Hélène de Montgeroult et Marie Bigot sur les claviers de Lucie de Saint Vincent
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Des dentelles à l’échafaud. Hélène de Montgeroult (1764-1836) : Sonate en fa mineur, op.1 n°3 ; Fantaisie en sol mineur, op.7 n°3 ; Marie Bigot de Morogues (1786-1820) : Suite d’Études ; Andante varié en sib majeur, op.2 ; Sonate en sib majeur, op.1. Lucie de Saint Vincent, piano. 1 CD Présence Compositrices. Enregistré en avril 2023 sur le piano Erard 1802, fac-similé de la collection du Musée de la Musique (1-9) ; en août 2023 dans la salle de l’Atelier de la maison et des jardins Kolthoorn (Pays-Bas) (10-14). Notice de présentation en français et en anglais. Durée : 63:00
Présence CompositricesEntre la facture Stein et le piano Erard de 1802, la musique de deux compositrices, Hélène de Montgeroult et Marie Bigot de Morogues, renait sous les doigts experts de Lucie de Saint Vincent.
Plus connue que Marie Bigot de Morogues à la faveur de la biographie que lui consacre Jérôme Dorival en 2006 (Clef ResMusica), Hélène de Montgeroult (1764-1836) était marquise (par son mariage en 1784), qui aurait sauvé sa tête à la Révolution en jouant La Marseillaise devant le tribunal qui devait la juger ! Elle sera nommée professeur de première classe au Conservatoire de Paris dès sa création et parviendra dès lors à se faire publier en tant que compositrice.
Les deux œuvres choisies par Lucie de Saint Vincent – premier enregistrement mondial comme la plupart des pièces du CD – donnent la mesure de son talent, à travers une écriture vigoureuse qui, bien souvent, évoque le geste beethovénien. Sa Sonate en fa mineur op.1 n°3 résonne sur un piano Erard, fac-similé de la collection du Musée de la musique, pianoforte « en forme de clavecin », nous dit l'interprète. Le Maestoso con Espressione comme l'Allegro agitato laissent apprécier l'élan mélodique, les développements bien conduits, la profondeur des basses et l'effervescence d'un jeu qui met l'instrument dans sa pleine résonance. La Fantaisie en sol mineur est plus aventureuse dans sa trajectoire, suivant les aléas d'une pensée qui modèle la forme à son désir. Lucie de Saint Vincent en épouse tous les reliefs avec souplesse et met en valeur le potentiel du clavier, usant des différents jeux (luthé, una corda, basson, etc.) qui confèrent couleurs et variété de l'articulation.
Engagée depuis près de dix ans dans la redécouverte des musiciennes oubliées, Lucie de Saint Vincent est allée à la BnF, puis jusqu'en Allemagne, pour trouver les premières éditions de Marie Bigot de Morogues (1786-1820). Pianiste célébrée en son temps et repérée par Beethoven, elle appartient comme Montgeroult au cercle de Pierre Baillot, personnalité influente dans le paysage musical de son époque. Elle décède à l'âge de 35 ans et laisse un catalogue beaucoup moins fourni que celui de son ainée. La Suite d'Études, jouée sur le piano Érard toujours, est bien plus qu'une série d'exercices, faisant sonner l'instrument généreusement. Marie Bigot y déploie une inspiration mélodique et une large palette expressive nuancée par les jeux du clavier comme cet écho (céleste ?) entendu dans la 3. L'articulation claire et le toucher délicat de la pianiste donnent élan et fraicheur à ces six miniatures.
Si l'Andante varié sonne de manière un rien convenue, la Sonate en sib majeur qui referme le disque retient toute notre attention. L'interprète a changé d'instrument, faisant sonner un pianoforte Stein à mécanique viennoise, que la compositrice a eu à sa disposition. Il est construit à Vienne en 1804 et restauré en 2020 par Edwin Beunk. Moins rond et chaleureux que l'Érard, il est certes plus clair et plus délié dans l'articulation. Après une introduction lente de belle facture, l'Allegro espressivo ne manque pas d'élégance, moins ornementé que chez Montgeroult mais tout aussi foisonnant dans son écriture. L'Andantino central regorge de subtilités harmoniques mises en relief par l'interprète tandis que le rondo un brin facétieux et presqu'opératique ne manque ni de vitalité ni de brio sous le jeu aussi sensible que lumineux de la pianiste.
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