L’Opéra de Paris a rendu public aujourd’hui les conclusions du rapport sur la diversité et la discrimination au sein de l’institution, commandé à Pap Ndiaye et Constance Rivière dans le contexte du mouvement Black Lives Matter. Il fait également suite à un manifeste rédigé il y a quelques mois par les danseurs et les chanteurs réclamant une meilleure prise en compte de la diversité dans le ballet, les chœurs, l’orchestre ou les métiers techniques. Qu’il s’agisse du fonctionnement interne, des conditions de représentation des œuvres ou du recrutement, ce rapport est un point de départ pour cette réflexion, plus que jamais nécessaire aux yeux d’Alexander Neef, le directeur de l’ONP. Car il existe peu de diversité à Paris, contrairement à la Grande-Bretagne et surtout aux États-Unis où le Met a nommé la semaine dernière un représentant pour la diversité. Et si l’Opéra de Paris refuse toute idée de censure ou suppression d’œuvres – il préfère les contextualiser sans modifier les livrets – , il reconnait que les visions exotiques et coloniales, la question du blackface ou du yellowface ne sont plus en phase avec l’époque et n’ont plus lieu d’être. Face à une volonté de démocratisation culturelle et d’élargissement du public, il faut que les futurs artistes issus de la diversité aient la possibilité de s’identifier à des « rôles modèles », artistes inspirants qui seraient valorisés par l’institution, ou puissent accéder plus facilement à des emplois artistiques.
Or, les rapporteurs constatent que le concours d’entrée à l’école de danse de Nanterre, principale voie d’accès au Ballet de l’Opéra de Paris, est encore peu ouvert à la diversité, avec des critères de sélection parfois hérités d’une anthropologie ancienne. C’est la raison pour laquelle ils proposent de réformer substantiellement le concours en recrutant des jeunes danseurs partout en France. Ils suggèrent aussi que les danseurs aillent à la rencontre de la société, pour faire connaître les métiers de la danse classique. Du côté de l’orchestre et du chœur, les rapporteurs estiment que le problème se situe dans les filières de formation d’excellence française.
Parmi les pistes de réflexion et d’action suggérées par les rapporteurs : repérer les talents dans tous les territoires, rendre plus accessibles les recrutements au sein de l’orchestre ou des chœurs, ouvrir le mécénat à la diversité, éviter les représentations stéréotypées dans les œuvres du répertoire, recourir à des metteurs en scène ou des chorégraphes issus de la diversité et surtout engager un dialogue au sein de la maison pour faire évoluer les esprits.
Certaines actions y ont déjà été engagées, comme l’arrêt du blackface ou du maquillage stéréotypé, le choix de ne plus blanchir la peau des danseurs dans les actes blancs des ballets ou la mise en valeur des figures méconnues, voire oubliées de la diversité, dont la présence sera renforcée dès 2022. Un comité consultatif scientifique sera constitué dans les prochains mois et un référent diversité va être désigné en interne. Enfin, l’adoption d’un plan pour la diversité et l’égalité sera prochainement proposé au personnel. (NF, DG)