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Le Fusil de chasse de Thomas Larcher fait long feu à Munich

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Munich. Cuvilliés-Theater. 6-V-2025. Thomas Larcher (né en 1963) : Das Jagdgewehr (Le fusil de chasse), opéra sur un livret de Friederike Gösweiner d’après Yasushi Inoue. Mise en scène : Ulrike Schwab ; décor et costumes : Jule Saworski. Avec : Juliana Zara (Shoko), Eirin Rognerud (Midori), Xenia Puskarz Thomas (Saiko), Dafydd Jones (Poète), Vitor Bispo (Josuke Misugi) ; Zürcher Sing-Akademie ; Bayerisches Staatsorchester ; direction : Francesco Angelico

L'œuvre créée en 2018 ne convainc pas plus que sa mise en scène tapageuse, et même de talentueux jeunes chanteurs n'y peuvent rien.

Le Japon toujours : après Matsukaze, l'Opéra de Munich confie une autre œuvre à thème japonais aux jeunes chanteurs de son studio lyrique, avec une bien moindre réussite. Les jeunes chanteurs, disons-le tout de suite, n'y sont pour rien : c'est l'œuvre elle-même qui est avant tout en cause. Das Jagdgewehr, autrement dit Le fusil de chasse a été créé au festival de Bregenz en 2018, dans une petite salle qui complète le grand barnum sur le lac de Constance (un DVD en a été commercialisé, avec une belle distribution comprenant notamment Andrè Schuen et Sarah Aristidou). Peu connu en France, signait alors son premier (et pour l'instant seul) opéra, en collaboration avec Friederike Gösweiner d'après un court roman de Yasushi Inoue (1949) qu'avait déjà adapté Michèle Reverdy en 2000.

La soirée dure moins de deux heures, dont une dizaine de minutes de Monteverdi, comme l'avait déjà fait le festival avec Bluthaus de Haas, mais avec bien moins d'effet. C'est que les trois madrigaux choisis ne font que se rajouter à un opéra qui ne cesse de tomber dans la surcharge : trop de mots, trop de notes, trop d'effets, trop de volume sonore. Sans oublier une surcharge aussi grande de la part de la metteuse en scène , coutumière du fait. L'histoire est simple à comprendre (un homme entre trois femmes, et des lettres comme seules traces d'une histoire révolue), et pourtant on se perd très vite dans la narration, parce que rien ne nous la rend proche, rien ne nous fait comprendre pourquoi on nous la raconte.

Bien sûr, il n'y a aucune fatalité à ce que toute référence au Japon se traduise par une forme de minimalisme zen, ce qui ne serait pas mieux que les poncifs de la couleur locale que les compositeurs ont surexploitée depuis le XIXe siècle. Mais l'éclectisme stylistique de la musique de Larcher, l'écriture caricaturalement opératique qu'il impose aux voix, l'omniprésence du chœur qui n'a pourtant pas grand-chose à dire, tout ceci lasse très vite, la lassitude étant aggravée par le volume sonore perpétuellement élevé (mais le cadre intime du Cuvilliés-Theater n'y est peut-être pas pour rien).

et sa décoratrice ont choisi de placer sur le devant de la scène un pentagone qui occupe tout l'espace, démultiplié par d'autres pentagones en mouvement qui occupent la (faible) profondeur de la scène, si bien qu'on pense par moments au logo de la Philharmonie de Berlin. Au début du spectacle, une membre du chœur dit d'une voix neutre le texte du prologue qui suit : ça ne sert à rien, sinon à montrer la défiance de la metteuse en scène à l'égard du théâtre musical. Les personnages s'y retrouvent engoncés, empêchés d'agir, et les évolutions visuelles du spectacle prennent bien garde à ne jamais donner un sens à l'action. Les jeunes chanteurs, tous membres actuels ou récents du studio lyrique, chantent soigneusement leur rôle, mais la partition ne leur permet pas de susciter l'émotion – on se gardera bien, dans ces conditions, de commenter leurs prestations individuelles ; de même, l'orchestre et le chœur font sans nul doute de leur mieux, mais ne peuvent suppléer à l'insigne faiblesse de la partition.

Crédit photographique : © Geoffroy Schied

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Munich. Cuvilliés-Theater. 6-V-2025. Thomas Larcher (né en 1963) : Das Jagdgewehr (Le fusil de chasse), opéra sur un livret de Friederike Gösweiner d’après Yasushi Inoue. Mise en scène : Ulrike Schwab ; décor et costumes : Jule Saworski. Avec : Juliana Zara (Shoko), Eirin Rognerud (Midori), Xenia Puskarz Thomas (Saiko), Dafydd Jones (Poète), Vitor Bispo (Josuke Misugi) ; Zürcher Sing-Akademie ; Bayerisches Staatsorchester ; direction : Francesco Angelico

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