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Fervaal de Vincent d’Indy redécouvert à Montpellier

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Montpellier. Opéra Berlioz, Le Corum. 24-VII-2019. Festival de Radio-France Occitanie Montpellier. Vincent D’Indy (1851-1931) : Fervaal, opéra en trois actes et un prologue op. 40 ; livret de Vincent d’Indy d’après le poème d’Axel d’Esaias Tegnér. Version de concert. Michael Spyres, Fervaal ; Gaëlle Arquez, Guilhen ; Jean-Sébastien Bou, Arfagard ; Elisabeth Jansson, Kaito ; Nicolas Legoux, Grympuig ; Éric Huchet, Lennsmor ; Kaëlig Boché, Edwig ; Camille Tresmontant, 4e Paysan / 1er Paysan sarrazin / Chennos ; François Piolino, Ilbert ; Rémy Mathieu, Ferkemnat / Moussah ; Matthieu Lécroart, Geywihr / 5e Paysan ; Eric Martin-Bonnet, Penwald / Buduann ; Pierre Doyen, Le Messager / 3e Paysan / 2e Paysan sarrazin ; Jérôme Boutiller, 1er Paysan / Gwellkingubar ; Anas Séguin, Berddret ; Guihlem Worms, Helwrig ; François Rougier, 2e Paysan / Le Berger / Le Barde. Chœur de la Radio Lettone (chef de chœur : Sigvards Klava) ; Chœur Opéra National Montpellier Occitanie (cheffe de chœur : Noëlle Gény) ; Orchestre National Montpellier Occitanie, direction : Michael Schønwandt

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Fidèle à sa mission, celle de faire découvrir à son public des raretés, le Festival de Radio-France Montpellier met à l'affiche Fervaal de Vincent d'Indy, un ouvrage lyrique au souffle wagnérien, tant dans ses dimensions que par la teneur de son livret. Un document historique qu'il fallait absolument exhumer.

fervaalLa composition de Fervaal court de 1889 à 1895, D'Indy s'adressant au Théâtre de la Monnaie, plus progressiste que la scène parisienne, pour la création de son œuvre monde en 1897. Redonné en 1898 à l'Opéra Comique, il ne sera à l'affiche de Garnier qu'en 1912. Fervent wagnérien, D'Indy est à Bayreuth dès 1876 où il assiste aux représentations de Tristan et Isolde, la Tétralogie et Parsifal, trois ouvrages dont l'écho s'entend dans Fervaal, à travers la symbolique des thèmes abordés, le choix des personnages et l'usage des Leitmotive. Comme Wagner, D'Indy a recours aux légendes du Nord et écrit son propre livret, tiré du poème Axel du Suédois Esaias Tegnér dont il transpose le contexte dans les montagnes ardéchoises. L'histoire se concentre autour du héros chaste et pur Fervaal, élevé par le druide Arfagard et nanti d'une mission sacrée, celle de régénérer le monde, à l'image d'un Siegfried ou d'un Parsifal. Mais Fervaal, blessé au début de l'ouvrage, croise le regard de la sarrazine Guihlen, qui le soigne et pour laquelle il renonce à son vœu de chasteté (Acte I). L'acte II, plus guerrier (on compte parfois une quinzaine de personnages sur scène) est situé au pays de Cravann (Hautes Cévennes), dans les terres même de la famille D'Indy. Éloignant pour un temps Guihlen, le récit fait intervenir la déesse Kaito, sorte d'Erda ou de Norne celtique, annonçant une nouvelle ère qu'il faudra payer d'une mort. Fervaal est choisi comme nouveau chef de guerre, le brenn, fils des Nuées à qui l'on remet l'épée vengeresse. Connaissant sa faute, Fervaal s'offre en victime (Acte III) mais il retrouve Guihlen qui meurt dans ses bras. Déviant alors le mythe de l'amour à mort, D'Indy transforme le suicide du héros en apothéose de lumière : « À l'Orient, la lumière a brillé… L'Amour est vainqueur de la Mort », conclut Fervaal accompagné par Les voix mystiques.

Sur le plateau du Corum, l'orchestre d'envergure quasi wagnérienne, celui de Montpellier Occitanie en grande forme sous la baguette de son chef principal , compte les vents par quatre et inclut clarinettes basse et contrebasse (inouïe à l'époque), ainsi qu'un quatuor de saxophones et quatre saxhorns renforçant les cors : autant de couleurs insolites qui tirent davantage vers le modèle berliozien. Tout au long de l'ouvrage, D'Indy se révèle très fin orchestrateur, dans les préludes de chaque acte notamment. Le sublime solo de cor anglais entendu des coulisses, au début du deuxième acte, évoque d'abord Berlioz et ses profils mélodiques avant de nous rappeler le troisième acte de Tristan. Si le Prologue et sa belle facture unitaire impressionnent par la ciselure de l'écriture orchestrale, le deuxième acte concentre les plus beaux moments de l'ouvrage : avec l'intervention de Kaito (superbe Elisabeth Jansson) et le chœur de femmes en vocalises (celui des Nuées) sur fond d'orchestre quasi impressionniste, que colorent les gammes par ton. La joute sonore des prêtres, bardes et guerriers (on compte pas moins de onze rôles de ténors dans Fervaal !) au terme de la Cérémonie est d'une belle intensité dramatique rehaussée par les chœurs, ceux de l'Opéra de Montpellier et de la Radio Lettone toujours très investis. Tandis que le troisième acte multiplie les situations tristanesques et les tensions chromatiques qui les sous-tendent.

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Saluons d'abord les quelques douze jeunes chanteurs, ténors, barytons et basses, assumant deux voire trois rôles au cours de l'opéra et dégageant une énergie solaire sur le plateau. Quant aux rôles des trois personnages principaux, Fervaal, Guihlen et Arfagard, ils sont rien moins qu'écrasants. D'Indy comme Wagner s'aventuent dans de longs monologues déclamés où les personnages se souviennent du passé pour mieux expliciter le présent : « Écoute donc enfant, retiens mes paroles » dit Arfagard à l'ingénu Fervaal, avant de lui dévoiler ses origines. Si la voix du baryton (le druide Arfagard) semble un rien légère dans un premier acte où les graves peinent à s'imposer, la voix s'ouvre, ductile et bien timbrée par la suite. La mezzo-soprano séduit par la richesse de son timbre et la clarté de sa diction, dans un rôle dont elle exprime tout à la fois la noblesse et la séduction. Il faut enfin l'étendue de registre vertigineuse d'un – en kilt et grandes chaussettes sur la scène – pour aborder le personnage de Fervaal. Familier de la scène française et des ouvrages de Berlioz, Meyerbeer, Auber mais aussi Rossini, ce « baritenore », comme il aime se nommer, assume avec une aisance déconcertante l'écriture vocale d'Indy qui balance entre la déclamation expressive et l'air du grand opéra français : telle cette page admirable, du deuxième acte toujours (« Nuit sans sommeil… Jours sans joie ») où le chanteur, pas toujours impliqué dramatiquement (il doit certes s'économiser pour tenir les trois heures et demi de spectacle) dévoile l'ampleur de son talent.

Exemplaire face à une partition aussi foisonnante que complexe, Michael  Schønwandt conduit sa troupe avec une belle fermeté, soignant les équilibres et maintenant la tension de l'écoute avec une maestria qui force l'admiration.

Crédits photographiques : © Luc Jennepin

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Montpellier. Opéra Berlioz, Le Corum. 24-VII-2019. Festival de Radio-France Occitanie Montpellier. Vincent D’Indy (1851-1931) : Fervaal, opéra en trois actes et un prologue op. 40 ; livret de Vincent d’Indy d’après le poème d’Axel d’Esaias Tegnér. Version de concert. Michael Spyres, Fervaal ; Gaëlle Arquez, Guilhen ; Jean-Sébastien Bou, Arfagard ; Elisabeth Jansson, Kaito ; Nicolas Legoux, Grympuig ; Éric Huchet, Lennsmor ; Kaëlig Boché, Edwig ; Camille Tresmontant, 4e Paysan / 1er Paysan sarrazin / Chennos ; François Piolino, Ilbert ; Rémy Mathieu, Ferkemnat / Moussah ; Matthieu Lécroart, Geywihr / 5e Paysan ; Eric Martin-Bonnet, Penwald / Buduann ; Pierre Doyen, Le Messager / 3e Paysan / 2e Paysan sarrazin ; Jérôme Boutiller, 1er Paysan / Gwellkingubar ; Anas Séguin, Berddret ; Guihlem Worms, Helwrig ; François Rougier, 2e Paysan / Le Berger / Le Barde. Chœur de la Radio Lettone (chef de chœur : Sigvards Klava) ; Chœur Opéra National Montpellier Occitanie (cheffe de chœur : Noëlle Gény) ; Orchestre National Montpellier Occitanie, direction : Michael Schønwandt

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