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Luxembourg. Philharmonie (Salle de Musique de Chambre). 25-X-2021. Paul Hindemith (1895-1963) : Sonate op. 25/1 ; György Ligeti (1923-2006) : Sonate ; György Kurtág (né en 1926) : Signs, games and messages (extraits) ; Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Suite pour violoncelle n° 4 BWV 1010 ; Enno Poppe (né en 1969) : Filz solo ; Georges Lentz : Anyente, extrait de «Mysterium» («Caeli enarrant…» VII). Tabea Zimmermann, alto
Dans un brillant programme de musiques du dernier siècle, la virtuosité n'est pas le seul atout de l'altiste la plus créative de notre temps.
Le programme choisi par Tabea Zimmermann – 99 ans de musique pour alto solo, Bach non compris dans le calcul – n'est pas le plus festif qu'on peut imaginer. Mais quand tant de mélomanes vont au concert pour déguster encore et toujours les mêmes pâtisseries colorées et sucrées, il est fort heureux qu'il y ait aussi des concerts peut-être moins brillants, mais combien plus nourrissants, pour les sens et pour l'esprit. Ce concert en est un exemple d'autant plus frappant que Tabea Zimmermann aurait tout aussi bien pu se contenter de venir jouer sur scène le programme de son très beau disque récent, Solo II (Myrios Classics).
Il serait presque indécent de souligner toute la virtuosité d'une musicienne qui incarne son instrument comme peu d'autres – les virtuosités, même, puisque l'œuvre écrite pour elle par Enno Poppe, Filz, demande une toute autre maîtrise de l'instrument, en forme d'incessantes sorties de route maîtrisées, que la suite de Bach que l'alto a volée au violoncelle. Ce qui fait tout le prix du parcours que dessine ce concert fleuve va bien au-delà des qualités purement instrumentales de l'interprète : Tabea Zimmermann est bien plus que cela, elle est la partenaire des compositeurs qu'elle inspire autant qu'elle les aide. Les deux parties du concert commencent certes avec des œuvres plus anciennes, Bach après Hindemith, le père fondateur de la littérature pour alto solo ; mais les œuvres de Ligeti, de Kurtág et de Poppe ont directement à voir avec elle, sans parler de l'œuvre du compositeur luxembourgeois Georges Lenz, dont elle assure la création en fin de concert.
La musicienne présente brièvement, mais efficacement, chaque œuvre du programme. Pour cette dernière création, elle la place dans la continuité directe de l'œuvre de Poppe qui précède, travaillant sur le son, avec une capacité à « zoomer et dézoomer sur le son ». Le travail de Poppe avec un jeu où la hauteur précise des notes n'est plus un objectif fait quant à lui écho avec la sonate de Ligeti qui écrit certes des notes précises, mais leur adjoint une flèche indiquant des variations d'un quart ou d'un demi-ton ; et Ligeti écrivant sa sonate s'est plaint auprès de Zimmermann que Hindemith avait déjà composé le prestissimo qu'il voulait lui-même écrire. Les échos abondent ainsi d'œuvre en œuvre tout au long de la soirée. Mais l'intelligence n'est pas ici pas opposée à la sensualité et à l'expression : Zimmermann est de ces musiciens qui rendent apportent de la chaleur humaine à tout ce qu'ils touchent, et elle fait voir brillamment que « la musique contemporaine » n'est pas un isolat glacé coupé de toute la tradition musicale occidentale.
Crédits photographiques : © Eric Devillet
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Luxembourg. Philharmonie (Salle de Musique de Chambre). 25-X-2021. Paul Hindemith (1895-1963) : Sonate op. 25/1 ; György Ligeti (1923-2006) : Sonate ; György Kurtág (né en 1926) : Signs, games and messages (extraits) ; Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Suite pour violoncelle n° 4 BWV 1010 ; Enno Poppe (né en 1969) : Filz solo ; Georges Lentz : Anyente, extrait de «Mysterium» («Caeli enarrant…» VII). Tabea Zimmermann, alto