Liz Santoro et Pierre Godard en Mutual Information

L'Atelier de Paris fête ses 25 ans à l'occasion du festival June events en invitant ses anciens artistes associés. C'est le cas de Liz Santoro et Pierre Godard dont la pièce Mutual Information a été présentée à la Ménagerie de verre.

Sur le sol en béton ciré du « garage » de la Ménagerie de verre, des carrés de laine recyclée compactée, subdivisés en triangles, forment un labyrinthe entre lequel sillonnent les deux interprètes de Mutual Information, Liz Santoro et l'acteur, danseur et performer Jayson Batut. Attentifs au moindre signe, ils semblent hésitants, cherchent à se connecter ou à communiquer par quelques gestes fébriles et inquiets.

Une fois réunis par deux, à la façon d'un club sandwich, les carrés découpés laissent le champ plus libre à ces créatures en collant fluo reproduisant, comme face à un miroir, les mêmes gestes. Liz Santoro et Pierre Godard ont en effet voulu réfléchir, à travers cette pièce créée au moment du Covid et aujourd'hui réactivée, sur le concept de l'information mutuelle, qui mesure à quel point deux phénomènes sont interdépendants.

Adeptes d'une danse plus conceptuelle que physique, même si le principe passe bien par la matérialité de la présence physique de chaque interprète, les deux chorégraphes questionnent l'intentionnalité de chaque geste et sa reproductibilité par l'autre. Le résultat est celui d'une écriture en recomposition perpétuelle, mêlant chorégraphie et expérience sensorielle et cognitive. La musique électronique de Chris Peck joue le rôle d'un troisième personnage tandis que les costumes que revêtent à intervalles réguliers les interprètes sont des prêts d'autres chorégraphes, palimpsestes de pièces antérieures.

Refusant toute virtuosité, cet anti-duo plutôt radical renoue avec ce que l'on avait appelé – à tort – la « non-danse » et dont Boris Charmatz ou Jérôme Bel était chef de file à l'époque. Une mise en jeu symbolique des corps pour ce qu'ils sont, dans une recherche d'opposition mimétique et joyeuse. Une forme intellectuelle du spectacle qui conjugue l'absurde et un jusqu'au boutisme étrange, mais stimulant, dans le refus de toute joliesse ou l'absence d'esthétisme.

Crédits photographiques © Patrick Berger