Les Préludes de Dimitri Kabalevski interprétés par Michael Korstick
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Dimitri Kabalevski (1904-1987) : 24 Préludes op. 38 ; 6 Préludes et fugues op. 61 ; 3 Préludes op. 1 ; 4 Préludes op. 5. Michael Korstick, piano Steinway D. 1 CD CPO. Enregistré dans la Salle de musique de chambre de la Deutschlandfunk, les 17-19 février 2017 et le 15 février 2018 (op. 1). Textes de présentation en allemand et anglais. Durée : 76:21
CPOMichael Korstick impressionne dans les préludes de Dimitri Kabalevski.
Connaissez-vous les préludes pour piano de Kabalevski ? Au total, il en composa quatre cycles englobant trente-sept miniatures. Parmi eux, le plus important est celui de l'opus 38, comportant vingt-quatre morceaux, à l'instar des recueils respectifs antérieurs signés Johann Sebastian Bach, Frédéric Chopin ou Alexandre Scriabine. Quelques années plus tard, Kabalevski sera suivi par Dimitri Chostakovitch.
Les préludes accompagnèrent Dimitri Kabalevski dès les débuts de sa carrière. Ceux de l'opus 1, dans lesquels on remarque sa fascination pour Scriabine, furent achevés en 1925, pendant sa première année au Conservatoire Tchaïkovski de Moscou, alors qu'il était étudiant en piano et composition respectivement dans les classes d'Alexandre Goldenweiser et de Georgi Catoire.
Les Préludes op. 5 furent écrits en 1927, un an après que Kabalevski fût passé dans la classe de Nikolaï Miaskovski, à la suite du décès de Catoire. Si le premier de ces Préludes reste redevable à Scriabine, le recueil ne manque pas de révéler les efforts de leur auteur pour trouver de nouvelles solutions en termes d'harmonie, probablement influencé par les musiques de Paul Hindemith et d'Igor Stravinsky, tout comme par la pentatonique.
Les vingt-quatre Préludes op. 38 dédiés à Miaskovski furent façonnés dans les années 1943-1944, en plein milieu de la Seconde Guerre mondiale. Kabalevski basa chacune de ces miniatures sur une mélodie folklorique russe, afin de montrer que son art était profondément ancré dans le patrimoine national.
Les Préludes et fugues op. 61 furent élaborés en 1958-1959 à des fins pédagogiques. C'est un ensemble de pièces relativement simples, destinées à initier les jeunes pianistes à l'art de la polyphonie, dont les titres illustratifs témoignent de leur candeur comme de leur côté propagandiste, notamment Devenir un jeune pionnier ou Chanson du soir au bord de la rivière.
Dans son voyage à travers ces quatre opus, Michael Korstick combine énergie et poésie. Le cycle des vingt-quatre Préludes op. 38 est de bout en bout captivant, s'avérant, dans cette interprétation, aussi sombre que lumineux, tel un monument associant la grandeur et l'ironie d'un sourire amer. Tout est ici parfaitement mesuré autant que suggestif. Sous ses doigts, chacun des préludes se pare de son propre climat, oscillant entre légèreté diabolique (Scherzando op. 38 n° 2), sensualité, voire intimité (Moderato et tranquillo op. 38 n° 7), déprime (Adagio op. 38 n° 12) et danse macabre (Allegro tenebroso op. 38 n° 16). Le Steinway moderne utilisé dans cet enregistrement, chante, brille et tonne, distillant des sonorités pures et décantées, avec une pédale droite jamais trop présente et un toucher sans dureté, même dans les fortissimi. Dans le Non troppo allegro ma agitato. Recitando, rubato op. 38 n° 10, les accents graves marmoréens introduisent l'inquiétude suivie d'une sorte de marche funèbre. Dans Prestissimo possible op. 38 n° 14, Korstick fait preuve de sa dextérité et de sa virtuosité, certes présente, mais un brin sèche, par l'intermédiaire de laquelle il souligne le caractère néoclassique de ce morceau.
Les autres recueils – ceux des opus 1, 5 et 61 –, sont des ajouts bienvenus, quoique d'une valeur moins significative. Si Michael Korstick met en valeur la limpidité des textures dans les Préludes et fugues op. 61, il essaie de varier les ambiances autant que possible dans les autres Préludes, que ce soit via une articulation précise et nette, une gamme de couleurs étendue ou des légères variations du mouvement.
Voici un disque qui mérite notre attention par sa sublime et électrisante lecture des Préludes op. 38 de Dimitri Kabalevski, un compositeur qui ne cherche pas d'effets superflus, mais une profondeur et une expression raffinée.
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Dimitri Kabalevski (1904-1987) : 24 Préludes op. 38 ; 6 Préludes et fugues op. 61 ; 3 Préludes op. 1 ; 4 Préludes op. 5. Michael Korstick, piano Steinway D. 1 CD CPO. Enregistré dans la Salle de musique de chambre de la Deutschlandfunk, les 17-19 février 2017 et le 15 février 2018 (op. 1). Textes de présentation en allemand et anglais. Durée : 76:21
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