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Saint-Saëns dans les flammes de Chamayou et Langrée

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Paris. Philharmonie. Grande Salle Pierre Boulez. 2-IV-2023. Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Danse macabre, poème symphonique op.40. Concerto pour piano et orchestre n° 5 « L’Égyptien » op. 103. Symphonie n° 3 en ut mineur « avec orgue » op. 78. Vincent Warnier, orgue. Bertrand Chamayou, piano. Orchestre des Champs-Élysées, direction musicale : Louis Langrée

Quelques jours après avoir présenté sa première saison en tant que directeur de l'Opéra Comique, reprend la baguette à la Philharmonie, pour un concert volcanique autour d'œuvres de Saint-Saëns, enflammé par lors du Concerto Égyptien.

Devenu depuis peu directeur d'opéra, n'en oublie pas de diriger la musique et démontre à nouveau le niveau de maturité atteint par sa direction. Avec l' qu'il connaît si bien, il entre dans la Danse Macabre comme on entre dans l'Enfer de Dante, non pas par l'abandon de toute espérance, mais par un entrain et une incroyable énergie qui annihilent tout retour en arrière. L'excellent premier violon Alessandro Moccia y procure un solo grinçant, répercuté par les cordes fluides dont le style ancien profite à la célérité et au souffle du propos.

Aussi marquant par ses ruptures dynamiques et ses transports, le Concerto pour piano n°5 débute par un accord parfait entre l'orchestre et le soliste, pour l'occasion grand habitué d'une partition qu'il a enregistrée avec Emmanuel Krivine. L'Allegro animato altier emporte immédiatement vers l'Égypte dans laquelle Saint-Saëns s'était réfugié, porté par et par la clarté du magnifique piano Pleyel de 1905, récemment restauré pour faire partie de la Collection Balleron en ayant gardé un maximum de pièces d'origine, dont le sublime clavier en ivoire. Rapidement très énergique, le concerto profite du doigté particulièrement agile du pianiste, passionnant dans la retranscription des accords en sortes de cloches avec lesquels il fera un excellent parallèle en bis, puis dans la finesse du développement du second thème.

L'Andante frappe dès son introduction par les attaques très nettes des cordes, lancées par un chef ensuite exalté pour faire monter les thèmes et les modes mélodiques égyptiens, réussissant là encore à transporter grâce à une impeccable cohésion avec le pianiste. Le grand développement de la superbe mélodie convie alors à un voyage rêveur, galvanisé par le lyrisme des cordes et le toucher du clavier, en même temps qu'il ne laisse aucune possibilité de s'échapper. La tension des cordes, même dans les moments les plus volubiles, permet une splendide narration, comme un conte en développement, dont l'achèvement est édicté par une fantastique explosion, réalisée grâce à un Molto allegro dantesque dans lequel semble ne pouvoir trouver aucune limite d'agilité ou d'expressivité. Bis idéal, Les Cloches de Las Palmas, quatrième des 6 Études op. 111 de Saint-Saëns, permet encore de s'évader, cette fois dans les îles d'Espagne.

En dernière partie, la Symphonie n°3 profite de l' au grand complet, en même temps que de l'orgue de la Philharmonie de Paris sous les doigts de . En deux faux mouvements qui en regroupent en réalité chacun deux, l'œuvre retrouve avec une lecture physique et presque charnelle de l'Adagio, sans charger dans l'Allegro moderato tout le pathos qu'y mettait encore en 2019 Myung-Whun Chung à la Maison de la Radio. Au contraire, Louis Langrée recherche avec son ensemble sur instruments d'époque à se rapprocher des premières gravures que l'on peut entendre de l'œuvre, en même temps qu'il y apporte sa propre personnalité. Dès les premiers instants, le son aérien des cordes offre un superbe fond sonore pour laisser les bois exploser de toute leur ferveur. Au second mouvement, l'ensemble bénéficie également des envolées des deux pianistes sur le piano Pleyel ramené à gauche de la scène, surplombé par le pédalier de l'orgue, d'où Warnier lance à pleine puissance l'instrument lors d'un Presto Maestoso enflammé !

De ce concert tout Saint-Saëns, on pouvait attendre un bis du même artiste, mais Langrée préfère regarder jouer l'orchestre pour l'Entr'acte de l'Acte III de Carmen… prochainement donnée par les mêmes interprètes à l'Opéra Comique qui l'a vu naître.

Crédits photographiques : © ResMusica

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Paris. Philharmonie. Grande Salle Pierre Boulez. 2-IV-2023. Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Danse macabre, poème symphonique op.40. Concerto pour piano et orchestre n° 5 « L’Égyptien » op. 103. Symphonie n° 3 en ut mineur « avec orgue » op. 78. Vincent Warnier, orgue. Bertrand Chamayou, piano. Orchestre des Champs-Élysées, direction musicale : Louis Langrée

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