Au Châtelet, une soirée énergique et envoutante avec le Ballet du Grand Théâtre de Genève
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Paris. Théâtre du Chatelet. 10-IV-2025.
Boléro. Chorégraphie : Damien Jalet et Sidi Larbi Cherkaoui. Scénographie : Marina Abramović. Musique : Maurice Ravel. Costumes : Riccardo Tisci. Lumières : Urs Schönebaum.
Busk. Chorégraphie : Aszure Barton. Régisseur chorégraphique et collaborateur adjoint : Jonathan Alsberry. Scénographie et Lumières : Nicole Pearce. Musique : August Soderman, Camille Saint-Saëns, Daniel Belanger, Lev « Ljova » Zhurbin, Moondog, Slava Grigoryan. Costumes : Michelle Jank.
Strong. Chorégraphie : Sharon Eyal. Co-chorégraphie : Gai Behar. Assistant chorégraphe : Clyde Emmanuel Archer. Musique : Ori Lichtik. Costumes : Rebecca Hytting. Lumières : Alon Cohen.
Avec : Ballet du Grand Théâtre de Genève
Trois pièces en noir et blanc pour une soirée s'ouvrant (avec Boléro) et se concluant (Strong) sur des rythmes répétitifs et entêtants. Au cœur de cette soirée, Busk, une chorégraphie bluffante où l'ambiance de la rue rencontre avec force les tonalités du chant choral.
Cette soirée en compagnie du Ballet du Grand Théâtre de Genève s'ouvre sur Boléro. Après le succès planétaire de la version de Maurice Béjart en 1961, il était risqué pour Damien Jalet et Sidi Larbi Cherkaoui de s'y frotter en 2013. Les danseurs sont en académiques tout en transparence, les imprimés blancs semblant révéler les squelettes des interprètes. Les voiles nous enveloppent et la ronde se met immédiatement en place avec une grande douceur et en légères arabesques. Les tours et les attitudes s'enchaînent, et c'est avec émerveillement que le fluide tourbillon se dédouble grâce au miroir au-dessus de la scène. Les tours se répondent alors et nous font perdre la tête. Les vapeurs font émerger des duos de danseurs tels des patineurs sur glace grâce à la légèreté des gestes et la magie des lumières. Quelle réussite encore pour ce qui est devenu une des pièces emblématiques des chorégraphes, qui nous confirme qu'il faut toujours oser et que l'art ne cesse de se renouveler ! Ici pour le meilleur.
Après une telle entrée en matière, Busk (2009), de la chorégraphe canadienne Aszure Barton, nous précipite dans les rues des cités californiennes où se côtoient toutes les disparités, économiques et culturelles. Celles-ci sont gommées par les costumes uniformément noirs et informes, sweat et pantalon large. Busk (to busk en anglais signifie se produire dans la rue) joue avec la relation entre l'interprète et le public. Dans un halo de lumière, un homme seul sur un banc. Avec ses gants blancs, il est le danseur de rue pantonyme, il est le mendiant, il est le pantin et l'acrobate. La musique laisse place au chant choral où la danse du groupe vient se lover à la perfection. Groupés au sol, les danseurs dans un impressionnant jeu de têtes donnent vie à une hydre avant de nous plonger dans les bas-fonds souterrains de la ville. Surgit alors un magnifique solo façon hip-hop qui s'enchaîne sans crier gare sur un duo de jazz, puis un trio aux accents yiddish. La pièce se termine sur une alternance des perspectives de groupes et de sauts, un peu comme une grande claque finale envoyée au spectateur.
La troisième et dernière pièce, Strong de Sharon Eyal (2019), est dominée par la trépidation, la solitude, la force et la résilience. La bande son, la lumière et les mouvements nous plongent dans une expérience extatique. Les danseurs en académique noir dansent principalement à l'unisson, mais avec toujours l'un d'eux qui se détache en gestes nerveux, comme possédé par une force irrépressible. En diagonale, les bras s'étirent. De face, les mouvements se ralentissent. Une danseuse se détache : telle une araignée ou bien serait-ce le cyborg Terminator ? La diagonale impressionnante se reforme en petits pas précis et répétés sur demi-pointes. Elle reprend le spectateur de face, puis devient triangle au rythme des retirés à la folle cadence. Une série d'échappés nous donne l'impression, tel un rappel à la première pièce, d'un Boléro techno. Dans une vision contemporaine du corps de ballet et de son soliste, le groupe disparait dans un nuage de fumée. Cette pièce nous emmène dans une litanie obsédante sans fin entre squats, contorsions, mouvements de modern jazz, marche arrogante, traversée latérale d'un danseur qui semble glisser au-dessus du sol, déhanchés insolents, arabesques répétées comme à la barre pour finir en piqués erratiques.
Cette soirée s'achève donc sur une performance technique autant remarquable qu'originale de la part des danseurs qui démontrent ici leur part de liberté derrière la classe de bons élèves.
Crédits photographiques : Boléro © Filip Van Roe ; Busk © Gregory Batardon ; Strong © Gregory Batardon
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Paris. Théâtre du Chatelet. 10-IV-2025.
Boléro. Chorégraphie : Damien Jalet et Sidi Larbi Cherkaoui. Scénographie : Marina Abramović. Musique : Maurice Ravel. Costumes : Riccardo Tisci. Lumières : Urs Schönebaum.
Busk. Chorégraphie : Aszure Barton. Régisseur chorégraphique et collaborateur adjoint : Jonathan Alsberry. Scénographie et Lumières : Nicole Pearce. Musique : August Soderman, Camille Saint-Saëns, Daniel Belanger, Lev « Ljova » Zhurbin, Moondog, Slava Grigoryan. Costumes : Michelle Jank.
Strong. Chorégraphie : Sharon Eyal. Co-chorégraphie : Gai Behar. Assistant chorégraphe : Clyde Emmanuel Archer. Musique : Ori Lichtik. Costumes : Rebecca Hytting. Lumières : Alon Cohen.
Avec : Ballet du Grand Théâtre de Genève