Au TCE, l’Orchestre de chambre de Paris sous la baguette de Thomas Dausgaard
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Paris. Théâtre des Champs-Elysées.18-X-2023. Arthur Honegger (1892-1955) / Gérard Pesson (né en 1958) : Rugby, mouvement symphonique n°2. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concerto pour piano n°9 en mib, K.271, dit « Jeunehomme ». Félix Mendelssohn (1809-1847) : Symphonie n°3 en la mineur, op.56 dite Écossaise. Elisabeth Leonskaja, piano ; Orchestre de chambre de Paris, direction : Thomas Dausgaard
Le chef Thomas Dausgaard est à la tête de l'Orchestre de chambre de Paris dans un programme tout en rebonds auquel le plateau du Théâtre des Champs-Elysées offre un écrin à l'acoustique idéale.
L'entrée en matière est énergétique et chahutée avec Rugby, le mouvement symphonique n°2 d'Arthur Honegger écrit en 1928, quatre ans après son Pacific 231 très plébiscité. L'œuvre est entendue ce soir dans la réorchestration de Gérard Pesson, compositeur que l'on n'attendait pas forcément dans ce registre musclé. Deux bonnes raisons président à cette réalisation, commande de l'Orchestre de chambre de Paris : fêter le bicentenaire de la naissance du rugby d'une part et honorer le Prix international Arthur Honegger qui lui a été décerné en 2019 d'autre part.
Il s'agit pour le compositeur d'adapter une partition alignant les vents par trois à l'effectif plus léger de l'Orchestre de chambre de Paris, en allégeant également le pupitre des cordes sans rien sacrifier à la tonicité et la vigueur de l'œuvre originale.
Ainsi dégraissée, l'œuvre lancée à vive allure par Thomas Dausgaard laisse transparaître le maillage serré d'un discours mettant à profit les contretemps jazzy, le relai des pupitres en imitation et l'ambiguïté métrique telle qu'elle s'exerce avec ce thème récurrent en binaire et valeurs égales que s'échangent les cuivres au sein d'une mesure ternaire. Les timbres s'en trouvent également rafraîchis, celui du piccolo persifflant, des bois tremolando ou du basson en a parte. La direction est au cordeau et l'orchestre à l'assaut pour traduire le mouvement haletant de cette rencontre sportive fantasmée et en assumer toute la virtuosité.
C'est l'immense pianiste Elisabeth Leonskaja qui est au clavier dans le Concerto pour piano n°9 dit « Jeunehomme » en Mib majeur de Mozart, écrit, on le sait aujourd'hui, pour la pianiste française Louise Victoire Jenamy, commanditaire et créatrice de l'œuvre à Salzbourg en janvier 1777. Le timbre velouté et l'art suprême du legato de la pianiste nous enchantent dans un premier mouvement qui installe tout à la fois l'assise rythmique et la communication fluide entre la soliste et l'orchestre. Introspectif sous les doigts de la pianiste qui en accuse la dimension dramatique jusque dans la cadence, l'Andantino se pare d'une couleur presque beethovénienne. Des accents que l'on retrouve dans le Rondo final plein de surprises. En revanche, le refrain file droit sur un clavier très homogène et en accord parfait avec l'orchestre dont Thomas Dausgaard soigne la finesse de l'articulation. Rappelée par un public fervent, la pianiste prolonge cet instant mozartien avec l'Andante de la Sonate K.545, semplice et cantando.
Si les vents vont par deux dans la Symphonie n°3 dite Écossaise de Félix Mendelssohn, que l'Orchestre de chambre de Paris a mis à son répertoire, le compositeur convoque quatre cors mis en valeur dans l'orchestration. Ils contribuent activement à ce climat plutôt sombre qui domine dans le premier mouvement. Placé en deuxième position, le scherzo ramène la lumière avec ce thème bondissant dont la clarinette solo de Florent Pujuila magnifie la verve populaire. Comme Berlioz et sa musique de plein air, Mendelssohn écrit l'espace et la résonance (sons itératifs des bois) que restituent les musiciens avec une vitalité idéale. Alternant avec le chant des cordes, dans un Adagio qui darde ses couleurs, le choral des cuivres modifie les perspectives au sein d'une musique plus narrative que dramatique, qui se répète plutôt qu'elle ne développe. Le final fougueux est joué attacca, boosté par un chef qui tient l'allure avec autant de rigueur que de précision. Superbe, la péroraison met en vedette les cuivres que l'on n'avait pas encore entendus dans la plénitude de leur registre. La soirée est de haute tenue et l'Orchestre de chambre de Paris en grande forme.
Crédit photographique : © Orchestre de chambre de Paris
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Paris. Théâtre des Champs-Elysées.18-X-2023. Arthur Honegger (1892-1955) / Gérard Pesson (né en 1958) : Rugby, mouvement symphonique n°2. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concerto pour piano n°9 en mib, K.271, dit « Jeunehomme ». Félix Mendelssohn (1809-1847) : Symphonie n°3 en la mineur, op.56 dite Écossaise. Elisabeth Leonskaja, piano ; Orchestre de chambre de Paris, direction : Thomas Dausgaard