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Toulouse. Théâtre du Capitole. 9-X-2020. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Cosí fan tutte, opéra bouffe en deux actes sur un livret de Lorenzo da Ponte. Mise en scène : Ivan Alexandre. Décors et costumes : Antoine Fontaine. Lumières : Tobias Hagström Ståhl. Avec : Anne-Catherine Gillet, Fiordiligi ; Julie Boulianne, Dorabella ; Sandrine Buendia, Despina ; Mathias Vidal, Ferrando ; Alexandre Duhamel, Guglielmo ; Jean-Fernand Setti, Don Alfonso. Chœur du Capitole (direction de chœur : Alfonso Caiani). Orchestre national du Capitole, direction musicale : Speranza Scappucci
« Appassionato sia il vento ! » Le tweet du directeur Christophe Ghristi quelques minutes avant la représentation résume la ténacité de l'équipe du Théâtre du Capitole face à un Cosí fan tutte sans orchestre, mais porté par une passion communicative pour le public, pour les artistes, pour les techniciens, pour la musique.
Revenir dans les salles de concert est aujourd'hui une expérience où l'incertitude est centrale, soumise à de probables désillusions, et cela malgré l'inventivité et la persévérance des professionnels du spectacle vivant. Les spectateurs toulousains s'y sont pourtant essayés en nombre en ce début de saison qui aurait dû démarrer par une nouvelle production « maison » (Les Pêcheurs de perles). À la place, les conditions sanitaires ont amené à programmer l'agréable version d'Ivan Alexandre d'un Cosí qui utilise le fameux théâtre de tréteaux typique des représentations populaires à succès des foires du XVIIᵉ siècle. Et pour ceux qui connaissent cette mise en scène présentée à Bordeaux en fin de saison dernière, c'est la vision musicale de Speranza Scappucci qui suscitait l'intérêt. Afin de satisfaire les premiers déçus qui n'auraient pas pu obtenir une place en raison de la jauge réduite désormais habituelle dans les salles de spectacle, une diffusion en direct (gratuite) était proposée sur le site de l'institution lyrique toulousaine. Ce sera la captation faite en amont qui sera finalement diffusée.
Dès la première étape de la procédure sanitaire qui nous accueille à l'entrée du Théâtre, chaque spectateur est prévenu de la dernière déconvenue : un cas Covid et plusieurs cas contact découverts dans l'orchestre l'après-midi même contraignent le Théâtre à proposer ce soir une version piano/voix. Le cœur lourd, on imagine l'exercice périlleux auquel se prépare à mener toute l'équipe artistique… « On l'a fait », crieront certains d'entre eux dès la sortie du plateau. Et comment !
Le sauveur se nomme Robert Gonnella, habituellement chef de chant au Théâtre, assurant ce soir toutes les parties orchestrales au piano, ovationné dès l'ouverture au regard de sa performance, alors que Speranza Scappuccci improvise au piano-forte le continuo. Étonnante image que cette fosse vide avec seulement ces deux instruments et une cheffe assumant malgré tout la direction de l'opéra face à un pianiste et six chanteurs ! La présence de cet homme de l'ombre au centre de la lumière renforce étonnamment la simplicité rayonnante de la proposition scénique d'Ivan Alexandre, et fait même revivre un rapport plus direct entre la scène et la salle au bénéfice d'une atmosphère conviviale, bien en phase avec ce grand classique lyrique. La salve d'applaudissements en fin de soirée qui lui est dédié n'est qu'un juste retour des choses pour un protagoniste qui nous a fait vivre un moment lyrique magique à bien des niveaux.
Malgré le sourire encourageant d'un directeur qui ne manque pas d'humour lors de son message introductif en distribuant du gel hydroalcoolique à tous les artistes déjà sur le plateau (dans cette production, les personnages évoluent sur scène en pantomime alors que le public s'installe), c'est avec interrogation que les spectateurs réceptionnent les premières notes mozartiennes. Les sourires apparaissent face à une distribution vocale particulièrement engagée, les rires éclatent franchement lorsque Anne-Catherine Gillet (Fiordiligi) s'évanouit en plein milieu d'une réplique, Alexandre Duhamel (Guglielmo) annonçant à la régisseuse la découverte d'un nouveau cas Covid, bien vite rétablie grâce aux mouvements de jupons de Julie Boulianne (Dorabella) et à la décoction d'un charismatique Jean-Fernand Setti (Don Alfonso) qui n'a pas besoin de blouse blanche pour réanimer la belle, doté plutôt d'un timbre puissant, d'un jeu cynique affirmé et d'une prosodie savamment étudiée. Cette aparté n'empêche pas l'espièglerie de l'œuvre de virevolter, particulièrement avec une Sandrine Buendia savoureuse grâce à sa Despina pleine de reliefs, une Anne-Catherine Gillet exaltante dans « Per pieta, ben moi, perdona » avec des aigus rayonnants, une élégance musicale et une finesse interprétative que complète tout au long de ces interactions la technicité vocale précise de son binôme féminin Julie Boulianne, forte d'un engagement constant. Cette soirée étonnante semble libérer un Alexandre Duhamel empreint de verve et d'assurance qui charmera pleinement l'écoute de ce Guglielmo, renforçant la virilité subtile de la prise de rôle de Mathias Vidal en Ferrando.
Pour respecter la distanciation physique, les chanteurs du Chœur du Capitole sont positionnés deux par deux dans les loges d'avant-scène, et aussi au paradis. Le public peut ainsi s'amuser de l'ingénieux dispositif mis en place : le chef de chœur Alfonso Caiani se trouvant lui aussi en hauteur, face à une caméra, afin que sa direction soit retransmise à quelques endroits de la salle pour assurer une précision d'ensemble bien présente.
Aller au spectacle, c'est avant tout vivre un moment unique. Au Théâtre du Capitole, « la seule chose contagieuse, c'est la passion du spectacle ». Une soirée pleine de joie et d'espoir.
Crédits photographiques : © Mirco Magliocca
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Toulouse. Théâtre du Capitole. 9-X-2020. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Cosí fan tutte, opéra bouffe en deux actes sur un livret de Lorenzo da Ponte. Mise en scène : Ivan Alexandre. Décors et costumes : Antoine Fontaine. Lumières : Tobias Hagström Ståhl. Avec : Anne-Catherine Gillet, Fiordiligi ; Julie Boulianne, Dorabella ; Sandrine Buendia, Despina ; Mathias Vidal, Ferrando ; Alexandre Duhamel, Guglielmo ; Jean-Fernand Setti, Don Alfonso. Chœur du Capitole (direction de chœur : Alfonso Caiani). Orchestre national du Capitole, direction musicale : Speranza Scappucci