-IV-2024. Le 13 : Joseph Haydn (1732-1809) : Quatuor à cordes en ré majeur op. 76 n° 5 Hob.III :79. Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Quatuor à cordes n° 14 en do dièse mineur op. 131. Gabriel Fauré (1845-1924) : Quintette pour piano et cordes n° 1 en ré mineur op. 89. Kojiro Okada, piano ; Quatuor Arod. Le 14 : Anton Webern (1883-1945) : Langsamer Satz pour quatuor à cordes (1905). Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concerto pour piano et quatuor à cordes n° 13 K. 415. Johannes Brahms (1833-1897) : Quatuor à cordes n° 2 en la mineur op. 51 n° 2. Ismaël Margain, piano ; Quatuor Hermès.

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