Lunea de Heinz Holliger : évocations de la vie de Nikolaus Lenau

Dans Lunea, le compositeur Heinz Holliger évoque en 23 tableaux la vie du poète romantique Nikolaus Lenau.

La vie de Nikolaus Lenau (1802-1950) est l'archétype de celle de nombreux poètes romantiques : né dans un milieu noble, Lenau s'est essayé à de nombreuses études tout en se mettant très jeune à écrire des poèmes. Profitant de la liberté que lui permettait l'aisance financière de sa famille, le poète a passé une grande partie de sa vie à voyager, connaissant plusieurs passions amoureuses, souvent malheureuses, avant de sombrer dans la folie, probablement due à la syphilis.

C'est cette vie que Heinz Holliger a décidé d'évoquer dans Lunea, à travers 23 tableaux non pas chronologiques mais évoquant chacune un court épisode, comme pris sur le vif, de la vie du poète. Holliger dresse ainsi au fur et à mesure, un portrait de Lenau mais le compositeur distille également ça et là des allusions autobiographiques. Une partie de ces tableaux narratifs est agrémentée par un chœur qui ponctue les propos des personnages et qui apporte une densité à cet opéra à l'écriture très aérée, même si principalement dans le registre médium et grave.

Chaque chanteur incarne plusieurs rôles, ils ne sont donc crédités que par leur nom et leur tessiture au générique. La lecture du livret et de la notice, très complète, sont donc recommandées pour comprendre pleinement le propos. Tous les interprètes, placés sous la direction du compositeur, sont impeccables, en particulier le baryton Christian Gerhaher. La prise de son permet un bon équilibre entre l'orchestre, le chœur et les solistes. Cet opéra, à l'atmosphère sombre et intimiste, supporte donc bien le passage au disque mais l'enchaînement des tableaux sans vraiment de contraste, de changement de voix, de rythme ou d'atmosphère engendre une certaine monotonie à l'écoute, monotonie qui peut être facilement oubliée dans le cadre d'une mise en scène.