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Turin. Teatro Regio. 18-X-2015. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Aida, opéra en quatre actes sur un livret de Antonio Ghislanzoni. Mise en scène : William Friedkin. Décors et costumes : Carlo Diappi. Lumières : Andrea Anfossi. Chorégraphie : Marc Ribaud. Avec : Kristin Lewis, Aida ; Marco Berti, Radamès ; Anita Rachvelishvili, Amneris ; Mark S. Doss, Amonasro ; Giacomo Prestia, Ramfis ; In-Sung Sin, Il Re ; Dario Prola, Un Messaggero ; Kate FRuchterman, Sacerdotessa. Chœur et Orchestre du Teatro Regio (chef de chœur : Claudio Fenoglio). Direction musicale : Gianandrea Noseda
Dans une production sans grande inventivité théâtrale, l'extraordinaire prestation de la mezzo soprano Anita Rachvelishvili sauve Aïda de Giuseppe Verdi d'un ennui programmé.
Quand dans la scène du Nil, Marco Berti (Radamès) retrouve Aïda, il beugle à tous vents un tonitruant « Pur ti riveggo, mia dolce Aïda… » faisant sursauter la moitié de la salle qui venait à peine de s'assoupir à nouveau après un « O patria ! o patria, quanto mi costi ! » que la soprano Kristin Lewis (Aïda) venait de susurrer sans qu'on ne comprenne un traitre mot de sa prononciation italienne. Pour un amoureux retrouvant son amante, quand bien même Radamès est un guerrier, le manque de douceur du propos à de quoi surprendre la « douce Aïda ». Ainsi se résume cette désolante production. Une totale incompréhension des deux principaux protagonistes sur les enjeux de cette histoire avec pour couronnement, un héros incapable de chanter mezza voce sans se retrouver en délicatesse avec le diapason et une soprano inapte de chanter autre chose que des syllabes sans qu'il lui soit possible de former un mot, qui plus est une phrase intelligible.
Et Gianandrea Noseda aura beau faire de diriger l'orchestre du Teatro Regio avec tout son talent, avec toute sa sensibilité, de tirer de cette partition des couleurs d'une rare beauté, de créer des tapis sonores magnifiques, ces protagonistes semblent y être hermétiques.
Reprenant sa production d'Aïda, créée en 2005, à l'occasion de la réouverture du Musée Egyptien de Turin, les scènes du réalisateur William Friedkin montrent une Egypte traditionnelle avec son lot de colonnes hiéroglyphées, de statues gigantesques. Un péplum qui accuse le vieillissement des ans. Hormis la scène du triomphe, grandiose à souhaits, avec un ballet particulièrement enthousiasmant, les scènes se succèdent dans la plus pure tradition. Peu d'inventivité, mais le spectacle se tient.
Vocalement, alors que Mark S. Doss (Amonasro) nous avait enchanté dans le Fliegende Holländer de Turin en 2012, il n'est pas apparu aussi à l'aise dans ce rôle quand bien même sa voix chargée d'un grain mordoré reste toujours extrêmement séduisante. La basse Giacomo Prestia (Ramfis) ne manque pas d'autorité dans son italianité, tout comme l'impressionnant In-Sung Sin (Il Re).
On commençait à sérieusement s'ennuyer, voir à se fâcher devant tant d'imprécisions vocales et de « malcanto » des deux principaux protagonistes quand, le miracle se produisit avec le quatrième acte mettant en scène la mezzo soprano Anita Rachvelishvili (Amneris). Tout à coup, le rêve de l'opéra prenait corps. La scène s'effaçait laissant place à un théâtre enveloppant. Avec une présence vocale imposante la jeune femme submerge l'audience d'un « Gia i Sacerdoti adunansi » suivi d'un bouleversant « Morire ! Ah, tu dei vivere ! ». Quelle largeur de voix, quelle puissance expressive, quelle profondeur dans cette voix qui, tout à coup, fait prendre conscience de l'intensité des pages verdiennes. En véritable artiste, Anita Rachvelishvili emmène le public dans son drame, dans sa jalousie, dans sa quête d'amour, avec une authenticité débordante. Son chant emporte tout sur son passage, l'orchestre se sublime, pour offrir les instants les plus émouvants de cette soirée.
Le public ne s'y est pas trompé réservant un triomphe à la mezzo soprano géorgienne, ainsi qu'au Chœur du Teatro Regio puissant, précis et, comme toujours, musicalement admirablement préparé. Si les autres protagonistes ont pu bénéficier des applaudissements généreux du public, le ténor Marco Berti a, quant à lui, été copieusement « bouhé » par une partie du public.
Crédit photographique : © Teatro Regio/Ramella&Giannese
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Turin. Teatro Regio. 18-X-2015. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Aida, opéra en quatre actes sur un livret de Antonio Ghislanzoni. Mise en scène : William Friedkin. Décors et costumes : Carlo Diappi. Lumières : Andrea Anfossi. Chorégraphie : Marc Ribaud. Avec : Kristin Lewis, Aida ; Marco Berti, Radamès ; Anita Rachvelishvili, Amneris ; Mark S. Doss, Amonasro ; Giacomo Prestia, Ramfis ; In-Sung Sin, Il Re ; Dario Prola, Un Messaggero ; Kate FRuchterman, Sacerdotessa. Chœur et Orchestre du Teatro Regio (chef de chœur : Claudio Fenoglio). Direction musicale : Gianandrea Noseda