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Énergique Sacre du Printemps par Aziz Shokakimov à Strasbourg

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Strasbourg. Palais de la Musique et des Congrès. 25-IV-2025. Claude Debussy (1862-1918) : Printemps, L. 68 ; orchestration de Henri Büsser. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concerto pour piano no 22 en mi bémol majeur, K. 482. Jan Liesicki, piano. Igor Stravinsky (1882-1971) : Le Sacre du Printemps (version révisée). Orchestre Philharmonique de Strasbourg, direction musicale : Aziz Shokakimov

Deux semaines après l'avoir dirigé à Dallas, Aziz Shokakimov entraîne son dans un vigoureux Sacre du Printemps, à la suite d'un Concerto n° 22 de Mozart délicat sous le toucher de .


Il arrive régulièrement que les chefs ouvrent un concert avec le Sacre par le Prélude de Debussy, afin de mettre en regard deux facettes du modernisme au tournant du siècle dernier. Mais à Strasbourg, Aziz Shokakimov choisit Printemps du compositeur français, encore plus cohérent par son thème et par la date de la version pour orchestre (1912), bien que moins puissant par l'orchestration d', pourtant supervisée par lui-même.

D'un geste emporté, le chef parvient tout de même à exploiter les couleurs des bois de l', en plus de faire ressortir les cors. La deuxième partie de la pièce, Modéré, tourne un peu à vide – faiblesse de l'écriture oblige – mais est sauvée par l'interprétation grâce à de beaux élans des cordes.

Un long changement de plateau permet d'installer un Steinway B au centre de la scène pour accueillir le pianiste canadien . Connu dès 2012 pour son enregistrement des Concertos n°20 et 21 de Mozart avec Christian Zacharias, il s'attelle maintenant au n° 22, K. 482. L'entrée du pianiste fait oublier une introduction des bois un peu floue. Très délicat, développe en finesse un Allegro molto conclu avec la cadence écrite par Paul Badura-Skoda. Inspirée comme souvent par celle de Hummel et par les thèmes du mouvement, celle-ci se montre plus alerte sur la fin, et libère le pianiste au toucher, sinon toujours gracieux, jamais espiègle. S'agissant du 22e, et non du 9e ou du 21e, plus dynamiques, cela n'est pas gênant. De même on apprécie particulièrement le fait qu'il reste, comme le chef, dans un style très classique à l'Andante, sans chercher un pathos souvent trop marqué, de même que dans le finale, souvent romantisé, voire américanisé comme il l'est dans le film Amadeus de Miloš Forman. Encore dans ce mouvement, la cadence de Badura-Skoda et les clarinettes (découvertes depuis peu à Paris par Mozart) se démarquent de l'interprétation, l'orchestre restant souvent accompagnateur, dans le meilleur sens du terme, du soliste. Dommage que Lisiecki ne choisisse par de rester avec Mozart ou de revenir à une pièce de Debussy en bis, car son Prélude n°4 de Chopin ne parvient pas à s'intégrer dans le programme.

Au retour d'entracte, toutes les forces de l'OPS sont en place pour fournir l'énergie nécessaire à une fougueuse interprétation du Sacre du Printemps d'. Sans surprise interprétée dans la version révisée, l'œuvre débute par un basson quelque peu tendu, qui s'assouplit après quelques mesures, mais laissera tout au long de l'œuvre les meilleurs moments aux clarinettes, magnifiques de bout en bout, surtout les basses. Très bien tenue par la battue claire et précise du chef, la Partie I se développe d'abord sans empressement avec de surprenants moments, comme un superbe rallentando assez inédit en fin de Tempo I de l'Introduction. Déjà remarqués pendant le concerto, les altos parviennent régulièrement à ressortir d'une masse de cordes toujours compacte, d'une puissance qui porte la rythmique du chef-d'œuvre, jamais exagérée par un chef à la gestuelle toujours souple.

Surtout attiré par la dynamique du ballet, Aziz Shokakimov la stimule sans jamais lâcher la bride pendant plus de trente minutes, avec une attention particulière vers tous les groupes, dont il exalte particulièrement les cuivres, étincelants dans certaines parties de trombones, et lorsque les deux derniers cors passent au Wagner Tuben en fin de Partie II. Malgré la justesse limite des deux timbaliers, la Danse Sacrale finale est cependant conclue par un superbe coup final faisant surtout regretter que ce programme complet depuis des mois ne soit donné qu'un seul soir, là où un second soir aurait pu procurer encore plus de densité à l'ensemble, déjà excellent pour cette unique interprétation.

Crédits photographiques : © David Amiot/OPS

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Strasbourg. Palais de la Musique et des Congrès. 25-IV-2025. Claude Debussy (1862-1918) : Printemps, L. 68 ; orchestration de Henri Büsser. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concerto pour piano no 22 en mi bémol majeur, K. 482. Jan Liesicki, piano. Igor Stravinsky (1882-1971) : Le Sacre du Printemps (version révisée). Orchestre Philharmonique de Strasbourg, direction musicale : Aziz Shokakimov

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