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Monte-Carlo. Festival Printemps des arts de Monte-Carlo. One Monte-Carlo ; Auditorium Rainier III ; Théâtre des Variétés. 15 et 16-III-2024.
Le 15 : Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Trio avec piano n°1 en mi bémol majeur, op.1 n°1. Trio n°5 en ré majeur « Les Esprits », op.70 n°1. Trio n°7 en si bémol majeur « à l’Archiduc », op.97. Sayaka Shoji, violon ; Henri Demarquette, violoncelle ; Jean-Frédéric Neuburger, piano.

Le 16 à 18h : Gustav Mahler (1860-1911) : Quatuor pour piano et cordes en la mineur. Das Lied von der Erde ; version de chambre de Reinbert de Leeuw. Lucile Richardot, mezzo-soprano ; Stefan Cifolelli, ténor. Het Collectief, direction : Gregor Mayrhofer.
Le 16 à 20h : Sophie Lacaze (1963*) : L’étoffe inépuisable du rêve, opéra de chambre en 2 actes sur un livret d’Alain Carré. Mise en scène : Jeanne Debost. Els Janssens, mezzo-soprano ; Xavier de Lignerolles, ténor ; Romain Dayez, baryton ; Alain Carré, récitant. Ensemble Orchestral Contemporain, direction : Bruno Mantovani

 
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Pour sa 40ème édition et la 3ème sous la direction artistique de , le Printemps des Arts de Monte-Carlo trouve ses sources dans la nature et l'infini romantique du Chant de la Terre de Mahler, donné le premier week-end dans une transcription de chambre, juste avant une création opératique de .

Devenu directeur artistique du festival monégasque en 2021, Bruno Mantovani continue de dérouler le projet présenté dès sa première édition sous la thèse « Ma Fin est mon Commencement ». Opus 3 de ce développement, cette édition s'intègre cette fois autour du Chant de la Terre, donc plus particulièrement autour de l'ouvrage de Mahler Das Lied von der Erde, présenté le premier week-end dans la transcription du chef . Ce nouveau Printemps des Arts se déroule par ailleurs dans un contexte où la terre crie de plus en plus sa détresse face à la marque de l'homme, et où les températures dépassent déjà de plusieurs degrés les normales saisonnières chaque mois de ce début d'année 2024. Mais avant d'aborder ce sujet avec l'opéra de chambre de le samedi, le vendredi revient plus sereinement aux perturbations musicales du grand Beethoven, avec un parcours en trois trios avec piano.

Les Esprits de la Terre

Comme plusieurs autres programmes du festival, l'ordre chronologique est utilisé pour un concert où les ouvrages d'un seul compositeur – en l'occurrence Beethoven – cherchent à créer une sorte de monographie focalisée sur une seule partie du répertoire de l'artiste, ses trio. Le n°1 op.1 n°1 ouvre une soirée refermée par le dernier, n°7 op.97, dans laquelle vient s'intercaler au centre le n°5 op.70 « des Esprits ». Des trois, seul celui central avait déjà été joué ensemble par les musiciens en présence, pourtant d'une belle écoute entre eux dès le n°1 en mi bémol majeur, malgré des différences stylistiques évidentes dans le jeu. déploie avec l'Allegro un geste assuré et agile, qu'il laisse reprendre par le violoncelle chaud d'. Plus discret mais toujours parfaitement associé, le violon de sait qu'il faut dans cette partition laisser le piano diriger, mais convainc totalement par sa finesse à l'Adagio cantabile, puis par sa subtile dextérité au Scherzo.

Déjà interprété auparavant par le groupe, le Geister-Trio en ré majeurDes Esprits en français – survole la soirée avec encore plus de cohésion d'ensemble. Bien nommé, l'Allegro vivace e con brio profite d'abord du violon de Shoji avant de laisser le Steinway de Neuburger reprendre l'ascendant dans la bonne acoustique de l'auditorium du One Monte-Carlo, nouvelle salle dorée de style ancien, à deux pas du casino. D'une superbe mais toujours discrète pensivité, le Largo assai ed espressivo assoie la supériorité de cette interprétation du Trio n°5, le Presto restant d'un très haut niveau ensuite. Après l'entracte les musiciens reviennent pour la dernière œuvre, « À l'Archiduc ». Mais si la prestation est toujours de qualité techniquement, l'esprit n'y est plus tout à fait tant le programme est sans doute trop dense. Alors l'archet de Demarquette appuie plus tandis que celui de Shoji se montre souvent trop en retrait et qu'au piano, Neuburger file à toute allure sur son clavier. Moins attentif qu'auparavant à ce que font les cordes, il joue presque comme s'il était seul à l'Andante et plus encore au finale. En bis, le Finale du Trio n°1 permet une jolie boucle, mais démontre la fatigue latente de tous, jusqu'à un accroc sur la touche du violoncelle qui fait ressortir de nulle part un accord de pizz à faire sursauter le pianiste.

Le Chant de la Terre

Le samedi, une masterclass d' ouvre la journée, suivie d'une conférence du musicologue Jean Castellini sur « La Terre selon Gustav Mahler », puis en fin d'après-midi, d'un concert intégralement Mahler à l'Auditorium Rainier III. Introduit par le Quatuor pour piano et cordes en la mineur, qui met déjà trop en avant un premier violon très exalté et démarqué du groupe, Das Lied von der Erde apparait ce jour dans une transcription de , pour un ensemble d'une quinzaine de musiciens, légèrement différent de l'arrangement de Schönberg (complété par Reiner Riehn).

Enregistrée juste après avoir été donnée en concert en 2019 par un chef qui savait vivre sa dernière année, la transcription retrouve la majorité des interprètes de l'album, toujours dans l'ensemble , ainsi que la mezzo-soprano . Appliqué, le chef Gregor Mayhofer accorde tout le monde sans apporter de vision particulière à l'œuvre, mais traite avec soin chaque caractère de chaque lied. La Chanson à boire (Das Trinklied…) met en limite la voix peu puissante du ténor , plus convaincant dans son deuxième lied puis dans son Ivrogne (Der Trunkene…) du troisième. Entre ses morceaux, reprend une partie demandée régulièrement depuis cinq ans, parce qu'à défaut d'avoir tout à fait le style, ni parfaitement la langue allemande, elle présente l'une des couleurs les plus idéales de la scène actuelle pour l'ouvrage. Sa première intervention laisse apparaître une voix claire bien que d'un grain d'une magnifique clarté sombre, avec certes une petite tendance à poitriner dans l'extrême grave, mais d'une palette de nuances dans ce registre qui rappelle les plus grandes tenantes du rôle. Son second lied s'écoule facilement pour laisser place subrepticement au ténor, avant de laisser l'ensemble et notamment le contrebasson ouvrir l'Abschied, où la couleur de Richardot offre certains moments de grâce.

Pour accompagner le chant, le petit ensemble terni par l'acoustique peu porteuse du lieu fait tout de même ressortir certains bois, dont la clarinette solo, les musiciens souvent en possession de deux instruments se montrant toujours meilleurs dans l'un (le flutiste très supérieur à la flûte qu'au picolo bien trop acide, le cor anglais meilleur sur cet instrument qu'au hautbois, la clarinettiste trop ténue à la clarinette basse). Intéressante, la transcription de de Leeuw maintient un piano pour recréer certains effets de masse, ainsi qu'un harmonium et, à la toute fin, un célesta en plus de la harpe pour créer les accords d'éternité (Ewig…).

Le retour sur Terre

En sortant nous nous dirigeons directement vers le Théâtre des Variétés, pour une création d'un opéra de chambre de . En deux actes d'à peine une heure, l'œuvre dirigée par Bruno Mantovani devant une poignée d'instrumentistes de l' est une étude sur la Création, achevée par un retour à la réalité. Racontée par le librettiste lui-même, , l'histoire décrit d'abord une création qui se veut tirée des mythes aborigènes australiens, mais trouve rapidement racine dans notre monde chrétien, avec une création en sept jours où le septième jour sert au repos des dieux. Très clair dans l'émission, Carré vient s'intégrer dans une matière d'abord incertaine, où les quelques instruments classiques s'associent aux percussions et aux sonorités brutes d'instruments aborigènes.

Dans des costumes () qu'on aurait préféré plus sobres et sans plumes, la mezzo Els Janssens, le ténor et le baryton alternent entre chants d'onomatopées, textes parlés et longues déclamations, toujours prévenus dans les départs par Mantovani, pour le reste précis dans ses tempi, à même de recréer les sonorités souhaitées souvent proches de celles, spatiales, captées par la Nasa depuis une cinquantaine d'année. Loin du génie d'un Grisey dans cette démarche (Le Noir de l'Étoile), Sophie Lacaze parvient à créer quelques intéressants passages, dont la transition avant le deuxième jour, développée par les rythmes des tams-tams et les sons mystiques du didgeridoo. À l'acte II, ce qui se voulait une rupture et un retour du rêve de l'artiste à la réalité apparaît malheureusement bien pâle, beaucoup trop léger avec la guimbarde ou les notes liées stridentes des cordes, pour une rupture beaucoup trop douces, qui s'apparente plus à une douce lamentation qu'à un cri de détresse de notre planète, véritablement en danger.

Crédits photographiques : Bruno Mantovani ; Sayaka-Shoji, Henri-Demarquette et Jean-Frederic-Neuburger ; Het-collectief, Gregor-Mayrhofer, Lucile-Richardot et ; L'étoffe inepuisable du rêve au Théâtre des Variétés © Alice Blangero

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Le 15 : Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Trio avec piano n°1 en mi bémol majeur, op.1 n°1. Trio n°5 en ré majeur « Les Esprits », op.70 n°1. Trio n°7 en si bémol majeur « à l’Archiduc », op.97. Sayaka Shoji, violon ; Henri Demarquette, violoncelle ; Jean-Frédéric Neuburger, piano.

Le 16 à 18h : Gustav Mahler (1860-1911) : Quatuor pour piano et cordes en la mineur. Das Lied von der Erde ; version de chambre de Reinbert de Leeuw. Lucile Richardot, mezzo-soprano ; Stefan Cifolelli, ténor. Het Collectief, direction : Gregor Mayrhofer.
Le 16 à 20h : Sophie Lacaze (1963*) : L’étoffe inépuisable du rêve, opéra de chambre en 2 actes sur un livret d’Alain Carré. Mise en scène : Jeanne Debost. Els Janssens, mezzo-soprano ; Xavier de Lignerolles, ténor ; Romain Dayez, baryton ; Alain Carré, récitant. Ensemble Orchestral Contemporain, direction : Bruno Mantovani

 
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