Concerts, La Scène, Musique d'ensemble

Le Magnificat de Geoffroy Drouin par Les Métaboles

Plus de détails

Paris. Collège des Bernardins. 24-III-2025. Jonathan Harvey (1939-2012) : Come Holy Ghost ; The Annonciation ; Pérotin (1160-1230) : Viderunt omnes ; Josquin des Prés (1455-1521) : Ave Maria ; Praeter rerum seriem ; Giovanni da Palestrina (1525-1590) : Stabat Mater ; Geoffroy Drouin (né en 1970) : Magnificat (CM). Ensemble les Métaboles, direction : Léo Warynski

Dans la grande nef du Collège des Bernardins, l' et son chef donnent en création mondiale le Magnificat de .

La commande du Collège des Bernardins au compositeur – qui a étudié au Collège et qui y enseigne la théologie -, fait écho à la réouverture de la Cathédrale Notre-Dame et fête les 40 ans de la Faculté Notre-Dame et du Séminaire de Paris. Le programme a cappella des Métaboles met en dialogue l'écriture contemporaine et le répertoire musical sacré (de à Palestrina) qui a nourri la pensée et l'inspiration du compositeur. C'est ce qu'il confie au micro d'Arnaud Merlin lors de l' entretien qui débute la soirée.

Aux sources de la polyphonie médiévale, le Viderum omnes de , organum quadruple du XIIIᵉ siècle, illustre les grandes inventions de l'École de Notre-Dame ; la pièce célèbre, une des premières à être attribuée à un compositeur, convoque les voix masculines. Elles chantent le psaume à l'unisson avant de déployer – et avec quelle ferveur! – au dessus du mot latin chanté et étiré, les longues vocalises destinées à « enluminer » la parole sacrée. Le chœur à voix mixte est au complet dans les deux pages de , compositeur franco-flamand qui est allé « s'ensoleiller » en Italie. L'Ave Maria et le motet Praeter rerum seriem appartiennent au stilo antico du maître de la polyphonie. Dans l'acoustique généreuse de la nef cistercienne, les Métaboles en magnifie l'écriture chorale où s'équilibrent idéalement les quatre voix. En anglais cette fois, Come Holy Ghost du compositeur britannique (qui nous a quittés en 2012) est plus exigeante, mettant au défi des voix aiguës un rien tendues. La pièce est pour double chœur mixte, nourrissant une polyphonie aussi libre que foisonnante qui embrase tout l'espace de résonance. enchaîne le très beau Stabat mater (en latin), pour double chœur également, de Giovanni Palestrina avec The Annonciation du Britannique, une courte pièce, chantée avec beaucoup de sensibilité par l'ensemble vocal, qui prolonge la prière mariale à travers des textures finement élaborées et une autre temporalité.

Le Magnificat de , d'une vingtaine de minutes, est fidèle au texte latin (un Hymne de Marie) auquel le compositeur ajoute, aux deux tiers de l'œuvre et en surimpression, un commentaire en français du cardinal Lustiger (à l'origine de la restauration du Collège des Bernardins qui s'est achevée en 2008).

Drouin confie les premières paroles de la prière, Magníficat ánima méa Dóminum (« Mon âme exalte le Seigneur »), au quatuor vocal qui en exalte les mots dans une harmonie raffinée et une écriture ciselée dont les figures éruptives (brève-longue) ne sont pas sans évoquer Luciano Berio (rappelons que le compositeur italien a, lui aussi, écrit son Magnificat!). Le passage à l'effectif choral (16 voix) est presque imperceptible, les voix, ensemble ou en imitation, déroulant le texte latin avec la même clarté et fluidité. La voix de baryton, en français, s'inscrit sur la parole latine, à laquelle le parlé-chanté donne du relief même si le texte reste difficile à saisir en raison du mélange des langues. La polyphonie se densifie (là où Bach fait une fugue) jusqu'à la doxologie (« Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit ») que le chœur clame à l'unisson, atteignant son climax sur l'Amen final. Sous le geste expert de et dans cet espace dédié à la polyphonie, le Magnificat de Geoffroy Drouin ne pouvait mieux résonner, servi au cordeau par un chœur superbement préparé.

Crédit photographique : © Les Métaboles

(Visited 162 times, 15 visits today)

Plus de détails

Paris. Collège des Bernardins. 24-III-2025. Jonathan Harvey (1939-2012) : Come Holy Ghost ; The Annonciation ; Pérotin (1160-1230) : Viderunt omnes ; Josquin des Prés (1455-1521) : Ave Maria ; Praeter rerum seriem ; Giovanni da Palestrina (1525-1590) : Stabat Mater ; Geoffroy Drouin (né en 1970) : Magnificat (CM). Ensemble les Métaboles, direction : Léo Warynski

Mots-clefs de cet article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Reproduire cet article : Vous avez aimé cet article ? N’hésitez pas à le faire savoir sur votre site, votre blog, etc. ! Le site de ResMusica est protégé par la propriété intellectuelle, mais vous pouvez reproduire de courtes citations de cet article, à condition de faire un lien vers cette page. Pour toute demande de reproduction du texte, écrivez-nous en citant la source que vous voulez reproduire ainsi que le site sur lequel il sera éventuellement autorisé à être reproduit.