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Mozart au Maroc, une tournée inédite du Concert Spirituel et du Chœur de Chambre du Maroc

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Maroc. Casablanca, 16-V-2025. Tanger, 17-V-2025. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Messe Brève en fa majeur KV 192 ; Messe Brève en ré majeur KV194 ; Sonate d’église en do majeur KV 328 ; Sonate n°7 K224 ; Sonate d’église en fa majeur KV 225 ; Ave Verum Corpus en ré majeur KV 618. Joseph Haydn (1732-1809) : Concerto pour orgue en do majeur Hob. XVIII ; Te Deum n°1 en do majeur Hob. XVIIIc. Johann MIchaël Haydn (1737-1806) : Sub tuum Praesidium en do majeur MH. 654 ; Ave Verum Corpus en fa majeur. Le Chœur de Chambre du Maroc, direction Amine Hadef ; le Concert Spirituel, direction : Hervé Niquet

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    Mozart au Maroc : c'est l'intitulé donné au programme de la tournée qui a réuni le et , sous l'égide de l'Institut français du Maroc. Messes brèves et Sonates d'église de Mozart, assorties de Motets de Haydn ont rempli les églises de Rabat, Marrakech, Casablanca et Tanger, remportant un indéniable succès. 

    Une rencontre musicale pour « organiser le bonheur »

    Né de l'impulsion de l'Institut français du Maroc, cet évènement célèbre les liens forts entre le Maroc et la France. Sollicité, a eu l'excellente idée d'associer et le . Cette formation vocale fondée en 2020 par son directeur artistique , natif de Casablanca, est la première du pays à puiser l'essentiel de son répertoire dans la musique classique occidentale. Formé de chanteurs venus de différents horizons et d'appartenances culturelles et religieuses multiples, il avait été invité dès sa création au Festival des Musiques Sacrées de Fès en 2022. Ce rapprochement des deux ensembles est d'autant plus pertinent et naturel qu'il a trouvé son maillon, par les liens de longue date qu' entretient avec , organiste et ténor longtemps chanteur au sein de son chœur parisien, après avoir été formé auprès de Laurence Équilbey, Florence Guignolet (alors membre du Jeune Chœur de Paris) et Nicole Corti, puis intégré la Maitrise de Notre-Dame de Paris.

    Huit instrumentistes ont donc, en ce mois de mai, franchi la Méditerranée pour rejoindre le chœur marocain. Après avoir monté ensemble leur programme de concert, ils ont en train sillonné le Maroc de Rabat à Tanger, en passant par Marrakech et Casablanca, pour une tournée peu ordinaire, avec à l'affiche pas n'importe quelle musique : celle sacrée européenne. Cela rendu possible par l'ouverture d'esprit et de cœur d'un pays à dominante musulmane mais qui depuis toujours a été une terre d'accueil de toutes les confessions et où règne un savoir-vivre ensemble dans la tolérance et la fraternité. Cela est d'autant plus manifeste qu'il ne rentre plus une épingle dans les quatre églises qui accueillent les concerts, donnés tous à guichets fermés. Au Maroc, non seulement la diversité des cultes est respectée dans leurs lieux dédiés, mais en outre les musulmans entrent dans les églises pour écouter des messes de Mozart et des motets de Haydn.

    Dans la lumière des Messes Brèves de Mozart

    Le programme que nous avons entendu d'abord dans l'Église Notre-Dame de Lourdes, à l'architecture en béton très caractéristique des années 50 à Casablanca, puis à l'église Notre-Dame de l'Assomption de Tanger, celle-ci des années 60 et surnommée « la cathédrale espagnole », assemble les musiques composées par le jeune Mozart entre 1774 et 1779 pour les offices de la cathédrale de Salzbourg, à la demande du Prince-Archevêque Colloredo, et des œuvres sacrées de la même époque de la plume de , mais aussi de son frère Johann Michaël. Entre les parties des deux Messes brèves KV 192 et KV 194 de Mozart (comme l'explique non sans humour en préambule du concert, Colloredo n'avait qu'une exigence, cette brièveté, expédiant ses obligations épiscopales pour s'adonner à ses hobbies favoris) s'intercalent des pièces instrumentales – Sonates d'église de Mozart, le gracieux Concerto pour orgue HOB. XVIII de J. Haydn – et deux autres pièces vocales de J. Michaël Haydn, dont son Ave Verum Corpus qui trouve son célèbre pendant mozartien en seconde partie.

    Les musiciens sous la direction d'Hervé Niquet s'efforcent d'enchaîner sans interruption le programme, en dépit des applaudissements enthousiastes qui interrompent le flux musical. Car tout se tient admirablement bien. Les voix du chœur sont portées par un trio à cordes (deux violons 1, deux violons 2, deux violoncelles), une contrebasse et l'orgue, formant corps avec leur partie instrumentale virtuose, s'entrelaçant avec elle, par endroits dans des interventions contrapuntiques. Ces Messes brèves si rares au concert sont de véritables joyaux mozartiens, concentrant une écriture brillante d'une richesse mélodique et d'une vivacité captivantes, servies ici par des musiciens qui savent leur rendre justice : la première en fa majeur, vigoureuse et lumineuse, expose dans son Credo un thème qui sera repris maintes fois par Mozart jusqu'au « Quam olim Abrahae » de son Requiem. Il est suivi d'un bref Sanctus particulièrement éclatant et joyeux. La Messe en ré majeur KV 194 répand une lumière radieuse dès son Kyrie. Les moments de fusion des pupitres dans les tutti donnent une sensation de grande plénitude sonore. L'Ave Verum Corpus KV 618 interrompt la messe après le Benedictus, le temps de sa douce ferveur implorante, si touchant dans ses nuances pianissimi, ses « nuances d'adoration » (suivant les termes de Jean et Brigitte Massin). Il sera repris en bis cette fois dirigé, avec grande expression, par . Auparavant, la légèreté, la joie de Dona eis Pacem l'emporte après un Agnus Dei sombre et d'une intensité poignante. Et c'est par l'éclat superbe du Te Deum de que se conclut ce concert.

    Après avoir entendu le prometteur il y a trois ans, on reste impressionné par les progrès réalisés en si peu d'années par ses chanteurs dont la plupart sont amateurs. Amine Hadef a su obtenir une qualité professionnelle, insufflant sa passion, son exigence, sa grande sensibilité musicale, fédérant des femmes et des hommes dans le même esprit de travail et de dépassement. Il a fait d'eux des musiciens accomplis, parvenant à une grande cohésion quoique toujours en quête d'un meilleur équilibre des voix et des timbres entre les pupitres, objectif qui sera très probablement atteint avec le temps. À présent on ne peut qu'espérer que sa collaboration avec franchisse la Méditerranée dans l'autre sens, pour se faire entendre sur les scènes et dans les festivals français ! 

    Crédit photographique © Daniel LEB /TEAZER

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    Maroc. Casablanca, 16-V-2025. Tanger, 17-V-2025. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Messe Brève en fa majeur KV 192 ; Messe Brève en ré majeur KV194 ; Sonate d’église en do majeur KV 328 ; Sonate n°7 K224 ; Sonate d’église en fa majeur KV 225 ; Ave Verum Corpus en ré majeur KV 618. Joseph Haydn (1732-1809) : Concerto pour orgue en do majeur Hob. XVIII ; Te Deum n°1 en do majeur Hob. XVIIIc. Johann MIchaël Haydn (1737-1806) : Sub tuum Praesidium en do majeur MH. 654 ; Ave Verum Corpus en fa majeur. Le Chœur de Chambre du Maroc, direction Amine Hadef ; le Concert Spirituel, direction : Hervé Niquet

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