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Jordi Savall et le théâtre élisabéthain à Berlin

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Berlin. Pierre Boulez Saal. 2-XI-2019. Musiques de scène de Robert Johnson (?-1633), Matthew Locke (1621-1677) [La Tempête] et Henry Purcell (1659-1695) [The Fairy Queen] ; textes de William Shakespeare. Dagmar Papula, Johannes Silberschneider, récitants ; Le Concert des Nations ; direction : Jordi Savall

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Avec , Purcell et Locke deviennent de poétiques musiques de chambre.

La deuxième édition du festival baroque de la Staatsoper de Berlin, centrée autour de la première locale du Primo omicidio coproduit avec l'Opéra de Paris, propose à nouveau toute une série de concerts en ses murs comme en la toute proche Pierre Boulez Saal. Comme l'an passé, figure parmi les invités : tandis que l'Opéra reprend la classique version de Didon et Énée mise en scène par Sasha Waltz, il propose un programme de musiques de scène anglaises du XVIIe siècle, depuis au début du siècle jusqu'à Purcell lui-même. Shakespeare est au cœur de la matinée, et la présence de récitants pour dire ses textes serait bienvenue si les deux acteurs choisis n'étaient pas aussi peu inspirés – les scènes de théâtre berlinoises auraient pu offrir bien des récitants plus inventifs et moins convenus.

Le premier compositeur à l'affiche est , le seul compositeur identifié parmi les anonymes qui ont fourni à Shakespeare les musiques de ses pièces. Savall utilise pour celles-ci le même effectif que pour les autres compositeurs du programme, soit une petite vingtaine de musiciens. C'est sans doute luxueux par rapport aux conditions économiques du théâtre élisabéthain, mais le résultat est éminemment séduisant à la manière propre de Savall : dans l'atmosphère intime de la Pierre Boulez Saal, les grands effets ne sont pas de mise, et il mise sur la rigueur des constructions plutôt que sur une palette chromatique infinie.

Pour ce premier élément du programme, Savall ne dirige pas, mais redevient instrumentiste, sur la viole soprano, à qui sa réalisation de la partition confie bon nombre de solos. Pour la suite du programme, au contraire, il retrouve la position du chef et sa gestuelle toujours minimale, essentiellement de la main droite. Les musiciens du Concert des Nations, nouvelles recrues comme vieux compagnons de route, n'auraient peut-être pas toujours besoin d'être dirigés dans ces pièces, tant la discipline d'ensemble va de pair avec les solistes brillants que comporte l'ensemble ; jusqu'à la chaconne finale, Savall donne aux suites qu'il a choisies dans la musique de The Fairy Queen de Purcell une vie et une délicatesse qui émerveille.

Il manque dans ce concert une partie fondamentale de la réalité musicale du théâtre du XVIIe siècle, le chant choral ou soliste ; il y manque aussi, sans doute, un peu de ce laisser-aller, de cet humour pas toujours élevé qu'on associe au théâtre élisabéthain et que ces musiques laissent parfois entrevoir. Mais peu importe : ainsi traités, ces danses, interludes et airs divers prennent toute la force poétique de la meilleure musique de chambre. Il faut laisser à de tels interprètes cette marge de liberté.

Photo © David Ignaszewski.

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Berlin. Pierre Boulez Saal. 2-XI-2019. Musiques de scène de Robert Johnson (?-1633), Matthew Locke (1621-1677) [La Tempête] et Henry Purcell (1659-1695) [The Fairy Queen] ; textes de William Shakespeare. Dagmar Papula, Johannes Silberschneider, récitants ; Le Concert des Nations ; direction : Jordi Savall

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