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Matthias Goerne et Daniil Trifonov en récital à Paris

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Paris. Philharmonie. Grande Salle Pierre Boulez. 15-VI-2022. Alban Berg (1885-1935) : Vier Lieder op. 2 ; Robert Schumann (1810-1856) : Dichterliebe op. 48 ; Hugo Wolf (1860-1903) : Michelangelo-Lieder ; Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Suite sur des poèmes de Michelangelo Bunarroti op, 145a ; Johannes Brahms (1833-1897) : Vier ernste Gesänge op.121. Matthias Goerne, baryton. Daniil Trifonov, piano

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C'est à une sorte de voyage au bout de la nuit que nous invitent le baryton et le pianiste dans ce récital au programme superbe et ambitieux convoquant Berg, Schumann, Wolf, Chostakovitch et Brahms.

 

est aujourd'hui un des rare récitaliste capable de concilier, dans une subtile interprétation, la nécessaire intimité liée au genre et la savante théâtralité capable d'en exacerber tout le pouvoir d'évocation poétique et émotionnelle. Lorsqu'il s'adjoint pour ce périlleux exercice les services d'un pianiste de la trempe de , l'égo cède rapidement la place à l'égrégore le temps d'un concert : un récital qui s'inscrit dans la droite ligne du tout récent CD, paru chez DG, qui clôt brillamment une trilogie de Lieder entreprise par le baryton allemand, menée d'abord avec Jan Lisiecki (CD1) et Seong-Jin Cho (CD2).

 

Entre amour déçu et mort consolatrice, les deux interprètes nous guident, au travers de méditations visionnaires sur le sens de la vie et de la mort, dans un fascinant et envoûtant voyage nimbé d'ombre et de lumière, d'espoir et de désillusion où la puissance, la souplesse du phrasé, l'impeccable diction et le legato de l'un répond à la virtuosité, à l'élégance et à l'expressivité de l'autre…Tous deux unis dans un formidable engagement complice.

Les Vier Lieder op. 2 d' (1910) ouvrent la soirée. Oscillant entre rêve et cauchemar, les deux interprètes en déploient toute la thématique nocturne dans une lumière morbide qu'engendre une musique erratique où les accords déchirants et frustes du piano flottent sans assise aux côtés d'une mélodie réduite à des lambeaux chaotiques et hallucinés au caractère expressionniste bien marqué.

Éminemment romantique le Dichterliebe de (1840) répond aux attentes d'un compositeur amoureux, impatient et meurtri. Porté par une interprétation véritablement habitée tantôt par la douleur, tantôt par l'exaltation, piano et voix font jeu égal dans ce dialogue chargé de poésie, fort de nuances dynamiques et rythmiques.

Les Michangelo-Lieder d' (1897) étalent ensuite leur affliction résignée peuplée d'ombres mystérieuses dans une espèce de Mémoires d'outre-tombe parfaitement rendues par un piano dissonant et l'amertume des vers de Michel-Ange, préludant à la prochaine chute du compositeur dans la folie.

Même constat résigné pour les trois chansons de la Suite de l'opus 145 de (1974). Une composition achevée un an avant la mort du compositeur, la musique s'y tourne vers l'ascèse en confrontant dans un environnement peu mélodique une voix sculpturale et un piano souvent exsangue évoluant par bribes dans une sorte d'hymne à la mort chargé de supplication et d'étrangeté.

Les Vier ernste Gesänge op. 121 de Johannes Brahms (1896) achèvent ce somptueux et douloureux voyage dans un dernier regard tourné vers la Lumière, sur des textes bibliques empreints de gravité et de consolation portés par les accords obstinés du piano et l'interprétation plus théâtrale que religieuse du baryton allemand dont on admire une fois encore le legato et les aigus filés si émouvants…Avant un lumineux et fervent « Bist du bei mir » de Stölzel (faussement attribué à J.S Bach) en guise de bis qui met un terme plein d'espoir à cette soirée mémorable !

Crédit photographique : © Marie Staggat / DG

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Paris. Philharmonie. Grande Salle Pierre Boulez. 15-VI-2022. Alban Berg (1885-1935) : Vier Lieder op. 2 ; Robert Schumann (1810-1856) : Dichterliebe op. 48 ; Hugo Wolf (1860-1903) : Michelangelo-Lieder ; Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Suite sur des poèmes de Michelangelo Bunarroti op, 145a ; Johannes Brahms (1833-1897) : Vier ernste Gesänge op.121. Matthias Goerne, baryton. Daniil Trifonov, piano

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