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Paris, Le Centquatre, 10-VI-2011. Ivan Fedele (né en 1953): La pierre et l’étang (…les temps…), commande de l’Ircam-Centre Pompidou (CM) pour percussions, quatuor à cordes, orchestre et électronique en temps réel ; Magnus Lindberg (né en 1958): Kraft pour solistes, orchestre et électronique live. Daniel Ciampolini et Francis Petit, percussions, Quatuor Renoir, Nicolas Baldeyrou, clarinette, Magnus Lindberg, piano; Nadine Pierre, violoncelle; Orchestre Philharmonique de Radio France; réalisation informatique musicale Ircam/ Thomas Goepfer et Manuel Poletti; direction Ernest Martinez Izquierdo.
Sollicitant les forces vives du Philharmonique de Radio France, le Festival Agora investissait l'espace du Centquatre pour une soirée tout à fait exceptionnelle au cours de laquelle le public était convié à cheminer de l'auditorium de la Salle 400 à la Nef Curial, l'espace idoine pour y entendre résonner l'une des oeuvres les plus imaginatives en matière de son et d'espace du compositeur finlandais Magnus Lindberg.
Non moins inventive et singulière, la création mondiale et très attendue d'Ivan Fedele dans la configuration plus traditionnelle de l'auditorium mettait à l'oeuvre les ressources de l'électronique pour démultiplier et faire vivre l'espace. La pierre et l'étang (…les temps…) au titre ambivalent convoque un quatuor à cordes au centre du plateau ( très réactif Quatuor Renoir) cerné par un orchestre à cordes et un percussionniste (rayonnant Daniel Ciampolini); les solistes sont équipés de capteurs de gestes – placés sur les archets et le dos de la main du percussionniste – permettant d'analyser et de traiter en temps réel le matériau sonore lié au geste de sa production, voire même à son anticipation: dans une cadence quasi démonstrative ménagée au centre de la pièce, Daniel Ciampolini exécute dans l'espace des mouvements générant du son par le seul biais de l'électronique: unique allégeance à la virtuosité de l'outil technologique que Fedele soumet bien davantage à son projet sonore ambitieux. Les quatre titres de la partition, Rocher englouti, Ricochet de galets, Pierre ponce et Pluie de cailloux appelant différentes matières percutées (gong, vibraphone, peaux, marimba…) renvoient à la dimension plastique et puissamment sculpturale de l'oeuvre, « l'objet fiction » selon Fedele, littéralement projeté dans l'espace par le traitement des logiciels et le relais des haut-parleurs : effets saisissants de granulation, de textures vibrantes et traversées d'énergie que vient colorer le jeu de la percussion; spectaculaire autant que convaincante, l'oeuvre communique d'emblée la ferveur de son propos sous le geste largement déployé du chef catalan Ernest Martinez Izquierdo.
La seconde oeuvre du programme, donnée dans le lieu ouvert – et perméable à la rumeur extérieure! – de la Nef Curial du Centquatre, est l'oeuvre d'un tout jeune compositeur; le finlandais Magnus Lindberg avait à peine 25 ans lorsqu'il conçoit Kraft crée à Helsinki en 1985 par son compatriote et ami Esa-Pekka Salonen assis ce soir dans le public. Aussi fascinante que déroutante par la discontinuité des événements sonores, l'oeuvre visionnaire en appelle à l'informatique pour les calculs des proportions et les transformations rythmiques et harmoniques complexes et fait éclater l'espace orchestral en démultipliant les sources sonores; spatialisée par un système de haut-parleurs, la musique, envisagée comme autant d'actions sonores, surgit de tous les côtés grâce aux déplacements des instrumentistes, ici un pupitre de flûtes, là les résonances profondes d'un gong suivies d'une « procession » rythmée par les sonorités des crotales. Aux multiples interventions des quatre solistes – dont celle de Magnus Lindberg au piano – tâtant eux aussi aux nombreux instruments, pas toujours répertoriés, de la percussion, s'ajoute celle du chef lui-même muni d'un micro et rivalisant avec ses collègues dans une improvisation vocale inattendue. La virtuosité requise est phénoménale, Magnus Lindberg réservant aux 2/3 de l'oeuvre une cadence spectaculaire au violoncelle – éblouissante Nadine Pierre – rejoint par la percussion et le piano. L'oeil est sollicité autant que l'oreille durant ces trente minutes d'effervescence ponctuées par un grand crescendo de l'orchestre où la clameur des cuivres le dispute aux déflagrations de la percussion: phénoménal!
Crédit photographique : Magnus Lindberg/DR
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Paris, Le Centquatre, 10-VI-2011. Ivan Fedele (né en 1953): La pierre et l’étang (…les temps…), commande de l’Ircam-Centre Pompidou (CM) pour percussions, quatuor à cordes, orchestre et électronique en temps réel ; Magnus Lindberg (né en 1958): Kraft pour solistes, orchestre et électronique live. Daniel Ciampolini et Francis Petit, percussions, Quatuor Renoir, Nicolas Baldeyrou, clarinette, Magnus Lindberg, piano; Nadine Pierre, violoncelle; Orchestre Philharmonique de Radio France; réalisation informatique musicale Ircam/ Thomas Goepfer et Manuel Poletti; direction Ernest Martinez Izquierdo.