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Montpellier. Opéra Comédie. 11-X-2015. Jules Massenet (1842-1912) Chérubin, opéra en trois actes sur un livret de Francis de Croisset et Henri Cain. Mise en scène : Juliette Deschamps. Décors : Macha Makeïeff. Costumes : Vanessa Sannino. Lumières : François Menou. Avec : Marie-Adeline Henry, Chérubin; Çiğdem Soyarslan, l’Ensoleillad ; Norma Nahoun, Nina ; Michèle Lagrange, la Comtesse ; Hélène Delalande, la Baronne ; Igor Gnidii, le Philosophe ; Philipe Estèphe, le Comte ; François Piolino, le Duc ; Julien Véronèse, le Baron ; Denzil Delaere, le capitaine Ricardo ; Jean-Vincent Blot, l’Aubergiste ; Hervé Martin, un Officier. Chœur de l’Opéra national Montpellier Languedoc-Roussillon (chef de chœur : Noëlle Geny) ; orchestre national Montpellier Languedoc Roussillon, direction : Jean-Marie Zeitouni.
Pour l'ouverture de sa première saison à la tête de l'opéra de Montpellier, Valérie Chevalier a frappé fort en choisissant ce rare Chérubin.
On ne peut que lui savoir gré de s'aventurer hors des sentiers battus, et de ne pas nous infliger une kyrielle d'œuvres rabâchées. Quelques sièges vides sanctionnent ce goût de l'aventure. Et pourtant, que la musique de Massenet est belle !
La mise en scène prend le parti d'éclairer l'ensemble par les dernières répliques du livret: « c'est Don Juan ! C'est Elvire !» et la place ainsi sous le signe de la noirceur, de la prédation sexuelle et de l'ambiguïté des mœurs (l'adolescent, tout comme chez Mozart, est chanté par une femme, ce qui lui permet dans le cas présent de déniaiser d'emblée sa gentille fiancée tout en ne se privant pas plus tard de caresses sans ambiguïtés avec son précepteur). Cela a au moins le mérite de débarrasser l'œuvre de tout soupçon de mièvrerie, des dentelles à la Watteau, des délicatesses à la Marivaux, qui peuvent la faire glisser, cela s'est déjà vu, en un long tunnel de guimauve.
Hélas, le côté visuel est loin d'être à la hauteur des ambitions. Si le décor unique est sobre et fonctionnel, les costumes sont d'une abominable laideur : Chérubin arbore une sorte de sarouel et des talons hauts, le philosophe un frac et un tutu, les choristes sont drapés dans un tissu à gros motif rose qu'on n'aurait pas osé imaginer même en plein milieu des seventies, et on n'ose pas évoquer les danseurs, totalement hideux. Il faut bien toute la première partie pour surmonter le choc esthétique et commencer à apprécier le concept. On se rend compte alors à quel point la direction d'acteur est affûtée (la poursuite dans les bois de l'acte III est un modèle de fluidité) et le propos pertinent. Mais c'est déjà bien tard…
L'idée galvanise cependant le côté musical, et sous la baguette énergique de Jean-Marie Zeitouni, l'orchestre délivre une flamboyance et une passion qu'on n'avait jamais soupçonné bouillir sous la surface de ce charmant Chérubin, trop poli pour être honnête.
Marie-Adeline Henry, d'une voix pleine et corsée, est un monument de sensualité et d'équivoque, papillon qui attire irrémédiablement toutes ses proies. En pleine opposition, Norma Nahoun campe une Nina lumineuse et tendre. Çiğdem Soyarslan semble complètement à l'aise dans les roucoulades de l'Ensoleillad, même si on aurait préféré un peu plus de brillant. Igor Gnidii aborde le rôle du Philosophe un peu trop à froid, mais lui confère ensuite une belle humanité.
Les seconds rôles sont extrêmement bien tenus, ce qui, vu leur nombre, confère une véritable unité à la représentation. On donnera une mention spéciale à François Piolino, comme toujours d'une extraordinaire aisance vocale et scénique – cette fois-ci habillé comme une mamie à tricot – à l'aubergiste vraiment drôle de Vincent Blot, et à Michèle Lagrange, qu'on a toujours plaisir à retrouver.
Une irritation visuelle contrebalancée par un véritable plaisir musical, voilà qui n'est déjà pas si mal…
Crédit photographique : © Marc Ginot
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Montpellier. Opéra Comédie. 11-X-2015. Jules Massenet (1842-1912) Chérubin, opéra en trois actes sur un livret de Francis de Croisset et Henri Cain. Mise en scène : Juliette Deschamps. Décors : Macha Makeïeff. Costumes : Vanessa Sannino. Lumières : François Menou. Avec : Marie-Adeline Henry, Chérubin; Çiğdem Soyarslan, l’Ensoleillad ; Norma Nahoun, Nina ; Michèle Lagrange, la Comtesse ; Hélène Delalande, la Baronne ; Igor Gnidii, le Philosophe ; Philipe Estèphe, le Comte ; François Piolino, le Duc ; Julien Véronèse, le Baron ; Denzil Delaere, le capitaine Ricardo ; Jean-Vincent Blot, l’Aubergiste ; Hervé Martin, un Officier. Chœur de l’Opéra national Montpellier Languedoc-Roussillon (chef de chœur : Noëlle Geny) ; orchestre national Montpellier Languedoc Roussillon, direction : Jean-Marie Zeitouni.