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Metz. Opéra-Théâtre de Metz-Métropole. 26-XI-2015. Gioachino Rossini (1792-1868) : Il Turco in Italia, « dramma buffo » en 2 actes sur un livret de Felice Romani. Mise en scène : Federico Bertolani. Décors : Giulia Zuccheta. Costumes : Federica Miani. Lumières : Patrice Willaume. Avec : Giovanni Furlanetto, Selim ; Julia Bauer, Fiorilla ; Domenico Balzani, Don Geronio ; Cyrille Dubois, Don Narciso ; Matthieu Lécroart, Prosdocimo ; Anna Destraël, Zaida ; Artavazd Sargsyan, Albazar. Chœurs de l’Opéra-Théâtre de Metz-Métropole (chef de chœur : Nathalie Marmeuse). Orchestre national de Lorraine, direction : José Miguel Pérez-Sierra.
Plateau homogène et mise en scène festive pour Le Turc en Italie, un ouvrage relativement peu donné de Rossini. De quoi ensoleiller nos moroses soirées de novembre.
C'est sous le signe de Naples et de la « napolanité » que se place la jolie mise en scène de Federico Bertolani, illuminée par les éclairages vifs, chatoyants et colorés de Patrice Willaume. Les élégants costumes de Federica Miani, très années 50, sont à l'avenant. Autant les toilettes chic, sexy et BCBG de Fiorilla ou de son dandy de Narciso, adorable Cyrille Dubois, que les fripes et les hardes du petit peuple de la ville, en lieu et place des gitans du livret. En guise de décor, des panneaux coulissants sur lesquels est dessiné un plan tronqué des quartiers de Naples suggèrent, plus qu'ils ne décrivent, le lieu de l'action. Leur véritable fonction est ailleurs avant tout de représenter la confusion amoureuse des différents personnages, perdus dans les méandres de leurs fantasmes ou de leur libido. Mais surtout, cet astucieux décor gère avec finesse et légèreté le ballet incessant des entrées et sorties des protagonistes de la comédie. Les rares accessoires de la mise en scène s'intègrent subtilement à l'action, même si leur utilisation répétée peut paraître redondante à la longue. En témoigne la machine à écrire téléguidée de Prosdocimo, tantôt à la traîne tantôt galopante, à l'image sans doute de l'inspiration capricieuse du personnage du poète à la fois commentateur passif/poussif d'une action dont il peut être aussi, occasionnellement, l'initiateur. Particulièrement réussie est la scène du pliage des draps de Fiorilla, image de la relation de dominant/dominé qui caractérise le couple désassorti que la jeune femme constitue avec son vieux barbon de mari.
Si le spectacle s'épuise quelque peu en cours de deuxième partie, peut-être cela est-il davantage imputable aux maladresses structurelles de la partition – « aggravées » dans cette version messine par l'ajout de quelques airs généralement coupés – qu'au tarissement des idées de la mise en scène, plutôt rondement menée. Quelques coups de canif dans le quatrième mur auront également permis à Geronio d'exprimer ses malheurs en frayant avec le premier rang ou à Fiorilla de tenter d'aguicher quelques membres du public. L'arrêt sur image du dernier tableau permet d'esquisser une intrigue possible avec Albazar, confirmant la vitalité et la pulsion de vie d'une ville par nature insoumise, quoi qu'en dise la convention moralisante qui régit les codes de l'opéra italien de cette époque.
Le plateau, remarquable par son homogénéité vocale, l'est tout autant pour son aisance scénique. Chez les voix graves masculines, on saluera tout particulièrement les belles prestations de Matthieu Lécroart, tout à fait convaincant dans son rôle de poète plus ou moins raté, ou celle de Domenico Balzani, Don Geronio encore bien vert et moins caricatural que d'habitude. Giovanni Furlanetto est un séduisant Selim, même si son chant pourrait encore gagner en souplesse et en virtuosité. Les choses se gâtent un peu chez les dames, avec notamment une Zaida au vibrato particulièrement envahissant pour ce type de répertoire. En Fiorilla, Julia Bauer épate par le naturel et le piquant de son jeu, mais l'acidité de son timbre, surtout dans le médium et le bas médium, gâche une prestation vocale plutôt, dans l'ensemble, de belle tenue.
Pour une fois, ce sont les ténors qui ont remporté la palme, avec tout d'abord la bonne surprise de l'excellent Albazar du jeune Artavazd Sargsyan, aux aigus particulièrement rayonnants. Plus attendu dans sa prise de rôle, Cyrille Dubois campe un Narciso capricieux et narcissique à souhait, au chant toujours aussi raffiné et délicat. La voix, qui a gagné en puissance, en assurance et en amplitude, augure de tout ce qu'il y a de meilleur pour les années à venir. On saluera également la belle prestation du chœur et de l'orchestre, tout en regrettant la baguette quelque peu routinière du chef espagnol José Miguel Pérez-Sierra. On notera pour finir l'originalité de l'accompagnement des récitatifs, avec de belles improvisations autour de chansons napolitaines à la mode.
Crédit photographique : Matthieu Lécroart, Julia Bauer, Anna Destraël, Giovanni Furlanetto, Cyrille Dubois, Domenico Balzani, Artavazd Sargsyan et le Chœur (photo n°1) ; Julia Bauer et Giovanni Furlanetto (photo 2) © Arnaud Hussenot – Metz Métropole
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Metz. Opéra-Théâtre de Metz-Métropole. 26-XI-2015. Gioachino Rossini (1792-1868) : Il Turco in Italia, « dramma buffo » en 2 actes sur un livret de Felice Romani. Mise en scène : Federico Bertolani. Décors : Giulia Zuccheta. Costumes : Federica Miani. Lumières : Patrice Willaume. Avec : Giovanni Furlanetto, Selim ; Julia Bauer, Fiorilla ; Domenico Balzani, Don Geronio ; Cyrille Dubois, Don Narciso ; Matthieu Lécroart, Prosdocimo ; Anna Destraël, Zaida ; Artavazd Sargsyan, Albazar. Chœurs de l’Opéra-Théâtre de Metz-Métropole (chef de chœur : Nathalie Marmeuse). Orchestre national de Lorraine, direction : José Miguel Pérez-Sierra.