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Dijon. Auditorium. 21-II-2015. Gioachino Rossini (1792-1868) : Le Barbier de Séville, comédie en deux actes sur un livret de César Sterbini. Mise en scène : Jean-François Sivadier. Scénographie : Alexandre de Dardel. Costumes : Virginie Gervaise. Avec : Taylor Stayton, le comte Almaviva ; Eduarda Melo, Rosina ; Armando Noguera, Figaro ; Tiziano Bracci, le docteur Bartolo ; Deyan Vatchkov, Basilio ; Jennifer Rhys-Davies, Berta. Chœur de l’Opéra de Dijon (chef de chœur et pianoforte : Emmanuel Olivier), Orchestre Dijon Bourgogne, direction : Antonino Fogliani.
« Comme une explosion, comme un coup de canon, comme un tumulte général » : c'est le texte même de l'air de la calomnie qui illustre le mieux le tempo de la représentation de ce Barbier de Séville sauce moutarde!
Avec les chanteurs survoltés, avec l'orchestre incisif, avec les mouvements incessants sur scène, on retrouve l'esprit de la commedia dell'arte, et son caractère à la fois bouffon et familier.
« Figaro qua, Figaro là, Figaro su, Figaro giù. » Quel tonus possède Armando Noguera ! Vocalement époustouflant, passant de l'imitation de la voix de Rosine aux éclats de rire, à l'articulation la plus démente ou aux vocalises débridées, il saute de la gauche de la scène à la droite, il s'adresse au public, à l'orchestre, il revient des coulisses, se cache derrière Bartolo, tout cela sans que sa voix n'en pâtisse : bref, c'est lui le héros du spectacle.
Il forme une jolie paire de filous avec Taylor Stayton, qui joue les jolis cœurs avec humour. Visiblement il est très à l'aise, pour notre plus grand plaisir, avec le répertoire rossinien ; sa voix colle littéralement au personnage d'Almaviva, et ses vocalises virtuoses ne manquent pas d'accentuer parfois l'aspect enjôleur de ses propos de Don Juan en herbe : quand on pense au sort qui attend la future comtesse… Lui aussi est capable de jouer avec sa voix comme dans le duo qu'il entonne avec Bartolo « Pace et gioia », dans lequel il ressemble à un démarcheur en religion. Il n'y a pas à proprement parler d'erreur dans le casting, car Bartolo et Rosine sont tout aussi remarquables, tant dans leurs performances vocales que dans leur jeu vif et précis : Bartolo en tuteur berné, et Rosine en fraîche luronne qui découvre l'amour et aspire à la liberté.
Il faut reconnaître que les chœurs du théâtre de Dijon sont devenus fort intéressants : ces hommes, qu'ils jouent les musiciens employés par le comte ou la Garde, nous gratifient de sonorités pleines en même temps qu'ils bougent avec une aisance consommée. Johanne Saunier a réglé tous ces déplacements, comme ceux des chanteurs, et c'est réussi.
Antonino Fogliani a fait avec l'orchestre un travail absolument remarquable ; les tempi souvent extrêmement vifs conviennent à la célérité de l'action sans qu'ils entraînent de catastrophes sur le plan de la précision. Les cordes possèdent ce mordant nécessaire à une action débridée, les crescendi avec accélération entrainent les chanteurs comme dans une folle course à l'ivresse musicale. Bravo, bravissimo ! On a aimé aussi le son du pianoforte dans le continuo ainsi que ses dérapages contrôlés et pleins de clins d'œil.
La mise en scène de Jean-François Sivadier et les lumières de Philippe Berthomé décident de montrer toutes les ficelles, au sens propre, des décors : on réduit au maximum les accessoires, les changements se font à vue, et les stores à lattes montent et descendent pour délimiter l'espace scénique ; cela a le mérite de ne pas entraver la folle rapidité de l'action. On a l'impression que cette simplicité feinte correspond à l'aspect bon enfant de la comédie de tréteaux. Pourtant, il ne faudrait pas que le mouvement l'emporte sur la musique, que le visuel masque le son : c'est le cas pour l'ouverture, « encombrée » un tant soit peu par des mouvements de scène qui semblent bien artificiels.
Ce détail mis à part, l'ensemble du spectacle est un puissant remède contre l'ennui et la morosité, et comme dit Figaro, « Colla Donnetta, col cavaliere… A tutti onestamente, non fo per dir, m'adatto a far piacere » : à tous, je m'efforce honnêtement de faire plaisir.
Crédits photographiques : © Frédéric Iovino
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Dijon. Auditorium. 21-II-2015. Gioachino Rossini (1792-1868) : Le Barbier de Séville, comédie en deux actes sur un livret de César Sterbini. Mise en scène : Jean-François Sivadier. Scénographie : Alexandre de Dardel. Costumes : Virginie Gervaise. Avec : Taylor Stayton, le comte Almaviva ; Eduarda Melo, Rosina ; Armando Noguera, Figaro ; Tiziano Bracci, le docteur Bartolo ; Deyan Vatchkov, Basilio ; Jennifer Rhys-Davies, Berta. Chœur de l’Opéra de Dijon (chef de chœur et pianoforte : Emmanuel Olivier), Orchestre Dijon Bourgogne, direction : Antonino Fogliani.