Christoph Eschenbach fête ses 80 ans avec Gil Shaham et l’Orchestre de Paris
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Paris. Philharmonie, Grande salle. 6-II-2020. Felix Mendelssohn (1809-1847) : Concerto pour violon et orchestre n° 2 en mi mineur op. 64. Hector Berlioz (1803-1869) : Symphonie fantastique op. 14. Gil Shaham, violon. Orchestre de Paris, direction : Christoph Eschenbach
À l'occasion de ses 80 ans, Christoph Eschenbach retrouve l'Orchestre de Paris à la Philharmonie, d'abord accompagné de Gil Shaham dans le Concerto pour violon de Mendelssohn, puis seul pour la Symphonie Fantastique de Berlioz.
Immédiatement après l'orchestre, le Stradivarius de Gil Shaham introduit ses premières mesures de l'Allegro molto appassionato, d'où ressort déjà le génie de l'interprétation. Il n'avait plus joué l'ouvrage devant l'Orchestre de Paris depuis 1988, alors accompagné par Daniel Barenboim, mais le violoniste n'a pour autant jamais mis de côté un Concerto pour violon n° 2 de Mendelssohn qu'il connaît sur le bout des doigts. Il file alors seul, d'un geste toujours parfaitement contrôlé pour un premier mouvement accompagné sans grande ferveur par Christoph Eschenbach. Puis le basson annonce l'Andante, et même si, comme les flûtes ou les clarinettes, il laisse ressortir de chaleureuses et amples notes, on peine à percevoir si la direction du chef tente d'y exprimer quelque chose, ou si elle s'arrête à suivre un soliste au son rêveur. L'Allegro molto vivace décuple le style agile et joueur de Gil Shaham, encore plus seul face à un Orchestre de Paris maintenant à peine en place pour l'accompagner, mais dont on remarque toujours la petite harmonie. En bis, le soliste reprend la gavotte de Jean-Marie Leclair, déjà donnée l'an passé, aujourd'hui avec un second Stradivarius, celui de Roland Daugareil, à qui Shaham offre à nouveau la première partie.
80 ans et anniversaire obligent, passons rapidement sur la Symphonie Fantastique de Berlioz dirigée ensuite par Eschenbach telle une longue marche au supplice… L'œuvre qui avait été interprétée au concert inaugural de l'Orchestre de Paris n'avait finalement plus été jouée par l'ensemble en France depuis l'ouverture de la Philharmonie en 2015, sous Paavo Järvi, puis reprise en tournée la même année avec Valery Gergiev. Elle retrouve la salle parisienne alors que depuis deux ans, certains l'ont proposée dans des visions fortes, de John Eliott Gardiner en 2018 à François-Xavier Roth en 2019, ce dernier en compagnie de Lélio. Aujourd'hui, dès l'introduction de Rêveries, passions, les bois se montrent chauds mais fébriles. Puis très rapidement, l'impression que le chef n'a ni lecture, ni même concentration, se ressent trop largement. Les attaques rarement groupées ne convainquent pas plus que les pupitres, ni agencés, ni équilibrés entre eux. Les jeux de réponses des paysans à la Scène aux champs, partis sur scène d'un cor anglais précis mais peu concerné, repris en coulisse derrière le parterre par le hautbois, ne sont qu'un court répit avant l'intervention des altos manquant de justesse et de précision.
Le public parisien semble cependant suffisamment satisfait pour applaudir bruyamment dès la fin de l'œuvre, et laisser après quelques allers-retours les musiciens de l'Orchestre de Paris souhaiter un « Joyeux anniversaire » à leur ancien directeur musical.
Crédits photographiques : Répétition de l'Orchestre de Paris : © Mathias Benguigui / Pasco And Co
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Paris. Philharmonie, Grande salle. 6-II-2020. Felix Mendelssohn (1809-1847) : Concerto pour violon et orchestre n° 2 en mi mineur op. 64. Hector Berlioz (1803-1869) : Symphonie fantastique op. 14. Gil Shaham, violon. Orchestre de Paris, direction : Christoph Eschenbach
Signalons une phénoménale « Fantastique » dirigée par le très regretté Mariss Jansons en juin dernier au Théâtre des Champs Elysées avec les Wiener Philharmoniker: une poésie frémissante de tous les instants, des pianissimos aux mystères envoûtants, un bal bien évidemment incomparable avec un tel orchestre, une marche au supplice cataclysmique et enfin un « songe d’une nuit de sabbat » vraiment terrifiant ( avec un « dies irae » aux tubas abyssaux: on n’entend cela dans nul autre orchestre ). Jansons, visiblement épuisé , a reçu un triomphe mérité du public et fut très chaleureusement applaudi par les musiciens ( ce qui est assez rare avec les Philharmoniker). Hélas, ce fut son dernier concert avec le philharmonique de Vienne, dont il était un des chefs qui les dirigeait le plus fréquemment ( voir ses deux « concerts du nouvel an »). Pour moi, ce fut la « Fantastique » de l’année 2019 vraiment digne de Berlioz. Il est quand même lamentable que l’Orchestre de Paris donne une version manifestement bâclée – ( Eschenbach ou pas Eschenbach manifestement peu à l’aise dans Berlioz- je le préfère dans Brahms ou Hindemith) d’une œuvre qu’ils devraient connaître par cœur. Heureusement qu’ils ont donné une excellente « Damnation de Faust » avec Sokhiev en janvier. Sinon, il y aurait de quoi vivement s’inquiéter.