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Montreuil. La Marbrerie. 9-IV-2025. Œuvres de Tomás Bordalejo, Augustin Braud, Anaïs-Nour Benlachhab, Thomas Caillou, Alexandre Perrot, Aida Shirazi, Sylvain Kassap, Diana Soh, Timothée Quost et Matthieu Nauleau. Ensemble 2e2m et Collectif Loo, direction : Léo Margue
Léo Margue, directeur artistique et chef de l'ensemble 2e2m, invitait le collectif Loo pour un « grand soir » festif à la Marbrerie, un moment de partage entre les musiciens de l'écrit et ceux de l'improvisation où tous les âges et les pratiques étaient convoqués.
Le premier concert est au sous-sol, sorte de « crypte urbaine » bien sonnante que l'on teste pour la première fois. Le programme est taillé sur mesure – pièces courtes et solistes – en fonction du lieu et du projet, balançant entre l'écrit et le non écrit. Superbement interprétée par la violoniste de 2e2m Dorothée Nodé-Langlois, la pièce de l'Iranienne Aida Shirazi séduit par la finesse de ses textures rappelant certaines sonorités de la lutherie traditionnelle de son pays. Avec partition toujours, le contrebassiste Louis Siracusa joue La Strapatta de l'Argentin, présent dans le public, Tomás Bordalejo. La Strapatta est un geste bien connu des musiciens de la milonga (ou du tango), rebond rythmique et percussion sur la caisse de l'instrument dont le compositeur exploite les potentialités sonores dans un univers microtonal sensible et sensuel. Plus courte et organique, la partition du compositeur et improvisateur Sylvain Kassap se concentre sur un geste-figure que l'altiste Claire Merlet répète tout en l'agrandissant, dévoilant à mesure la richesse du spectre et ses fines composantes. Pkt de Diana Soh, pour piccolo et électronique, est une pièce brillante et espiègle, entendue sous les doigts de Jean-Philippe Grometto, victime, hélas, des aléas de la technique… La machine est davantage réactive, quoique récalcitrante par instant (les larsen menacent souvent) lors de la performance de Timothée Quost, un musicien du collectif Loo jouant en virtuose de sa trompette amplifiée et transfigurée par l'électronique qui fait monter les décibels en fin de concert.
L'enchaînement avec l'événement suivant est d'une parfaite fluidité. Une vingtaine d'enfants (école élémentaire de Danton de Montreuil) se tiennent debout en demi-cercle dans la grande salle, instruments et accessoires en main, pour une improvisation collective très réussie sous les yeux des parents et le geste aussi généreux qu'incitatif de Léo Margue.
Un temps de restauration et de rencontre avec les artistes est ménagé au mitan de la soirée, avant le concert sur le plateau de la grande salle. Ce deuxième set débute également par une improvisation, des élèves de la classe d'improvisation des Conservatoires de Saint-Maur-des-Fossés et de Boulogne cette fois, le temps que le public s'installe. Le concert réunit pour la première fois les musiciens des deux ensembles avec, au programme, quatre pièces en création. Sans partition pour la plupart, elles sollicitent davantage l'écoute mutuelle et l'improvisation, sans renoncer à la direction de Léo Margue en charge des dynamiques et de la dramaturgie sonore fixés par les compositeurs et compositrices. Ils sont tous les quatre sur la scène, interprètes autant que créateurs.
D'Anaïs-Nour Benlachhab (devant sa console), Carte postale sonore est une pièce mixte fusionnant le son instrumental et une partie électroacoustique réalisée à partir d'enregistrements sur le terrain (Field recording), en Thaïlande et Indonésie. Le voyage est immersif et haut en couleurs, porté vers la transe via les rythmes survoltés du Kecak balinais auxquels s'associe le jeu instrumental. Entre acoustique et électronique, Ondes d'Augustin Braud, jouant de son synthétiseur modulaire, n'est pas moins envoûtant, dessinant une belle trajectoire sonore (accent et désinence) que modèle le geste de Léo Margue. Si la proposition du guitariste Thomas Caillou ne nous convainc pas pleinement, celle du contrebassiste Alexandre Perrault, « Je n'ai jamais craint la rosée », retient toute notre attention. Il fait également appel à la très belle voix de Linda Oláh qui mêle son chant au flux instrumental et dit à voix nue un extrait de Molloy de Beckett dont s'est inspiré le compositeur. Les commentaires instrumentaux qui suivent, dans un espace raréfié, nourrissent une coda très poétique.
Le dernier set (dance floor) met en scène Matthieu Naulleau et son piano augmenté, le pianolophone, véritable synthétiseur analogique. Le performeur est un artiste de la scène électro et de l'improvisation, entre jazz rock et musique répétitive. Il est rejoint par les deux saxophonistes de la soirée, Rémi Fox et Luise Volkmann pour, in fine, faire danser le public de la Marbrerie.
Crédit photographique : © ResMusica
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Montreuil. La Marbrerie. 9-IV-2025. Œuvres de Tomás Bordalejo, Augustin Braud, Anaïs-Nour Benlachhab, Thomas Caillou, Alexandre Perrot, Aida Shirazi, Sylvain Kassap, Diana Soh, Timothée Quost et Matthieu Nauleau. Ensemble 2e2m et Collectif Loo, direction : Léo Margue